Volet 1 / Les skis et les fixations de hier à aujourd'hui

Grand Format - L'évolution du matériel en ski alpin

Introduction

Le ski, sport national en Suisse, a connu moultes évolutions au fil des années. Dans ce reportage, nous remontons le temps, de la moitié du 19e siècle à nos jours, afin de vous faire découvrir le ski alpin de hier à aujourd'hui. A travers quatre volets, nous vous proposons de revenir sur l'évolution du matériel de ski alpin. Pour ce faire, nous sommes partis à la rencontre des acteurs du Cirque blanc. Des anciens skieurs à la nouvelle génération en passant par les hommes de l'ombre qui gravitent autour des athlètes ou encore un passionné, fondateur du Musée du ski, tous évoquent le matériel et son évolution. Honneur pour ce premier volet aux ski et fixations.

Chapitre 1
Du milieu du 19e siècle à nos jours

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L'apparition des premiers skis remonte à des millénaires. Des pétroglyphes ont en effet été retrouvés dans diverses grottes situées au nord de l’Europe, que cela soit en Scandinavie ou en Sibérie. Néanmoins, aucun travail historique n’a pu encore affirmer où et à quelle date sont nés les skis. Et parce que nous avons choisi de traiter le ski de compétition, nous allons commencer l’histoire du ski au milieu du 19e siècle.

Sondre Norheim, premier pionnier

A cette époque, le ski n’est plus seulement vu comme un moyen de déplacement, mais il revêt également un côté sportif. L'inventeur? Le Norvégien Sondre Norheim. Depuis tout petit, et comme la plupart des jeunes et moins jeunes de ses compatriotes, il se déplace à skis. Mais, ce qu’il aime par-dessus tout, c’est dévaler les collines qui dessinent les reliefs de sa région, le Telemark. Et non seulement il apprécie cette sensation de vitesse, mais il cherche également à améliorer son matériel.

Pour gagner en maniabilité, l’homme réduit la taille de ses skis de soixante centimètres, passant de trois mètres à deux mètres quarante. Pour parfaire la direction, il pose une simple rainure sous la semelle. Et, pour qu’il soit plus souple, moins rigide sur sa paire, il les taille dans la forme que nous connaissons actuellement: en spatule, qui s’élargit à l’avant et à l’arrière.

Enfin, Sondre Norheim met au point un prototype de la fixation de ski. Cette évolution, qui permet une certaine stabilité du pied et donc un meilleur contrôle latéral, marque la naissance du télémark, technique où le pied arrière doit être soulevé à chaque virage. Le Norvégien peut ainsi tailler des courbes que ses skis initiaux ne permettaient pas.

Voir les skis comme une possible activité sportive? Sondre Norheim est un précurseur en la matière. [Imago - NTB]
Voir les skis comme une possible activité sportive? Sondre Norheim est un précurseur en la matière. [Imago - NTB]

La folle expédition de Fridtjof Nansen

Mais, c’est assurément une expédition polaire qui soulève un vif intérêt pour la pratique sportive du ski. Après avoir traversé avec succès le Groenland, le Norvégien Fridtjof Nansen écrit un livre intitulé "A ski à travers le Groenland".

Cet ouvrage, appuyé d’innombrables illustrations, montre comment se déplacer dans les zones sans relief et glisser efficacement dans les portions avec de la pente. Vendu avec succès dans toute l’Europe, il est pionnier dans l’idée que le ski peut être un sport.

Auteur d'un best-seller sur le ski, Fridtjof Nansen en a intéressé plus d'un à la pratique du ski. [Imago - Granger]
Auteur d'un best-seller sur le ski, Fridtjof Nansen en a intéressé plus d'un à la pratique du ski. [Imago - Granger]

Mathias Zdarsky jette les bases du ski moderne

Mathias Zdarsky ne reste pas insensible à cette nouvelle notion du ski, au point de devenir le fondateur du ski alpin tel que nous le connaissons aujourd’hui. A la fin du 19e siècle, l’Autrichien raccourcit considérablement la taille des skis, les faisant passer à une longueur de moins de deux mètres (un mètre huitante). Il invente également des fixations métalliques qui réduisent drastiquement le flottement dont étaient coupables les lanières en cuir. Cette innovation est à souligner, car elle permet d'effectuer la première courbe du ski moderne: le stem-christiania.

Cet artiste-peintre et sculpteur de profession écrit même ce que nous pourrions considérer comme le premier manuel du ski. "Alpine Skifahr-Technik" explique avec méthodologie comment skier correctement selon la pente.

Zdarsky est considéré comme le père du ski alpin moderne. [Bezirksmuseum and fis zdarsky]
Zdarsky est considéré comme le père du ski alpin moderne. [Bezirksmuseum and fis zdarsky]

La reconnaissance du ski en tant que sport, l'objectif Lunn

Enfin, Arnold Lunn mérite également quelques lignes. Certes, il n’a pas apporté de modifications aux skis, mais l’Anglais est tout simplement le pionnier du ski de compétition. Fondateur de multiples clubs de ski comme le Kandahar Ski Club en 1924, il codifie le slalom et la descente, il invente les portes pour la descente, les piquets pour le slalom et l’idée que la vitesse est le "facteur déterminant", au contraire des anciennes courses, où une note de style était attribuée.

Promoteur et défenseur du ski alpin, Arnold Lunn organise, en 1911 à Crans-Montana, la première véritable course de ski alpin. Par la suite, il réussit à convaincre la Fédération internationale de ski (FIS) de mettre à l’essai la discipline aux Jeux olympiques de 1928 à Saint Moritz et finit par faire reconnaître la descente et le slalom par la haute instance en 1930. Ainsi, juste un an après, les premiers Championnats du monde de ski alpin ont lieu. Et, en 1936, le ski alpin devient une compétition officielle lors des Jeux olympiques de Garmisch-Partenkirchen. Il n’est, à n’en pas douter, une figure du développement du ski.

Sir Arnold Lunn a fait reconnaître le ski alpin comme le sport. [KEYSTONE - STR]
Sir Arnold Lunn a fait reconnaître le ski alpin comme un sport. [KEYSTONE - STR]

Rudolf Lettner invente les premières carres

L’évolution du ski alpin s’accélère en 1917, au cours d’une simple sortie à skis en Autriche. Rudolf Lettner s’en va, comme à son habitude, dévaler les pentes autrichiennes. Mais, sur une piste verglacée, ses skis n’accrochent pas. Il ne doit son salut qu'à ses bâtons qu'il utilise pour freiner. De cette frayeur, l’Autrichien cherche la solution qui permettrait aux skis de mieux crocher.

Et, après neuf ans de recherche, il trouve! Il a l'idée de visser de courtes parties d’acier sur le flanc du ski. Cette invention, qui se révèle non seulement efficace mais qui engendre également une vitesse supérieure aux anciens modèles, provoque d’abord l’ire des professionnels. Néanmoins, dès 1930, tous révisent leur jugement et l’entier des compétiteurs adoptent cette nouvelle technologie. C'est le début des carres.

On n'arrête pas le progrès après la Seconde Guerre mondiale

L'évolution des skis prend un tournant dès les années cinquante et soixante. Alors qu’Abel Rossignol, au cours de la Seconde Guerre mondiale, invente les skis contrecollés en lamelles et non plus en bois massif, des alliages d’aluminium font leur apparition. Cette innovation permet une meilleure rigidité et un ski au contraire de celui en bois massif qui ne se déforme plus. On assiste également à l'apparition d'une pléthore de nouveaux matériaux.

Que ce soient les plastiques comme le polyéthylène qui permettent une meilleure glisse ou encore les fibres de verre qui augmentent la durée de vie du ski. S'ensuivent l'addition d'autres polymères plus résistants à l'abrasion, l'ajout de fibres de carbone et de kevlar qui accroissent la solidité du ski. En somme, c'est à cette période que le ski fait un bond en avant en matière de technologie. Plus résistant, plus maniable, le ski entre dans une nouvelle dimension.

Par la suite, et aussi étonnant que cela puisse paraître, il n'y a pas eu de véritable révolution si ce n'est une amélioration constante des matériaux utilisés et l'avènement du carving dans les années 1990. Ce nouveau procédé permet de tailler des courbes qui semblaient impossibles jusque-là.

Pratiquement deux siècles d'histoire, deux cent ans pour passer de simples lamelles en bois aux skis que nous connaissons aujourd'hui. [Imago - Depositphoto]
Pratiquement deux siècles d'histoire, deux cent ans pour passer de simples lamelles en bois aux skis que nous connaissons aujourd'hui. [Imago - Depositphoto]

Chapitre 2
Sous l'oeil de Laurent Donzé

Floriane Galaud

Fondateur et conservateur du Musée du ski situé au Boéchet dans le Jura, Laurent Donzé a amassé au fil des années une impressionnante collection d'objets retraçant l'histoire du ski alpin. Avec la passion qui le caractérise, le Jurassien retrace pour nous l'évolution des skis.

>> Sous l'oeil de Laurent Donzé, l'évolution des skis :

Sous l'oeil de Laurent Donz: l'évolution des skis
Ski alpin - Publié hier à 21:26

Chapitre 3
Paroles d'ex: Jean-Daniel Dätwyler et Roland Collombin

Imago

Jean-Daniel Dätwyler et Roland-Collombin ont tous deux contribué à écrire l'histoire du ski suisse. Né à Villars-sur-Ollon le 2 avril 1945, Dätwyler a débuté sa carrière en Coupe du monde en 1967 lors des épreuves de vitesse de Wengen. Le Vaudois a très rapidement connu le succès en remportant les descentes de Val Gardena en 1969 et de Megève en 1971. En 1968, le Villardou décroche une superbe médaille de bronze aux Jeux olympiques de Grenoble. Dätwyler raccroche ses skis de compétition en 1972.

Et que dire de Roland Collombin? Le Bagnard, né en 1945, a connu un succès fulgurant: huit victoires dont quatre la seule année 1974 à Garmisch, Avoriaz, Wengen et Kitzbühel. Sans oublier sa médaille d'argent acquise lors des Jeux olympiques de Sapporo en 1972.

>> Paroles d'ex: l'évolution des skis :

Paroles d'ex: l'évolution des skis
Ski alpin - Publié hier à 21:27

Dätwyler et Collombin avaient chacun une paire fétiche. Une paire Rossignol pour le Vaudois utilisée durant trois saisons.

Une paire également de la marque Rossignol pour Collombin: les fameux skis "miracles" qui lui ont permis de décrocher la médaille d'argent aux Jeux olympiques de Sapporo en 1972. Fabriquée à Stans dans la canton de Nidwald, la paire estampillée "Equipe de Suisse" a offert au pays de nombreux succès. Sa particularité? Deux boudins vides entourés de mousse afin qu'ils tiennent ensemble. La série fabriquée pour les JO 1972 s'est avérée exceptionnelle, mais en raison de son caractère aléatoire, ce concept a été abandonné par la suite.

>> Paroles d'ex: leurs skis fétiches :

Paroles d'ex: leurs skis fétiches
Ski alpin - Publié hier à 21:28

Chapitre 4
La success-story de Stöckli

Depuis quelques années, la marque suisse Stöckli est portée par les succès du prodige nidwaldien Marco Odermatt. Mais avant lui, d'autres skieurs ont contribué à sa renommée comme Tina Maze ou Urs Kälin. Petit retour en arrière sur l'histoire de la firme dont l'évolution a été marquée par l'introduction de nouveaux composants avec Mathieu Fauve, responsable de la recherche et du développement du ski chez Stöckli. "La construction des skis chez Stöckli a débuté en 1935. A l'époque, on fabriquait des skis 100% en bois car c'était le matériau qu'on maîtrisait bien. On donnait déjà au ski une forme de spatule mais il n'y avait qu'un seul matériau qui le composait".

>> L'évolution des skis Stöckli :

L'évolution des skis Stöckli
Ski alpin - Publié hier à 21:29

Au fil des années, l'arrivée de nouveaux matériaux donne un nouvel élan. Le bois n'est plus le seul composant. L'aluminium, les polymères et les fibres entrent en jeu et n'ont qu'un seul objectif: optimiser les performances.

L'arrivée en Coupe du monde en 1994 est un tournant pour la firme helvétique qui, dès sa première saison sur le Cirque Blanc, marque les esprits grâce notamment à Urs Kälin, premier Suisse à skier sur Stöckli et devenu vice-champion olympique à Lillehammer la même année. "On a pu montrer que l'on savait fabriquer des skis", rigole Mathieu Fauve. Mais surtout, l'avènement de l'entreprise suisse au plus haut niveau a permis de développer de nouvelles technologies.

>> La success-story Stöckli :

La success-story Stöckli
Ski alpin - Publié hier à 21:30

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Bormio (ITA), Super-G messieurs: Marco Odermatt (SUI) quitte la piste du Stelvio sans podium
Ski alpin - Publié le 29 décembre 2024

Chapitre 5
Les fixations: d'une simple attache à la fix' intelligente

Imago - Jürgen Wiesler

Au 19e siècle, les fixations consistaient en une simple attache faite de cuir. Seul l'avant du pied était maintenu laissant le talon libre. En 1896, une première innovation est apportée afin de stabiliser les bottes: les lanières métalliques.

Simples et rudimentaires, ces fixations tiendront du milieu du dix-neuvième siècle aux années 1930. [Imago - NTB]
Simples et rudimentaires, ces fixations tiendront du milieu du dix-neuvième siècle aux années 1930. [Imago - NTB]

Mais c'est dans les années 1930 qu'on effectue une vraie révolution. En effet, finie l'attache en cuir, le câble entre en jeu. Mise au point par la manufacture horlogère suisse Reuge, cette nouvelle fixation retient plus efficacement le talon du skieur et lui permet de réaliser de meilleures performances.

L'apparition dans les années 1930 du câble est une véritable avancée technologique. [Imago - Christa Eder]
L'apparition dans les années 1930 du câble est une véritable avancée technologique. [Imago - Christa Eder]

Par la suite, on pousse l'innovation jusqu'à intégrer des lanières entre le ski et la cheville. Cette nouveauté n'est cependant pas sans conséquence. En effet, les blessures se multiplient en raison de la rigidité renforcée de la fixation. C'est ainsi que pour remédier à ce problème, des recherches sont menées. La sécurité devient alors centrale.

Et c'est en 1957 que la butée avant à dégagement latéral du pied voit le jour grâce à Jean Beyl, fondateur de Look. Ces butées, sont munies d'une bille, qui lors d'un choc s'échappe de son emplacement afin de permettre à la chaussure de se désolidariser du ski. Le système sera encore amélioré en 1960 avec l'introduction des talonnières.

Look révolutionne les fixations des skis en permettant un déchaussage qui réduit grandement les blessures. [Imago]
Look révolutionne les fixations des skis en permettant un déchaussage qui réduit grandement les blessures. [Imago]

Puis, à partir des années 1980, le métal va progressivement disparaître au profit d'autres matériaux, qui permettent aux skis de non seulement gagner en vitesse mais également d'être plus résistants. On voit ainsi apparaître des polyamides, des plastiques, des carbones ou encore des fibres de verre.

Avec l'ajout de nombreux matériaux et la disparition progressive du métal, les fixations des skis n'ont pas cessé de sensiblement s'améliorer depuis les années 1980. [Imago]
Avec l'ajout de nombreux matériaux et la disparition progressive du métal, les fixations des skis n'ont pas cessé de sensiblement s'améliorer depuis les années 1980. [Imago]

Concomitamment, les déclenchements continuent de s'affiner pour arriver, au début des années 1990, à ce que nous connaissons aujourd'hui. La fixation, qui joue un rôle majeur dans la performance à tel point que la moindre pression change le comportement du ski et qu'on parle d'ajustements au millimètre, a-t-elle encore des possibilités d'évoluer? Il se murmure qu'une fixation intelligente serait en cours d'élaboration pour encore accroître la sécurité des skieurs. Le système? Une technologie qui permettrait à la fixation de savoir quand se déclipser.

Chapitre 6
Les fixations, c'est quoi?

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La fixation de ski a une fonction antinomique. C'est à dire qu'elle doit à la fois maintenir le pied et dans le même temps pouvoir libérer celui-ci en cas de chute. Pour arriver à un produit sûr, la fixation a connu plusieurs évolutions. Responsable Gamme Fixations, chez Salomon, François Lefebvre présente plusieurs fixations, de la plus ancienne, conçue avec l'expertise de l'ancien champion Emile Allais, à la plus récente.

>> Les fixations, c'est quoi? :

Les fixations, c'est quoi?
Ski alpin - Publié aujourd'hui à 13:18

Des tests stricts

La sécurité étant centrale aujourd'hui, Salomon effectue une multitude de tests sur ses fixations, notamment leur résistance aux chocs et leur comportement à basse température. Nous avons pu assister à une démonstration de deux tests au sein de la firme française à Epagny, non loin d'Annecy. Voyez plutôt.

>> On a testé les fixations :

On a testé les fixations
Ski alpin - Publié hier à 21:33