Des accusations similaires, concernant notamment le lecteur
multimédia MediaPlayer, avaient déjà valu à Microsoft de se faire
infliger en mars 2004 par la Commission une amende de 497 millions
d'euros (806 millions de francs), la plus forte jamais imposée à
une entreprise pour des abus de position dominante.
Après trois ans et demi de bataille, la justice européenne avait
donné raison à Bruxelles en septembre 2007. Forte de cette première
victoire, la Commission a ouvert lundi de nouveaux fronts sur
d'autres produits de Microsoft. Les plus emblématiques sont la
suite Office, qui contient le logiciel de traitement de texte Word
ou le tableur Excel par exemple, et le navigateur Internet
Explorer.
Pas de preuves
La Commission dit ne pas avoir à ce stade de preuves d'une
infraction, mais agir suite à des plaintes. L'une avait été déposée
mi-décembre par le fabricant norvégien de logiciels Opera Software.
L'autre émane de l'association ECIS, qui réunit plusieurs groupes
informatiques opposés à Microsoft et milite pour la publication des
informations techniques permettant au plus grand nombre de
logiciels de fonctionner les uns avec les autres
("interopérabilité").
Microsoft se voit cette fois reprocher d'incorporer
automatiquement Internet Explorer à son système d'exploitation
Windows, qui équipe plus de 90% des PC dans le monde. Bruxelles
indique avoir aussi été alertée sur d'autres ventes liées à
Windows, concernant "d'autres produits logiciels" (Windows Live,
Desktop search).
Opacité et bonne volonté
Le groupe américain refuserait aussi de divulguer à ses
concurrents des informations techniques permettant d'assurer
l'interopérabilité d'une "large série de produits", dont la suite
Office et des produits pour les serveurs, détaille la Commission.
Les services européens de la concurrence vont enquêter en
particulier sur le nouveau format de fichier mis en place dans la
dernière version d'Office lancée l'an dernier.
Dans un communiqué, Microsoft a assuré la Commission de sa
"complète" coopération, assurant qu'il "fournirait toutes les
informations nécessaires". Le groupe a réaffirmé sa volonté de se
mettre en totale conformité avec la législation européenne.
afp/jh
La saga Microsoft
Bruxelles a déjà obtenu de Microsoft qu'il commercialise une version de son système d'exploitation Windows expurgée du lecteur multimédia Media Player, et qu'il fournisse une meilleure documentation technique sur Windows à ses concurrents, y compris aux concepteurs de logiciels libres.
Damien Geradin, avocat spécialisé au cabinet Howrey à Bruxelles, a estimé qu'il s'agissait de la "suite de la saga" Microsoft. "Microsoft a des ennemis sur le marché", qui "font flèche de tout bois", a-t-il noté.
Quant à la Commission, "ce n'est pas étonnant qu'elle essaye de réutiliser le jugement" de septembre. Vu la rapidité avec laquelle Bruxelles a ouvert la procédure, "la Commission se dit que ça va être une affaire relativement facile", a estimé l'avocat.
L'association ECIS s'est néanmoins gardée de tout triomphalisme. Elle a simplement jugé "regrettable qu'en dépit du jugement de septembre 2007, Microsoft continue à utiliser son monopole sur les ordinateurs de bureau pour restreindre la concurrence".