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Annecy, Munich ou Pyeongchang? Verdict vers 17h00

Rogge [Schalk Van Zuydam]
Le Belge Jacques Rogge, le président du CIO, ne votera pas, fidèle à son habitude. - [Schalk Van Zuydam]
Les JO d'hiver 2018 se dérouleront-ils à un jet de pierre de la Suisse? La ville haute-savoyarde d'Annecy semble avoir de bonnes chances d'emporter la mise, face à Munich et Pyeongchang. Le CIO se décidera mercredi vers 17h.

Le CIO élit mercredi à Durban (Afrique du Sud) la ville hôte des JO d'hiver 2018 entre Annecy, cité de tradition alpine séculaire, Munich, métropole au savoir-faire incontesté en matière d'événements sportifs, et Pyeongchang, aménagée par la Corée du Sud dans l'unique but de décrocher les Jeux olympiques.

Comme de coutume ces dernières années, c'est donc à un choix politique, voire philosophique, que sont invités les quelque 100 membres du CIO habilités à voter. Techniquement, en effet, ce ne sont que des broutilles qui séparent les trois projets, tous excellents, mais tous imparfaits.

"Les trois villes sont capables d'organiser de très bons Jeux", avait ainsi, en rendant son rapport, précisé Gunilla Lindberg, présidente de la commission d'évaluation qui les a auditées et classées dans un mouchoir. Ce ne fut pas toujours le cas par le passé.

L'ex-championne de patinage artistique Katarina Witt soutient la candidature allemande. [KEYSTONE - Schalk van Zuydam]
L'ex-championne de patinage artistique Katarina Witt soutient la candidature allemande. [KEYSTONE - Schalk van Zuydam]

Jacques Rogge, président du CIO qui a choisi, fidèle à son habitude, de ne pas voter, évoque lui "la confiance" qu'ont su faire naître ou pas chez les électeurs les porteurs du projet et qui fera selon lui la différence. De ce point de vue, Munich et Pyeongchang, forts de leurs partenaires économiques puissants, ont un avantage sur Annecy qui s'est longtemps débattue avec des problèmes de gouvernance et de moyens financiers.

La tradition parle pour Annecy

Mais après Sotchi 2014, théâtre olympique bâti de toutes pièces sur les bords de la mer Noire à partir d'une station balnéaire et dont le concept n'est pas sans évoquer Pyeongchang, après Vancouver 2010, pôle urbain de Jeux éclatés qui rappellent ceux proposés par Munich, les membres du CIO pourraient se montrer sensibles aux arguments d'Annecy.

Celle-ci, ville moyenne, de montagne, ultra-légitime quant à sa tradition et ses infrastructures, hôte via Chamonix des premiers JO d'hiver en 1924, ne laissera pas insensibles ceux qui se souviennent des magnifiques Jeux de Lillehammer, en 1994. Les voies du CIO étant impénétrables, et le réflexe des membres encore indécis imprévisible, les Jeux peuvent paraître ouverts.

Pour la Corée du Sud, c'est Yu-Na Kim, aussi championne de patinage artistique, qui s'y colle pour jouer les ambassadrices. [KEYSTONE - Schalk van Zuydam]
Pour la Corée du Sud, c'est Yu-Na Kim, aussi championne de patinage artistique, qui s'y colle pour jouer les ambassadrices. [KEYSTONE - Schalk van Zuydam]

Pyeongchang compte sur son statut d'ultra-favorite récidiviste et sur la perspective d'ouvrir pour le CIO et les sports d'hiver de "nouveaux horizons" en Asie du sud-est comme le promet son slogan, Munich sur ses appuis financiers qui lui permettent, depuis les JO d'été de 1972, d'être l'une des capitales mondiales du sport et Annecy sur ce vote de sympathie qui n'est point une légende au CIO et pourrait causer une surprise au premier tour.

Beaucoup d'indécis au CIO

Les Jeux d'hiver, c'est une certitude, recèlent moins d'enjeux et déchaînent moins de passion que ceux d'été, et les membres du CIO à arriver à Durban sans idée arrêtée sont assurément nombreux. A ce titre, les présentations qui auront lieu mercredi matin seront déterminantes, tout comme les dernières actions de lobbying des candidats et de leurs soutiens politiques qui se jouent entre lundi et mercredi.

François Fillon, Premier ministre, et Chantal Jouanno, ministre des Sports pour la France, Christian Wulff le président fédéral et les politiciens bavarois pour l'Allemagne, Lee Myung-bak, le chef de l'Etat coréen et sa batterie de chefs d'entreprise (Samsung, Korean Air) se plieront ainsi à la tradition des jeux de couloir jusqu'aux ultimes instants. Passage obligé pour récupérer la flamme, quatre ans après Sotchi.

Les villes candidates sous la loupe

MUNICH

Atouts: le savoir-faire allemand n'est plus à démontrer. Chaque hiver, des centaines de compétitions de sports d'hiver sont organisées en Bavière où se sont tenus avec succès les Mondiaux de ski alpin et de bobsleigh en 2011. L'existence de la plupart des installations sportives (80%) et des infrastructures routières et hôtelières, ce qui allège considérablement le budget. La puissance du réseau allemand en terme de lobbying et la puissance économique de ses sponsors nationaux qui représentent 50% des partenaires des fédérations de sports d'hiver.

Handicaps: la règle non écrite de l'alternance des continents qui voudrait qu'après Sotchi (2014) les JO d'hiver ne soient pas tenus en Europe. Faiblesse qui vaut également pour la candidature d'Annecy.

ANNECY

Atouts: l'environnement, qui attire chaque saison 7 millions de touristes avec le Mont Blanc en toile de fond et fait dire avec justesse aux partisans de la candidature qu'Annecy est la seule à proposer des Jeux au coeur des montagnes. L'originalité des deux pôles qui mixent neige et glace. La pertinence du système de transports existant et des investissements à venir qui privilégient les voies ferroviaires. L'expérience en matière d'événements internationaux, notamment les Coupes du monde de ski, nordique ou alpin. L'utilisation d'équipements existants qui limite les coûts et l'impact sur l'environnement.

Handicaps: une naissance catastrophique pour la candidature, repêchée in extremis par le CIO en juin 2010, suivie de problèmes de gouvernance qui ne se sont apaisés qu'en janvier dernier avec la reprise en mains par Charles Beigbeder et le ministère français des sports. Le retard considérable pris en terme de relations publiques, sur le terrain national, comme le prouve le faible soutien local, mais surtout international et diplomatique.

PYEONGCHANG

Atouts: la qualité du dossier technique de Pyeongchang n'est plus à démontrer. Apprécié par la commission d'évaluation pour les JO 2010 (décernés à Vancouver), il fut le mieux noté pour l'attribution des JO 2014, finalement attribués à Sotchi, et n'a connu que quelques changements depuis. Le budget de campagne estimé à plus de 100 millions d'euros est révélateur de la puissance de la candidature soutenue par de grandes entreprises nationales, l'ensemble de la classe politique et de la population. La règle non écrite de l'alternance des continents qui voudrait qu'après deux éditions en Europe (Turin 2006, Sotchi 2014), deux en Amérique du Nord (Salt Lake City 2002, Vancouver 2010), les JO d'hiver retournent en Asie pour la première fois depuis 1998 et Nagano.

Handicaps: les aléas climatiques de la région, déjà stigmatisés par les Jeux olympiques de Nagano (Japon) en 1998 et les problèmes organisationnels rencontrés lors des différentes épreuves de ski alpin, de fond ou de biathlon organisées en Corée et souvent critiquées par les athlètes participants. La gestion de la candidature par la classe politique et les milieux économiques. L'insécurité que font peser sur le climat politique et militaire les tensions récurrentes avec la Corée du Nord.

afp/tai

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JO 2018: vote, mode d'emploi

08h45: Présentation de Munich suivie d'un question-réponse avec les membres du CIO (70 minutes).

10h25: Présentation d'Annecy suivie d'un question-réponse avec les membres du CIO (70').

12h05: Présentation de Pyeongchang suivie d'un question-réponse avec les membres du CIO (70').

14h45: Présentation du rapport de la commission d'évaluation par sa présidente Gunila Lindberg.

15h35: Réunion plénière des membres du CIO et vote.

17h00: Annonce de la ville hôte des JO 2018.


LES ELECTEURS: les électeurs de la ville hôte des Jeux olympiques sont les membres du CIO (110 à ce jour) à l'exception du président, Jacques Rogge, qui choisit de ne pas voter, et des ressortissants de pays qui présentent une candidature.

En l'occurrence, il s'agira, au premier tour, de Thomas Bach et Claudia Bokel (Allemagne), Kun-Hee Lee et Dae-Sung Moon (Corée du sud), Guy Drut et Jean-Claude Killy (France).

Les ressortissants des pays dont la ville est éliminée au premier tour sont habilités à voter au deuxième. Si tous sont présents, 96 membres voteront donc au premier tour, mercredi à Durban. Le CIO n'était pas lundi en mesure de préciser le nombre et l'identité des membres absents.

De son côté, le Neuchâtelois Denis Oswald a annoncé son intention de s'abstenir. Motif: "sa" fédération internationale d'aviron est liée à Samsung, l'un des principaux soutiens économiques de la candidature de Pyeongchang.


LA PROCEDURE: le vote a lieu à huis clos et à bulletins secrets, grâce à des boîtiers électroniques. A chaque tour, un électeur ne peut se prononcer que pour une seule ville. Si, après le premier tour, aucune ville n'obtient la majorité absolue - les votes blancs ou nuls ne sont pas pris en compte dans le calcul -, celle qui recueille le plus faible nombre de voix est éliminée et on procède à un second tour avec les deux candidates rescapées.

Seul le nom de la ville éliminée est rendu public. Il est donc impossible de savoir en temps réel quelle ville a obtenu la majorité lors du premier tour. Au second tour, la ville qui obtient la majorité simple est élue.


LE RESULTAT: plus d'une heure après le vote, le nom de la ville hôte est annoncé par le président du CIO, qui a pu auparavant décider de voter en cas d'égalité au second tour. Les résultats obtenus lors de chaque tour sont alors rendus publics.