Près d'un an jour pour jour après l'annonce des premières
déconvenues, le numéro un bancaire suisse, figurant parmi les plus
touchés au monde par la crise des crédits hypothécaires à risques,
va tenter de rassurer les investisseurs.
Résultat équilibré?
Grâce à un apport inattendu de 3 milliards de francs suisses de
crédit d'impôts, le numéro un mondial de la gestion de fortune
devrait présenter un résultat "équilibré ou légèrement négatif",
après trois trimestres consécutifs dans le rouge.
Cette manne providentielle devrait éponger les nouvelles
dépréciations d'actifs qui viendront s'ajouter aux 37,4 milliards
de dollars que la banque a encaissés depuis l'été dernier. Les
analystes tablent sur 4,7 à 5,6 milliards de dollars de
dévaluations supplémentaires sur l'exercice.
Impopularité croissante
L'attention des marchés sera focalisée sur les sorties nettes de
capitaux dans la gestion de fortune, coeur de métier du groupe. Ces
retraits mettent en exergue l'impopularité croissante de la banque
auprès des grandes fortunes, qui préfèrent mettre leur argent à
l'abri dans d'autres établissements jugés plus sûr.
Après 12,8 milliards de francs suisses de reflux sur les trois
premiers mois de l'année, les analystes de la Banque cantonale de
Zurich tablent sur des retraits de 23 milliards. Même si les reflux
ont diminué au deuxième trimestre, comme l'affirme UBS, "il sera
intéressant de voir si cette tendance se poursuivra" au trimestre
suivant, estime l'analyste Peter Thorne de Helvea.
Jusqu'à présent considérée comme l'une des banques les plus sûres,
l'UBS a subi de plein fouet les turbulences des marchés financiers.
Sur un an, son action a perdu plus de 66% de sa valeur et la
capitalisation boursière a fondu de près de 90 milliards à 45,3
milliards.
En 25e position
Aujourd'hui, la banque pointe en 25e position mondiale en
matière de capitalisation boursière, mais dans les trois premiers
--derrière les américaines Citigroup et Merrill Lynch-- en termes
de dépréciations d'actifs. UBS ne s'est pourtant pas épargnée,
s'administrant une cure de choc pour tenter de rebondir. Elle a
évincé une partie de la direction de sa banque d'affaires,
principale responsable de la débâcle, et annoncé la suppression de
5500 postes.
Mesure la plus symbolique, l'ancien président Marcel Ospel avait
annoncé le 1er avril sa démission. Il a été remplacé par le juriste
Peter Kurer. Le groupe a également procédé à deux recapitalisations
pour se renflouer, levant au total 35,4 milliards auprès
d'investisseurs privés et institutionnels, dont le singapourien
GIC.
La banque a aussi placé 15 milliards de dollars d'actifs adossés à
des crédits hypothécaires dans un fonds géré par l'américain
Blackrock. Mais le sort semble s'acharner sur UBS, qui encaisse les
procédures judiciaires aux Etats-Unis.
Secret bancaire levé aux USA
La banque a été mise en cause dans une affaire de fraude
fiscale, qui pourrait l'amener à dévoiler les noms de ses clients
américains ayant déposé environ 20 milliards de dollars à l'abri du
fisc en Suisse. La levée du secret bancaire, pierre angulaire de la
réputation des banques helvétiques, pourrait encore accélérer le
départ des clients fortunés.
Accusé par le ministère de la justice de l'Etat de New York
d'avoir trompé des milliers d'investisseurs américains sur les ARS
("auction rate securities"), UBS a conclu vendredi un accord avec
les autorités américaines portant sur le rachat aux investisseurs
de 19,4 milliards de dollars de ces titres.
afp/cht
D'autres banques sous enquête aux USA
Le bureau du procureur général de l'Etat de New York Andrew Cuomo a annoncé lundi l'élargissement de son enquête sur la manière dont Wall Street avait géré les marchés des obligations Auction Rates Securities (ARS).
Le procureur général cherche à engager des discussions pour un accord avec JPMorgan Chase, Morgan Stanley et Wachovia. Selon des lettres envoyées à ces trois banques américaines, l'Etat de New York juge que tout accord doit s'inscrire dans la continuité de ceux signés la semaine dernière par l'UBS et l'américaine Citigroup.
Les ARS, des obligations dont la valeur s'est effondrée suite à la crise du crédit, ont un taux d'intérêt réactualisé chaque semaine ou chaque mois via un mécanisme d'enchères. Ces titres sont normalement très liquides car l'investisseur peut les céder à chaque adjudication, mais le mécanisme, sur un marché pesant 330 milliards de dollars, s'est totalement grippé en février en raison de la crise du crédit.
L'accord passé avec l'UBS annoncé vendredi prévoit que la banque s'engage à reprendre pour 8,3 milliards de dollars d'ARS à la plupart des clients privés durant une période de deux ans qui débute le 1er janvier 2009. La banque va en outre racheter dès 2010 pour 10,3 milliards de dollars d'obligations ARS aux investisseurs institutionnels.
La banque devra en sus payer une amende de 150 millions de dollars, qui sera répartie entre les Etats du Massachusetts et de New York. Au total, le coût de l'accord se monte avant impôts à 900 millions de dollars. Celui-ci sera inclus dans les résultats du 2e trimestre, qui seront dévoilés mardi.