Le temps s'accélère pour Lance Armstrong. L'Américain est rentré
au Texas et est désormais contraint d'engager un incertain
contre-la-montre s'il veut redevenir compétitif pour ses grands
rendez-vous, Giro et Tour de France, après sa chute au Tour de
Castille et Leon. Mardi matin, le Texan a pris l'avion à Madrid
pour rentrer chez lui. C'est un homme diminué (fracture de la
clavicule), le bras droit en écharpe mais tentant de sourire, qui a
donné de ses nouvelles par sa messagerie habituelle.
La veille au soir, à sa sortie de l'hôpital, Armstrong avait
partagé un dîner avec Johan Bruyneel, le manager de l'équipe
Astana, qui vit dans la capitale espagnole. En dérogeant à ses
habitudes alimentaires. Un verre de vin, du fromage et des
crackers. C'est bien le moins que le septuple vainqueur du Tour
pouvait prendre pour se consoler d'une journée noire qui contrarie
au plus haut degré ses prévisions.
Dans l'incertitude, il doit attendre les prochains jours avant d'y
voir plus clair. Le Texan l'a dit, il envisage une intervention
chirurgicale dans les deux-trois jours bien que la fracture soit
nette, sans complications, selon les précisions fournies par son
équipe. En toute logique, il pourrait dès lors s'entraîner sur
rouleaux dans un délai de quinze jours avant d'effectuer des
sorties à vélo.
Faute d'avoir vu les radiographies, les spécialistes se hasardent
à donner seulement des indications. «S'il faut opérer, c'est un
mois et demi», estime le Dr Jean-Marie Lagarde, médecin de
l'équipe de France. «Sans intervention, c'est trois
semaines».
L'hypothèse extrême
La position de la fracture importe. «Si c'est cassé près de
l'articulation, c'est plus long», explique le Dr Lagarde. En
revanche, l'âge ne représente pas un handicap dans le cas
d'Armstrong (37 ans) pour la durée du rétablissement. Pour
l'Américain, le problème tient à sa situation particulière, celle
d'un coureur qui renoue avec le haut niveau après plus de trois ans
d'absence du peloton. Avec toutes sortes de conséquences sur sa
condition physique, son comportement en course au milieu du peloton
et sa détermination.
Physiquement, le coup d'arrêt provoqué par la blessure compromet
son retour vers une condition de pointe à l'horizon du mois de mai.
Or, Armstrong, qui était apparu en retrait par rapport aux
meilleurs au Tour de Californie en février puis à Milan-Sanremo
samedi dernier, doit impérativement progresser pour jouer les
premiers rôles. Autant dire que ce coup d'arrêt l'éloigne du
maillot rose du Giro du centenaire dont le départ sera donné le 9
mai. Peut-il l'inciter à revoir son programme?
S'il renonce au Tour d'Italie, une épreuve qui a pour avantage de
durer trois semaines et de permettre une montée en puissance,
l'Américain dispose de peu d'options (Critérium du Dauphiné Libéré
ou Tour de Suisse) avant le Tour. A moins, hypothèse extrême, qu'il
décide d'arrêter les frais et de raccrocher pour de bon son vélo.
Chaque coureur réagit différemment, physiquement et mentalement,
soulignent toutefois les médecins. Encore plus pour Armstrong, qui
peut être accablé par ce coup du sort ou, au contraire, encore plus
motivé pour retourner la situation. Pour l'heure, l'Américain s'en
tient à un constat, non sans humour: «C'est dur de
twitter-taper de la main gauche».
agences/tai
Bruyneel: "le Giro, c'est encore possible"
Pour le manageur d'Astana Johan Bruyneel, la fracture à la clavicule droite dont souffre Lance Armstrong depuis lundi ne l'exclut pas totalement du Giro, avec certes un objectif à la baisse, et ne "change rien" pour le Tour de France.
Comment a réagi Lance Armstrong lundi soir et mardi matin?
JOHAN BRUYNEEL: Il était très déçu naturellement, je pense que c'est une réaction logique quand on travaille depuis longtemps, que ça va bien, de mieux en mieux. On fait des plans pour arriver à certains objectifs, et puis bon, tout d'un coup, à cause d'une chute, tout change. Il était assez démoralisé. Je pense que chaque cycliste qui a eu un accident, une fracture ou n'importe quel contre-temps a cette réaction. Après réflexion et une fois qu'il arrivera en Amérique, ça va aller mieux.
C'est sûr que c'est pas une bonne chose mais vu les circonstances, il est tombé assez fort la tête par terre et le casque était cassé... une fracture de clavicule c'est encore un bon résultat! C'est quand même une des fractures qui prend le moins de temps pour récupérer. On essaye d'être optimiste. On va décider maintenant dans les prochains jours s'il y a une opération ou pas. Après ça on verra bien le temps de récupération.
Est-ce que cela change quelque chose pour son calendrier?
JOHAN BRUYNEEL: Je pense que pour l'instant ce ne serait pas très intelligent de commencer à changer tout le calendrier, on va voir. Personnellement je pense que c'est encore possible d'être au départ du Giro. Si c'est possible c'est normal que ce soit dans une autre optique parce qu'il va quand même perdre un peu de condition physique. Pour l'instant, on reste un peu avec le même programme. Il allait partir en Amérique après cette course ici et puis revenir pour le Giro, donc pour l'instant il n'y a rien qui change.
Une clavicule cassée au mois de mars ne compromet rien pour le Tour de France. Dans le cas de Lance, je pense que c'est pareil. Pour le Tour de France, ça ne change rien. Ca change dans la manière dont on va aborder la saison d'ici au Tour de France. Pour être au départ du Tour ça ne change rien du tout.
Ce n'est en tout cas pas la fin de la carrière de Lance Armstrong?
JOHAN BRUYNEEL: J'ai entendu des rumeurs comme ça ici en Espagne et en France. J'étais avec lui lundi soir. Il a passé la nuit chez moi. A aucun moment ça ne lui est passé par la tête. Je pense qu'il a déjà fait face à des choses plus difficiles que ça. Une clavicule cassée, certes c'est pas agréable, mais ce n'est pas la fin du monde.
afp