Depuis le début de 2006, les assureurs-maladie suspendent leurs
prestations dès qu'une réquisition de poursuite a été déposée pour
retard dans le paiement des primes. Auparavant, les assureurs
devaient attendre l'acte de défaut de biens.
Situations intenables
Or la suspension anticipée des prestations induit "des
situations intenables" pour les personnes concernées, selon la CDS.
Ces dernières seraient près de 120'00, soit 1,6% des assurés. Un
amendement de la loi, estime la CDS, s'impose d'urgence.
Le fait que quelque 120'000 personnes soient touchées par une
suspension des prestations infligée par l'assurance-maladie est
"est inadmissible pour une assurance sociale obligatoire" souligne
la CDS. Ce chiffre tend d'ailleurs à augmenter, car tous les
arriérés de paiement de l'année dernière n'ont pas encore fait
l'objet d'une poursuite.
Incapacité de paiement
L'an dernier, les pouvoirs publics ont versé près de 190
millions de francs pour des arriérés de paiement dans
l'assurance-maladie obligatoire. Ce chiffre, selon la CDS, s'est
considérablement accru au cours des dernières années et a plus que
doublé depuis 2001.
Cette évolution contredit les affirmations des assureurs selon
lesquels les arriérés seraient simplement le fait d'une mauvaise
volonté de payer. L'augmentation significative du nombre d'actes de
défaut de biens prouve que l'incapacité de paiement est bien en
forte croissance dans notre société. La CDS réclame en conséquence
un prompt amendement de la loi et attend du législateur qu'il
agisse rapidement.
Situation plus que précaire
Selon l'ancien droit, les assureurs ne pouvaient suspendre leurs
prestations qu'une fois l'acte de défaut de biens établi. De plus,
cette suspension était facultative, alors qu'elle est automatique
aujourd'hui. Or cette suspensions pose de graves problèmes.
Entre 8 et 24 mois s'écoulent en effet jusqu'à la l'établissement
d'un acte de défaut de biens. Pendant ce temps on ignore si l'on se
trouve en présence d'une personne insolvable ou d'un mauvais
payeur.
Soutien des cantons
Or les cantons et les communes ne peuvent assister
financièrement l'assuré que si son insolvabilité a été prouvée
(voir ci-contre). Pour cela, ils doivent attendre
un acte de défaut de biens. Chez les destinataires de l'aide
sociale ou les personnes qui bénéficient des prestations
complémentaires, les pouvoirs publics peuvent intervenir
rapidement, si bien qu'elles risquent moins de se retrouver en
défaut de paiement que les personnes en situation précaire.
La situation est intenable, pour les personnes connaissant de
façon latente ou provisoire des difficultés de paiement, note la
CDS. Qui plus est, il est difficile de se sortir d'affaire en cas
de suspension des prestations: souvent, les procédures se
suivent.
Obligation d'assurance bafouée
L'obligation d'assurance, la plus importante acquisition de la
loi sur l'assurance-maladie qui n'a que onze ans, est ainsi rendue
inopérante et cela, selon la CDS, "de façon répréhensible".
Les fournisseurs de soins, eux aussi, sont touchés et peuvent
craindre que leurs factures ne restent longtemps ou indéfiniment
impayées.
Il en va de même pour les hôpitaux publics, tenus à l'admission
des patients, où les factures restent en attente ou à la charge des
cantons.
agences/ruc
Neuchâtel très touché
Selon des estimations de la CDS, le pourcentage des assurés frappés d'une suspension des prestations est de 1,6% en moyenne nationale.
Il approche toutefois et dépasse même 2% dans plusieurs cantons (TI, LU, TG, AG).
Il frôle même les 5% dans le canton de Neuchâtel où le nombre des personnes touchées est d'environ 14'000.
Les solutions des cantons
Les cantons abordent le problème de la suspension des soins pour primes impayées de manière différente.
Certains d'entre eux ont passé des accords avec les caisses maladie selon lesquels les primes en souffrance n'entraînent pas un arrêt de la couverture.
La plupart des cantons romands - Genève, Vaud, le Valais ou le Jura - se sont engagés envers les assureurs maladie à payer systématiquement, dès qu'un acte de défaut de biens est délivré.
En échange, les caisses renoncent à la suspension de la prestation prescrite en principe par la loi.
«La raison à cela est que les difficultés financières sont la plupart du temps momentanées», a précisé Semya Ayoubi, collaboratrice au secrétariat central de la CDS.
Lorsqu'un assuré insolvable revient à meilleure fortune, il doit rembourser ce que l'Etat a payé.