Gerold Stadler a pris la fuite dimanche après avoir ouvert le
feu contre son épouse, son beau-frère et sa belle-mère. Grièvement
blessée, cette dernière est dans un état stable, mais sa vie n'est
pas totalement hors de danger.
"Nous n'avons encore aucune trace", a déclaré Renato
Kalbermatten un porte-parole de la police cantonale valaisanne. Un
mandat d'arrêt international a été lancé contre le banquier
saint-gallois de 34 ans car il n'est pas exclu qu'il se soit enfui
à l'étranger.
Mais il est possible que Gerold Stadler se trouve encore dans la
région du Chablais, son véhicule ayant été retrouvé près d'Ollon
(VD). Il pourrait aussi s'être dirigé en direction du Léman, du
Valais ou du canton de Berne. Les recherches se poursuivent.
La police a en outre réitéré son appel à la prudence. L'auteur
pourrait toujours être en possession de son arme de poing, d'un
calibre 9mm, utilisée pour commettre son forfait. Il est considéré
comme potentiellement dangereux. Un appel à témoins a été lancé. Au
moment des faits, le prévenu portait un pantalon sombre et un pull
clair.
Course-poursuite
Le soir du drame, Gerold Stadler est parvenu à semer la police
au volant d'une Audi A3. Sitôt l'alerte transmise, plusieurs
patrouilles ont été engagées afin de barrer les routes de la
vallée. Alors que l'une d'elle parvenait à l'entrée du tunnel sous
l'hôpital de Monthey, le prévenu est passé à sa hauteur. Les agents
l'ont alors pris en chasse.
Dans un premier temps, le banquier est parvenu à distancer la
patrouille en dépassant des voitures dans le tunnel, malgré la
ligne de sécurité et une mauvaise visibilité. La police a ensuite
regagné du terrain, avant que Gerold Stadler ne s'engage sur
l'autoroute où il a été poursuivi à une vitesse de 235 km/h. Malgré
cela, l'homme a réussi à distancer les agents et a quitté
l'autoroute à Bex (VD), puis a abandonné sa voiture à Huémoz.
Problèmes de couple
Le couple a couché l'enfant avant d'entamer une discussion sur
leurs difficultés relationnelles. Les époux se trouvaient au
premier étage de la maison dans l'appartement occupé par la
skieuse. Vers 21h30, ils ont gagné l'appartement des parents
Rey-Bellet à l'étage inférieur pour y poursuivre leur
discussion.
Le frère de la skieuse, sa mère et son père étaient présents. Le
père les a cependant quittés au début de la discussion pour se
rendre dans un autre immeuble. Pour des raisons encore inconnues,
Gerold Stadler a alors sorti une arme de poing et a fait feu. Le
nombre de coups de feu tirés n'a pas été déterminé.
Les corps des deux victimes sont actuellement en cours d'autopsie.
Le fils et le père de la skieuse sont indemnes.
ap/suh
COMMENT PEUT-ON EN ARRIVER LA?
Alors que rien dans le comportement du mari ne présageait un
passage à l'acte aussi radical, Josef Sachs, psychiatre à la
clinique de Königsfelden, donnait quelques pistes de compréhension,
hier soir sur la chaîne suisse alémanique SF.
"Aussi impensable que cela puisse paraître, ces types de
comportements surviennent et ils sont, dans la grande majorité des
cas, causés par des hommes qui ont une pensée très rationnelle, qui
planifient leur vie, leur carrière, leur avenir. Ils peuvent être
submergés lorsque les évènements ne suivent pas le cours qu'ils
souhaitaient leur donner, ou lorsque les situations ont une forte
charge émotionnelle.
Les individus qui passent à l'acte sont souvent des personnes qui
voudraient faire quelque chose mais qui rejettent leurs pensées
pendant des semaines ou des mois. Il existe des signaux précurseurs
à une crise majeure de ce type, mais ils ne sont que très
difficilement décelables : le sujet aura des pensées telles que «je
ne peux plus vivre comme ça» ou «je ferais mieux de mourir». Ils
relativisent ces pensées, mais cependant s'y habituent petit à
petit, jusqu'à ce qu'ils passent à l'acte.
Il y a de nombreux cas de ce genre en Suisse, par rapport à
l'étranger. Cela est à mettre peut-être, selon le docteur, sur le
compte d'un réseau social qui n'est pas aussi bon qu'il devrait
l'être, sur le fait qu'il y ait plus de personnalités très
introverties ou qui cherchent à avoir un contrôle exagéré des
situations".
La presse revient sur le drame
Les quotidiens suisses romands ont largement commenté mardi le drame survenu dimanche soir aux Crosets.
"Le Temps" insiste sur le destin tragique de Corinne Rey-Bellet, qui s'est mariée à un banquier lui ayant proposé en 2000 un programme d'épargne destiné spécialement aux sportifs.
Après sa médaille d'argent à Saint-Moritz (2003), elle attribuera ce succès à son mari. «Trois ans plus tard, le conte de fées a tourné au cauchemar total. Sanglant. Inimaginable», écrit le journal édité à Genève.
Dans son commentaire, "Le Nouvelliste" revient quant à lui sur la personnalité réservée de la championne, née d'une famille dans laquelle "les émotions n'existent pas", selon les déclarations du père de la skieuse au sortir de son podium de Saint-Moritz.
"Le sport de haut niveau et la compétition sans concession ont blindé sa sensibilité", ajoute le journaliste valaisan. Qui conclut : « Sur la piste comme dans la vie, Corinne savait où elle voulait aller. Elle n'aurait jamais pensé franchir la ligne d'arrivée aussi tôt ».
De son côté, « Le Matin » a une pensée pour le fils de la skieuse, deux ans et demi. «Kevin a perdu sa maman. Kevin a perdu son papa, désormais meurtrier de sa maman. Kevin a perdu son oncle. Il a peut-être une chance de ne pas perdre sa grand-maman », commente le quotidien vitaminé.
La presse alémanique ne s'est que peu attardée sur le sujet, mis à part le Blick: le quotidien revient sur les raisons d'un amour déchu. Le retrait de la championne de la compétition, il y a trois ans, constitue un évènement radical dans la vie de Corinne et de son couple. Cependant rien ne laissait présager la crise majeure qu'allait avoir son mari.