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Les petits mammifères sont plus vulnérables face aux tempêtes

Les Imbalas, de la famille des antilopes, ont particulièrement souffert lors des évènements d'Idaï en mars 2019. [NASA/NOAA/Wikipedia - Bernard Dupont]
Les Imbalas, de la famille des antilopes, ont particulièrement souffert lors des évènements d'Idaï en mars 2019. - [NASA/NOAA/Wikipedia - Bernard Dupont]
Une étude récemment publiée dans la revue Nature montre que la taille est un facteur important chez les mammifères pour survivre à une catastrophe naturelle. Elle s’appuie sur les observations faites pendant les évènements d’Idai, le cyclone le plus meurtrier de l’histoire de l’hémisphère Sud.

Classé en catégorie 3 sur l’échelle de Saffir-Simpson, le cyclone Idai a frappé le Mozambique, le Zimbabwe, le Malawi et Madagascar entre le 4 et le 21 mars 2019. Il s’est accompagné de rafales à près de 205 km/h et a provoqué de graves inondations, faisant plus de 1000 morts et 3000 disparus.  Selon les derniers bilans, 3 millions de personnes ont été sinistrées.

Lors de son passage au Mozambique, le cyclone s’est abattu sur le parc national de Gorongosa, l’un des mieux équipés de la planète pour observer la faune :

« Grâce à un vaste réseau de caméras, de balises GPS et autres systèmes de détection, le personnel du parc et les scientifiques ont eu une occasion sans précédents d’observer les réactions des animaux face à la tempête» explique Hallie Brown, assistante de recherche au département d'écologie et de biologie de l'environnement de Princeton et coauteure de l’étude.

Trajectoire du cyclone Idaï entre le 4 et le 21 mars 2019 [Nasa/NOAA]
Trajectoire du cyclone Idaï entre le 4 et le 21 mars 2019 [Nasa/NOAA]

Présente lors des évènements, la chercheuse se souvient : « Nous avons vu les eaux s’élever et nous avons observé les réactions des animaux dans les heures, les jours, les semaines qui ont suivi la catastrophe. Nous avons ainsi compris pourquoi certaines espèces échappaient au désastre et pourquoi d’autres n’y arrivaient pas ».

L'équipe de recherche a découvert que le meilleur prédicteur de survie pour les mammifères était la taille. Le petit oribi, de la famille des antilopes naines et qui fait environ 60 cm au garrot, a par exemple vu sa population chuter de 50%. Environ la moitié des reedbucks, également de la famille des antilopes mais légèrement plus grands, sont morts. Les bushbucks en revanche, dont la taille est de 100 cm, n'ont perdu que 4 % de leur population totale. Quant aux plus grands herbivores, ils ont tous survécu.

Les Bushbucks (à gauche) ont mieux supporté les inondations de 2019 que les Oribis, qui sont de plus petite taille (à droite). [Wikipedia - Bernard Dupont/Steve Garvie]
Les Bushbucks (à gauche) ont mieux supporté les inondations de 2019 que les Oribis, qui sont de plus petite taille (à droite). [Wikipedia - Bernard Dupont/Steve Garvie]

 « Les animaux de petite taille ne parvenaient à échapper à la montée des eaux ou n’étaient plus en mesure de se nourrir », explique encore Hallie Brown.  « Le niveau des eaux est resté assez élevé pendant une longue période, ce qui a détruit une grande partie des graminées et de la végétation de faible altitude, qui constituent la nourriture de base des herbivores. Les petites espèces, qui supportent mal les périodes de carences, ont été très impactées par le phénomène, contrairement aux grandes qui ont tenu grâce à leurs réserves de graisse ».

De leur côté, les carnivores du parc ont bien résisté à la tempête. Les chiens sauvages et les léopards ont bénéficié du repli de leurs proies sur les zones de montagne pour continuer à se nourrir. Même constat pour les lions : les phacochères, qui sont leur principal gibier, ont réussi à se maintenir hors des zones inondées.

Taille et poids des principales espèces de mammifères du parc national de Gorongosa au Mozambique [Wikipedia - Paulo Oliveira]
Taille et poids des principales espèces de mammifères du parc national de Gorongosa au Mozambique [Wikipedia - Paulo Oliveira]

Au terme de leur étude, les chercheurs font deux recommandations pour les gestionnaires de la faune: évacuer les créatures les plus petites et les plus vulnérables vers des zones plus sûres avant l’arrivée des tempêtes, et fournir des aliments supplémentaires après leur passage.

L'équipe comprend des institutions de cinq pays: l'Université de Princeton; l'Université de l'Idaho-Moscow; l'Université de Californie-Merced; l'Université d'État du Montana-Bozeman; l'Université de Paris-Bozeman; l'Université de Biside; l'Université de l'Archbold Biological Station de Venus, en Floride; l'Université de la Colombie britannique-Vancouver; le parc national de Gorongosa; l'Université de Kent; l'Université de Witwatersrand-John-Johanssbourg.

Philippe Jeanneret avec la revue Nature et  l'Université de Princeton

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