"Si j'avais dit il y a 2 ans que mon rêve était de gagner aux Jeux olympiques, tout le monde se serait moqué de moi"
Quasiment inconnu il y a 18 mois, Marcell Jacobs avait remporté aux Jeux de Tokyo 2 des titres les plus prestigieux: le 100m et le relais 4x100m. Il a complété cette moisson dorée en mars à Belgrade avec le sacre sur 60m aux Mondiaux en salle. Puis, coup d'arrêt forcé. Victime d'un virus contracté au Kenya puis d'une élongation à une cuisse en mai, Jacobs n'a pu reprendre l'entraînement que cette semaine à un mois des Mondiaux de Eugene (15-24.07) et à 2 des Européens de Munich (15-21.08). Il pourrait être en lice à Stockholm, étape de la Ligue de diamant, le 30 juin.
Nos collègues de RSI ont rencontré début juin le sprinter italien, né il y a 27 ans au Texas d'un père américain avant de grandir chez sa mère italienne sur les rives du Lac de Garde. L'occasion de revenir sur ce titre olympique décroché le 1er août 2021 dans la capitale japonaise. "Quand j'étais enfant, j'espérais réussir dans le saut en longueur. Mais en raison de quelques problèmes, je suis passé à la vitesse. Finalement, c'est une bonne chose parce que sinon je ne serais peut-être pas arrivé là où je suis aujourd'hui. Ce 1er août est vraiment une date importante, mais pour moi c'est un point de départ. Je veux ajouter d'autres réalisations importantes".
Quand on évoque le 100m, on pense inévitablement à la légende Usain Bolt, détenteur depuis 2009 du record du monde de la distance, en 9"58. "J'ai été inspiré par l'histoire d'Usain Bolt. J'ai lu tous ses livres, vu ses documentaires. Il venait d'un endroit pauvre... il devait faire un kilomètre le matin avec des seaux pour aller chercher de l'eau pour la maison... Les résultats qu'il a réussis sur la piste étaient vraiment incroyables..."
Un jour quelqu'un battra le record du monde d'Usain Bolt
Marcell Jacobs avait remporté le 100m olympique à Tokyo en 9"80, soit à plus de 2 dixièmes de la marque détenue par l'éclair jamaïcain. Ce record peut-il tomber? "Un jour quelqu'un le fera, estime Jacobs. Peut-être cette année, peut-être l'année prochaine, peut-être dans 10 ans, mais je pense que c'est possible. Il faut juste trouver comment. Usain Bolt mesure 1m95. Il est énorme. Il avait un don, des compétences et des jambes incroyables, mais il était aussi un être humain. Moi je mesure 10 centimètre de moins. Je dois essayer de trouver le moyen de combler cet écart... Mais je crois que si j'avais dit il y a 2 ans que mon rêve était de gagner aux Jeux olympiques, tout le monde se serait moqué de moi. Et pourtant je l'ai fait. Donc, je crois que rêver c'est légitime. Il faut continuer à le faire".
Depuis ces 2 titres olympiques, qu'il le veuille ou non, la vie de Jacobs a inévitablement changé. "Je me considère comme une personne comme tout le monde, sauf que j'ai gagné aux Jeux olympiques. Je vis bien cette célébrité. Ce qui me plaît le plus, ce n'est pas le fait que les gens m'arrêtent dans la rue pour me demander une photo ou un autographe. Mais le fait que lorsqu'ils m'arrêtent, ils me disent 'Merci, merci pour les émotions que tu nous as fait vivre, merci parce que ça fait 20 ans que je n'ai pas pleuré, merci parce que tu nous as fait passer un été incroyable'. Ce sont ces paroles qui me rendent heureux et qui me font prendre conscience de la portée de cette victoire..." .
Debora Carpani (RSI), Steve Roth, texte: Miguel Bao