Travail clandestin: Vaud durcit le ton
Les clandestins pris dans les mailles du filet seront systématiquement renvoyés.
«Il faut casser l'idée que l'économie a besoin de clandestins»,
a déclaré jeudi devant la presse le conseiller d'Etat Jean-Claude
Mermoud.
Avec les facilités de recrutement apportées par les bilatérales,
le Conseil d'Etat juge «inadmissible» le recours à la main d'œuvre
clandestine et compte bien le faire comprendre.
Jusqu'ici, les sanctions qui frappaient les employeurs n'étaient
pas très dissuasives, a reconnu la cheffe de l'économie, Jacqueline
Maurer. Les nouvelles mesures présentées jeudi devraient changer la
donne. «Notre espoir, c'est que la source du problème, l'emploi, se
tarisse», a dit la conseillère d'Etat.
Pas de deal avec Berne
Ce durcissement du ton sur la question des sans-papiers
intervient alors que le Conseil d'Etat négocie avec Berne une
régularisation du dossier des «523» (qui ne sont plus que 224)
requérants d'asile déboutés. «Il n'y a pas de deal», soutient Jean-
Claude Mermoud.
Le canton est en passe de retrouver sa crédibilité sur le dossier
des migrations, et ceci y concourt, a-t-il expliqué. Mais c'est la
volonté du canton, pas une condition fixée par Berne.
Davantage de contrôleurs
Avec une population en constante augmentation alors que le
nombre d'emplois ne croit plus depuis quinze ans, il fallait
réagir, estime le Conseil d'Etat. «Nous voulons profiter de la
conjoncture pour réinsérer le plus grand nombre de travailleurs
possible dans le marché du travail», renchérit Mme. Maurer.
Pour ses contrôles, le canton dispose de trois inspecteurs actifs
dans la construction et deux dans l'hôtellerie-restauration. Ces
effectifs seront renforcés: le canton pourrait recevoir six postes
supplémentaires payés pour moitié par la Confédération à titre de
mesures d'accompagnement pour les bilatérales bis.
Mais surtout, le canton veut faire passer à la caisse les patrons:
les dénonciations seront systématiques, divers émoluments seront
facturés et les frais de renvoi des clandestins seront mis à leur
charge. «Cela fera des montants de l'ordre de 10'000 francs et
plus, parfois beaucoup plus», a calculé Jean-Claude Mermoud.
Unia salue ces mesures
Le syndicat Unia a salué ces mesures de lutte contre le travail
au noir, mais il regrette qu'on n'examine le problème que sous
l'angle des sans-papiers. «C'est une vision réductrice. Dans ce
pays, la majorité du travail au noir est effectuée par des
résidents», a dit Aldo Ferrari, secrétaire syndical à Unia.
ATS/dsz
Renvois systématiques
Concernant les clandestins, le Conseil d'Etat annonce que les décisions de renvois seront «systématiquement appliquées». Mais pas question de s'acharner sur les sans-papiers, affirme Jean-Claude Mermoud: «Il n'y aura pas de charters. Ceux qui seront pris dans les contrôles seront les premiers concernés».
Le canton poursuivra sa démarche de régularisation au cas par cas, pour les sans-papiers qui s'annoncent à l'administration. Sur 800 dossiers, 150 ont jusqu'ici abouti à une régularisation. «Les cas définitivement refusés seront renvoyés», a annoncé Henri Rothen, chef du Service cantonal de la population (SPOP).
Le Conseil d'Etat rappelle que la présence de clandestins a aussi un coût pour les collectivités publiques: il les chiffre à plusieurs dizaines de millions de francs par an, en frais scolaires et médicaux ainsi qu'en cotisations sociales non payées.
Enfin, le Conseil d'Etat va serrer la vis avec les détenteurs de permis B qui restent «trop longtemps et trop largement» à l'assistance publique. Les critères - au moins un an d'assistance et une aide de plus de 80 000 francs - seront appliqués avec souplesse, en tenant compte des cas de rigueur.
En cas d'excès, les bénéficiaires pourraient se voir retirer ou refuser le renouvellement de leur permis B, comme le prévoit la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers. «D'autres cantons appliquent ces dispositions», a dit Jean-Claude Mermoud.