Les étendues de glaces sur Terre se sont considérablement réduites depuis la fin de la dernière période glaciaire. Le phénomène s’explique par les changements de paramètres orbitaux de la Terre, par les émissions de gaz à effet de serre mais également par la dynamique des glaces.
Une équipe de chercheurs des Université de McGill au Canada et de Harvard aux États-Unis vient de mettre à jour un mécanisme important dans la compréhension du phénomène, en démontrant que les glaces de l’hémisphère Nord et de l’hémisphère Sud interagissent entre elles par les variations de niveau des océans.
L’étude, récemment publiée dans la revue « Nature », s’appuie sur des modélisations par ordinateur et sur une vaste gamme de profils géologiques, obtenus notamment à partir de carottes de sédiments extraites du fond de l'océan près de l'Antarctique. Les marqueurs à proximité des rivages ont également été analysés pour déterminer les mouvements des calottes glaciaires.
Grâce à cet ensemble de données, les chercheurs ont pu faire des simulations parallèles de la variation du niveau de la mer et de la dynamique des glaces dans les deux hémisphères au cours des 40 000 dernières années. Ils ont ainsi pu étudier l'effet des facteurs climatiques sur les nappes glaciaires depuis la période précédant l'apogée du dernier âge glaciaire, il y a entre 26 000 et 20 000 ans, jusqu'à nos jours.
L’étude montre que la nappe glaciaire de l'Antarctique s’est beaucoup rétractée au cours des derniers millénaires, au terme de mouvements intermittents. Et que seule une variation du niveau de la mer en Antarctique, causée par des changements dans les nappes glaciaires de l'hémisphère nord, peut expliquer le phénomène.
"Les calottes glaciaires polaires ne sont pas seulement de grands monticules de glaces statiques. Elles évoluent dans un flux constant à différentes échelles de temps, en fonction du climat et des niveaux d’eau environnants", explique M. Gomez, principale auteure de l’étude.
Les chercheurs démontrent qu’au plus fort de la dernière période glaciaire, les glaces de l'Arctique - et de manière générale celles de l’hémisphère Nord -, étaient à leur maximum, ce qui a fait baisser le niveau de la mer en Antarctique, avec à la clé des conditions favorables à l’extension des calottes glaciaires.
Mais avec la hausse des températures qui s’est amorcée par la suite, c’est l’inverse qui s’est produit. En Antarctique, la glace a reculé pour arriver à son étendue actuelle en quelques milliers d'années seulement.
"Nos résultats mettent en évidence l'interconnexion du système terrestre, les changements dans une partie de la planète entraînant des changements dans une autre », conclut Natalya Gomez. « À l'ère moderne, nous n'avons pas vu le genre de retrait de la grande calotte glaciaire que nous pourrions voir dans notre futur monde en réchauffement. L'étude des archives et des modèles de changements dans l'histoire de la Terre peut nous renseigner à ce sujet".
Philippe Jeanneret