«On n'a pas fini de se rendre compte à quel point son oeuvre va
être durable: il y a une oeuvre globale qui a commencé avec son
premier album, 'Romans Photos', en 1977, et qui s'est poursuivie
jusqu'au dernier», estimait ainsi sur France-Info Jean Fauque,
parolier de Bashung sur plusieurs de ses albums, dont «Osez
Joséphine» et «Fantaisie militaire».
«Il faudra toujours rattacher l'un de ses albums, quel qu'il soit,
aux autres. Il y a une cohésion qui est très étonnante, malgré la
diversité musicale dans tous les genres qu'il a pu aborder».
Innovant et populaire
D'une voix unanime, artistes et proches soulignent le caractère
à la fois innovant et populaire d'une carrière entamée dans les
années 1960 et qui aura vu l'ancien étudiant en comptabilité passer
du rock «à la française» de «Gaby Oh Gaby» à des chansons
inclassables telles que «Madame rêve» ou «Ma petite
entreprise».
Pour Boris Bergman, qui fut l'un de ses paroliers dans les années
1980, Bashung restera comme «le chanteur qui a pu montrer qu'on
pouvait faire du rock'n'roll en français».
«Alain Bashung est génial parce qu'il a fait quelque chose d'assez
sophistiqué, d'assez audacieux, même très audacieux, et qu'il a été
quand même populaire et reconnu, c'est un peu unique en fait. Il a
montré que c'était possible d'élever les choses vers le haut. Ça,
c'est un magnifique exemple», estimait le chanteur Arthur H sur
France-Inter.
«C'est vrai que c'est assez rare les mecs qui marquent leur temps
et qui marquent la poésie d'une époque, dans son cas une poésie
rock, une poésie émotionnelle, une poésie un peu chaotique. C'est
comme Gainsbourg en fait, ce sont des gens qui te donnent
envie».
Provocateur et humble à la fois
Tous se rappellent la réserve et la pudeur de Bashung, artiste
influent pourtant plus à l'aise sur scène que dans les médias. «Sur
le plan humain, il était finalement aux antipodes de ce qu'il
chantait, parce que ce qu'il chantait était très provocateur et
lui, dans la vie, était le contraire de ça: en retrait, timide et
humble. Je suis toujours frappée par l'humilité des très grands
artistes», déclarait sur RTL Françoise Hardy, qui avait invité le
chanteur pour un duo sur son album «Parenthèses».
Jane Birkin se rappelait, elle, avec émotion d'un «gentleman»,
«peut-être l'un des hommes les plus élégants», mais aussi «le plus
pudique» et «le plus mystérieux», évoquant «sa générosité» et «sa
délicatesse».
Quant au chanteur Bénabar, il se souvenait samedi soir sur
France-2 d'un artiste «extrêmement humble», «à croire qu'il savait
pas que c'était Alain Bashung». «C'était avant tout un garçon qui
était très réservé», confirmait sur RTL Dick Rivers, qu'Alain
Bashung avait rencontré au début des années 70 et pour lequel il
avait écrit plusieurs chansons.
L'interprète de «Gaby, oh Gaby» s'est éteint samedi après-midi à
l'hôpital Saint-Joseph à Paris des suites d'un cancer du poumon. La
maladie l'avait contraint ces dernières semaines à annuler
plusieurs concerts. Il était monté sur la scène du Zénith fin
février pour la cérémonie des «Victoires de la musique», où il
avait été triplement honoré, devenant l'artiste français le plus
titré de cette cérémonie avec onze récompenses en tout.
ap/ats/bri
L'écriture "à fleur de peau" saluée par les politiciens
L'ancien ministre français de la Culture Jack Lang a salué «l'icône de notre temps» à l'écriture «dense, à fleur de peau, singulière».
«C'est un prince qui (...) nous a quittés, un immense poète, un chanteur engagé», a estimé le président français Nicolas Sarkozy. «Nous prenons congé d'un immense artiste, qui marquera l'histoire de la musique. Nous saluons un homme que chacun aimait», a ajouté le chef de l'Etat.
La ministre de la culture, Christine Albanel, a salué «une oeuvre forte, sensible, souvent mélancolique, qui résonnera longtemps dans nos coeurs et nos mémoires».
Le premier ministre François Fillon a salué le «gentleman rocker de la chanson française», qui a «connu un immense succès populaire sans jamais se départir d'une recherche d'esthétique et d'exploration d'un univers qui lui était très personnel».
Pour Bertrand Delanoë, maire socialiste de Paris, «l'amour et le respect qu'il portait à son public l'ont maintenu debout malgré la maladie, qu'il a combattue avec une dignité et un courage exceptionnels».