Une dizaine de procès, huit pays,
quatre continents: l'affaire opposant Apple à Samsung ne finit
pas de prendre de l'ampleur. Aujourd'hui, la firme de Cupertino
réclame 2,5 milliards de dollars à son concurrent sud-coréen :
Samsung aurait copié l'iPhone et l'iPad, pillant au passage les
brevets d'Apple. Et ce, alors même que Samsung fournit les
processeurs A6 desdits appareils.
Mais si les juridictions américaine et
allemande considèrent que la tablette Galaxy Tab 10.1 plagie le
design d'Apple, ce n'est pas le cas en Grande-Bretagne. Un juge
britannique a en effet estimé que cette dernière n'était pas assez
"cool" pour être confondue avec l'iPad, renvoyant
ainsi Apple dans ses cordes. D'autres procès du même acabit
attendent les deux firmes au Japon, en Australie, en Chine et aux
Pays-Bas.
Plus de brevets pour plus de
financement
Ces procès permettent à Google,
Microsoft ou Apple de consolider leur place sur le marché, en
préservant leurs atouts immatériels. "Ce qui compte
aujourd'hui c'est l'élément distinctif, qui correspond au dépôt
d'un brevet", explique Eric Lequellenec, avocat
spécialiste en droit de l'informatique et des télécommunications.
"Les procès sont devenus des stratégies économiques
normales. Les entreprises attaquent et contre-attaquent pour
préserver leur avantage concurrentiel".
Un avantage qui ne manque pas d'attirer
de nouveaux investisseurs: l'addition de brevets engendre
l'arrivée de capitaux qui permettent à la firme de se développer.
"C'est indispensable de s'engager dans cette course pour
assurer le financement de l'entreprise", souligne
Lequellenec. Le procès est une façon comme une autre de gérer un
portefeuille de brevets des marques.
Entrave à l'innovation
Mais le risque de cette surenchère
juridique, c'est d'étouffer l'innovation. C'est l'inquiétude
évoquée par Steve Wozniak, co-fondateur de la marque à la pomme.
"Les sociétés, comme Apple, Facebook, Twitter et Yahoo !,
ont toutes débuté avec de nouveaux penseurs qui avaient de
nouvelles idées, lance Wozniak, dans The Australian Financial
Review. Maintenant, avec cette situation autour des brevets,
certaines catégories sont lourdement bloquées à cause de grosses
sociétés qui veulent s'assurer de tout posséder".
"De toute façon, il y a trop
d'acteurs sur le marché aujourd'hui", balaye le
consultant allemand Florian Mueller. Pour lui, le secteur de
l'informatique converge vers une industrie solide ralliant à la fois
le matériel informatique, les logiciels, les smartphones et
internet. La guerre des brevets répond alors à une logique de parts
de marché pour s'établir numéro 1 du nouveau secteur.
Les précédents marquants
Apple contre Samsung : iPad contre Galaxy Tab
Date: avril 2011
Litige: Apple porte plainte contre le fabriquant coréen pour avoir copié le design et les fonctionnalités de l'iPad et de l'iPhone. Samsung a répondu par différentes actions légales pour violation de brevets aux Etats-Unis, en Corée du Sud, en Allemagne et au Japon.
Résolution: en cours. Pour l'instant, la bataille se joue en faveur de la marque américaine qui a réussi à interdire la commercialisation de la Galaxy Tab aux Etats-Unis et en Allemagne. Samsung risque de ne plus pouvoir vendre aucun de ses produits sur le territoire américain.
Google contre Oracle : la bataille pour Java
Date: juin 2012
Litige: Google est accusé d'avoir violé des brevets liés au programme Java. Propriété d'Oracle depuis 2010, Java avait été conçu à l'origine en programme ouvert, c'est-à-dire accessible à tous. Une caractéristique qu'Oracle s'est empressé de supprimer, accusant Google de baser tout le système d'exploitation Android sur des applications Java.
Résolution: au terme d'un long procès qui aurait pu se solder par plus d'un milliard de dollars de dédommagement, un jury fédéral a déclaré Google non-coupable.
Creative contre Apple: la guerre du mp3
Date: 2006
Litige: le fabriquant de lecteurs mp3 Creative attaque Apple en justice pour avoir plagié son système d'exportation. L'entreprise singapourienne demande le blocage de l'import et de la vente d'iPods aux Etats-Unis.
Résolution: Apple verse 100 millions de dollars avant le procès, et signe un accord permettant à Creative de produire des accessoires pour l'iPod.