Au retour de ce vol de sept heures, tous les commentaires de
ceux qui acceptaient de parler à la presse insistaient sur le
silence et l'espace dans la cabine. "Fabuleux, impressionnant, on
ne sent pas que l'avion décolle, il est très bien isolé, et quand
on se croise on ne se gêne pas", a résumé Ludovic Lesbats, un jeune
salarié d'Airbus Toulouse travaillant sur un avion de transport
militaire.
6500 km sur l'Europe
Le plus gros avion de ligne au monde, venu embarquer et
débarquer ses passagers à quelques dizaines de mètres des terminaux
de l'aéroport, a de nouveau stupéfait les curieux par ses
dimensions (24 m de haut, 73 m de long). "Les remarques qui m'ont
été faites pendant le vol portent sur le silence, sur
l'établissement très progressif de la poussée au décollage,
personne n'a ressenti d'accélération brutale", a confirmé au retour
le chef-pilote d'essais Jacques Rosay qui a parlé de "réussite
totale".
Parti à 10H (O8H GMT), l'avion a parcouru 6500 km au-dessus de
l'Europe pour ce premier des quatre vols d'essai avec passagers
baptisés "early long flights" (ELF). Ils doivent permettre à
l'avionneur d'évaluer l'environnement et les systèmes cabine avant
les phases finales de certification technique.
Passagers volontaires
Quelque 15'000 salariés du groupe avaient postulé pour effectuer
ces quatre vols, dont sept membres du bureau de Pékin. Le sort a
désigné Linda Xu, 32 ans, comptable. Interrogée avant le départ,
elle s'est dite "très chanceuse" avant d'ajouter en souriant: "il y
a une partie travail pendant le vol, mais pour moi, ça sera surtout
l'aspect loisirs qui prévaudra".
Tous les passagers, originaires d'une douzaine de pays,
principalement européens, devaient remplir plusieurs questionnaires
pendant et après le vol. Airbus insiste sur l'importance des
"commentaires humains" recueillis auprès de ces "vrais passagers"
avant l'exploitation commerciale de l'appareil. A bord, une équipe
de 23 hôtesses et stewards appartenant à la compagnie allemande
Lufthansa, renforcée par des personnels d'Airbus, a elle aussi
testé les conditions de service.
agences/tac
Trois autres vols prévus
Ce troisième A380 d'essais, baptisé "MSN002", est le premier exemplaire ayant reçu un équipement de cabine complet.
C'est cet appareil, entièrement équipé à Hambourg (Allemagne) en configuration triclasse, qui servira également aux trois autres vols d'essai cabine d'une durée de 10, 12 et 15 heures, prévus d'ici le 8 septembre.
Le tout premier A380 a effectué son premier vol le 27 avril 2005, sans sièges, mais bardé de testeurs électroniques. Depuis, cinq appareils d'essai ont totalisé 1900 heures de vols en 600 vols sous toutes les latitudes.
La certification technique est attendue fin 2006, juste avant la livraison du premier appareil à la compagnie Singapore Airlines.
Changement de pilote
Airbus remplace Charles Champion par Mario Heinen à la tête du programme A380. Quelques mois après Noël Forgeard, ancien coprésident exécutif d'EADS, maison-mère d'Airbus, et Gustav Humbert, ancien président de la firme, Charles Champion est le 3e responsable à faire les frais des difficultés d'industrialisation de l'A380.
L'annonce en juin dernier de nouveaux retards de livraison de l'A380, qui amputeront le résultat opérationnel de groupe de 2 mrds d'euros entre 2007 et 2010, avait révélé d'importants dysfonctionnements dans les chaînes de commandement du groupe et provoqué la défiance des investisseurs.