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La fonte des glaces au Groenland pourrait être encore plus rapide

Rivière typique de l'Inlandsis [Wikipedia - Expédition ACarré]
Rivière typique de l'Inlandsis - [Wikipedia - Expédition ACarré]
Une étude publiée la semaine passée dans la revue Nature montre que le GIEC a probablement sous-estimé la fonte des glaces du Groenland dans son dernier rapport. Le phénomène s’explique par une accélération de la fonte des glaces à l’intérieur des terres depuis le début du XXIème siècle. Explications.

Dans son dernier rapport le GIEC estime que dans les scénarios les plus pessimistes la fonte des glaces du Groenland pourrait contribuer à une élévation du niveau marin pouvant atteindre 18 cm, d’ici à l’horizon 2100. Pour rappel, le Groenland contient suffisamment de glaces pour faire monter le niveau marin de plus de 7 mètres.

Or, une étude menée par Shfaqat Khan, de l’Université de Copenhague, et par une équipe d’experts américains, français et allemands, montre que l’amincissement des blocs géants de glace qui couvrent le territoire du Groenland – appelés également inlandsis – est plus important que prévu. Le constat s’appuie sur l’observation de l’inland Northeast Greenland Ice Stream (NEGIS), situé au Nord-est du territoire et qui représente 12% de la calotte.

Etendue et localisation du Northeast Greenland Ice Stream (NEGIS) [Nature/Wikipedia - Expédition ACarré]
Etendue et localisation du Northeast Greenland Ice Stream (NEGIS) [Nature/Wikipedia - Expédition ACarré]

Les auteurs de l’étude ont analysé des données collectées à partir d'un réseau de stations GPS installées jusqu'à 200 km à l'intérieur des terres.  Les résultats ont été combinés avec les données d'élévation de surface du satellite Sentinel-1. Un modèle numérique d’écoulement de glace a également été utilisé.

Les résultats, publiés la semaine passée dans la revue Nature, montrent que l’amincissement du Northeast Greenland Ice Stream se produit jusqu’à 200-300 kilomètres des côtes. A lui seul, ce bloc pourrait ainsi contribuer à une élévation du niveau marin de 13,5 à 15,5 millimètres d’ici à la fin du siècle, soit autant que la contribution totale du Groenland au cours des 50 dernières années. Les précédentes estimations faisaient état de chiffres cinq à six fois moins élevés.

Evolution Northeast Greenland Ice Stream (NEGIS) de 2011 à 2021 et prévisions d'ici à 2100 [Wikipedia/Nature - Expédition ACarré]
Evolution Northeast Greenland Ice Stream (NEGIS) de 2011 à 2021 et prévisions d'ici à 2100 [Wikipedia/Nature - Expédition ACarré]

Selon les auteurs, les pertes de glaces à l’intérieur des terres s’expliquent par la présence de courants océaniques plus chauds, qui ont provoqué en 2012 un effondrement de l'extension flottante du Northeast Greenland Ice Stream et accéléré les flux de glaces en amont.

"Les précédentes projections de perte de glace au Groenland ont été largement sous-estimées", a déclaré à l’AFP Shfaqat Abbas Khan, principal auteur de l’étude. "Nous constatons que l'ensemble du bassin s'amincit et que la vitesse de surface s'accélère. Chaque année, les glaciers que nous avons étudiés se sont retirés plus à l'intérieur des terres, et nous prévoyons que cela se poursuivra au cours des décennies et des siècles à venir."

Les chercheurs vont maintenant étendre leurs méthodes à d'autres zones du Groenland et de l'Antarctique. De nouvelles données devraient être disponibles d'ici un an environ, elles permettront de mieux évaluer le potentiel de hausse du niveau marin d'ici à l'horizon 2100.

Une précédente étude, publiée en août 2022 par le  Service national de géologie du Danemark et du Groenland (GEUS), a estimé que la hausse des océans, provoquée par la fonte des glaces du Groenland, pourrait atteindre 27,4 cm d'ici à 2100.

Philippe Jeanneret, avec la revue Nature

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