Comme depuis cinq ans, son «Chusovitina» est posé à la perfection. Mais sur son second saut, le «Yurchenko», Giulia Steingruber manque la réception et fait un pas de côté de la ligne. La grande favorite du concours doit attendre le passage de la 8e gymnaste, Elissa Downie. La Britannique, seconde des qualifications, met la pression sur la Suissesse avec deux bons essais.
Les 14.983 points de la Saint-Galloise vont-ils suffire? Le total est inférieur à celui obtenu en qualifications et aux Européens 2015 à Montpellier. Le suspense est entier. Les 6500 spectateurs de la BernArena retiennent leur souffle. Puis c’est la libération du tableau d’affichage. Le score de la jeune Britannique de 16 ans: 14.933. Steingruber décroche, dans l'euphorie générale, son 3e titre européen sur son engin de prédilection. Elle reprend la couronne que lui avait «volé» à Montpellier la Russe Maria Paseka, absente cette année.
Giulia Steingruber: "Je vais le réaliser quand j'aurai une minute de libre"
«C’était tellement serré. J’étais presque plus nerveuse pour l’attente que pour mes deux essais. Elissa Downie a fait deux excellents sauts et j’ai vraiment commencé à trembler», avoue fatiguée mais heureuse celle qui compte désormais 5 médailles européennes au saut. Le souvenir de sa chute lors du second essai aux Mondiaux de Glasgow en novembre passé est encore présent. «J’avais été trop rapide en Ecosse, alors là j’y suis allé plus tranquille mais parfois les images de ma chute me reviennent.»
Une deuxième médaille était attendue de la Saint-Galloise au sol. La véritable ovation du public pour sa chouchou est à la hauteur de l’exploit du jour. Déjà deux fois «bronzée» (2014 et 2015), Giulia Steingruber décroche pour la Suisse la première médaille d’or européenne féminine sur cet engin. Un duel avec l’explosive Claudia Fragapane, en tête après les qualifications, était attendu. Mais la Britannique a craqué (4e). Et c’est une nouvelle fois sur Elissa Downie que la Suissesse a dû attendre pour s’assurer ce sacre historique. « Je vais réaliser quand j’aurai une minute de libre. Mais je suis tellement heureuse d’avoir pu gagner ce titre devant mon public. Ça le rend encore plus spécial. Moi qui ne montre pas trop mes émotions, j’avais la chair de poule et j’ai presque lâché une larme sur le podium ».
Ilaria Käslin: "Je n'avais rien à perdre"
Giulia Steingruber a parfaitement répondu aux objectifs fixés par la fédération et de son chef du sport d’élite Felix Stingelin. «Le bilan est très positif avec des performances exceptionnelles et pas seulement de Giulia Steingruber, mais de toute l’équipe et notamment d’Ilaria Käslin». L’étoile montante Käslin aurait bien pu créer la véritable sensation de cette dernière journée de compétition pour sa première finale internationale. «Je n’ai pas regardé ce que les autres ont fait. Je me suis concentrée sur ma prestation. J’étais plus nerveuse hier avec l'équipe, là ça ne dépendait que de moi. Donc j’étais plus tranquille, je n’avais rien à perdre ». Au final, une quatrième place, tout proche du podium. Au contact de son modèle Steingruber, la jeune Tessinoise (18 ans) apprend beaucoup et une médaille européenne lui semble promise prochainement.
Même si tout n’a pas été parfait, la répétition générale en vue des Jeux de Rio a été couronnée de succès pour Giulia Steingruber. La gymnaste de Gossau a présenté son exercice olympique au sol qui «pourrait suffire pour une médaille à Rio» selon son coach Zoltan Jordanov. Mais c’est au saut que la Suissesse nourrit sa véritable ambition olympique. Pas encore prêt, son nouvel enchaînement n’a pas été présenté à Berne. « Ce serait bien de le montrer en compétition avant les Jeux mais je ne peux pas encore dire quand » répond hésitante sur la question la Saint-Galloise. Avec désormais neuf médailles européennes à son palmarès, l'icône de la gymnastique helvétique est consciente qu’une médaille olympique donnerait une nouvelle dimension à sa brillante carrière.
Berne, Sylvain Bolt - Twitter @SylvainBolt