"Il est plutôt évident que ces derniers jours, il y en a qui ont
cherché - avec un certain acharnement à Ratisbonne et Munich - des
éléments pour impliquer personnellement le Saint Père dans les
questions des abus" sexuels mais "il est clair que ces efforts ont
échoué", a déclaré samedi le porte-parole du Vatican, le père
Federico Lombardi.
En évoquant Ratisbonne et Munich, le porte-parole fait référence
au fait que le scandale de pédophilie en Allemagne a touché la
chorale de Ratisbonne, dirigée de 1964 à 1994 par le frère du pape,
Mgr Georg Ratzinger. Il fait également allusion à la mise en cause
du pape pour avoir hébergé en 1980 un prêtre soupçonné de
pédophilie lorsqu'il dirigeait le diocèse de Munich.
Benoît XVI hors de cause
Sur cette dernière affaire, le porte-parole souligne que
l'archevêché de Munich a expliqué vendredi "comment l'archevêque
(Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI) était resté complètement
étranger aux décisions à la suite desquelles des abus ont été
vérifiés".
Selon l'archevêché, Mgr Ratzinger n'a été consulté que pour
l'accueil du prêtre suspect pour suivre une thérapie. Le vicaire
général de l'époque, Gerhard Gruber, a assumé "l'entière
responsabilité" de l'affectation de ce prêtre dans une paroisse,
reconnaissant "une grave erreur". Le prêtre avait en 1986 été
condamné en justice pour abus sexuels sur mineurs.
Par ailleurs, Rome s'est efforcé de
relativiser le nombre de cas d'abus sexuels imputables à des hommes
d'église. Samedi, un haut responsable s'est livré à un calcul très
personnel pour chiffrer à "environ 300" les cas de "véritable
pédophilie, c'est-à-dire d'une attraction sexuelle pour des garçons
impubères", commis par des prêtres ou religieux et remontés au
Vatican entre 2001 à 2010.
Durant cette période, il y a eu "environ 3000 accusations
regardant des prêtres pour des crimes commis ces 50 dernières
années", a déclaré Mgr Charles Scicluna, de la Congrégation pour la
doctrine de la foi, dans une interview à Avvenire, journal de la
conférence épiscopale italienne. "Dans environ 60% des cas, on a
plutôt affaire à des actes d''éphébophilie', c'est-à-dire
d'attraction physique pour des adolescents de même sexe. Dans 30%,
de rapports hétérosexuels et pour les 10% restant, de véritable
pédophilie", note le prélat, dans cette interview signalée par la
salle de presse du Vatican.
Des mesure fermes
"En neuf ans, les cas de prêtres accusés de pédophilie sont donc
d'environ 300" sur "400'000 prêtres diocésains et religieux" dans
le monde. "Trop certes, mais il faut constater que le phénomène
n'est pas étendu comme on veut le faire croire", ajoute-t-il. Le
père Lombardi et Mgr Scicluna ont également assuré que le pape
avait mené une action résolue contre ces crimes. "Sa ligne a
toujours été celle de la rigueur et de la cohérence pour affronter
les situations, même les plus difficiles", a affirmé le père
Lombardi.
Après l'Irlande, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Autriche, la
Suisse a rejoint samedi la longue liste des pays touchés par ces
révélations (lire encadré), avec une soixantaine de dénonciations
d'abus sexuels. En Allemagne, dix-neuf des 27 diocèses de l'Eglise
catholique sont concernés par les scandales d'abus sexuels qui ont
commencé à émerger fin janvier.
ats/os
L'Eglise suisse prête à faire toute la lumière
Martin Werlen, l'abbé d'Einsiedeln, a déclaré dans une interview publiée samedi dans la presse alémanique que l'Eglise catholique suisse s'évertue à faire toute la lumière sur les cas d'abus sexuels commis en Suisse. Elle soutient également une prévention efficace.
Les guichets des diocèses, où les victimes peuvent s'annoncer, ont reçu soixante informations sur des cas présumés d'abus sexuels, a déclaré l'abbé Werlen dans une interview accordée à la Mittelland Zeitung.
Il a toutefois indiqué que c'était une conclusion hasardeuse que d'affirmer qu'il y avait soixante cas avérés de pédophilie. Chaque information doit être d'abord vérifiée.
S'il s'agit bien d'un délit passible d'une peine, l'Eglise ne déposera pas plainte, a poursuivi Martin Werlen. L'Eglise recommande à la victime de le faire. "Nous estimons important que ce soit la victime elle-même qui décide les démarches à entreprendre".
L'abbé Werlen laisse ouverte la question de savoir si une suspension menace un prêtre concerné par une plainte. "Une suspension signifie que le prêtre ne peut plus officier ni célébrer de messe", a déclaré l'abbé. "C'est une punition très grave au sein de l'Eglise".
Les personnes inculpées seraient par contre abordées par l'Eglise pour être entendues en interne. Selon le cas, la procédure pénale se déroulerait en parallèle à une enquête de l'Eglise.
Si un prêtre devait confesser un pédophile, cela n'entraînerait pas de plainte. "Le secret de la confession ne sera pas rompu". La confession ne dispense toutefois pas de répondre d'un crime. "S'il y a un délit, je peux faire de l'auto-dénonciation une condition à l'absolution".