La direction du Tour de France a annoncé son intention de
reconstruire l'épreuve sur des bases nouvelles en 2008, en
s'émancipant partiellement du pouvoir sportif et de l'UCI pour
lutter contre le dopage. Voici les cartes qu'ASO (Amaury Sport
Organisation), la société organisatrice, possède dans son jeu. Les
unes sont des atouts, comme le soutien du public et des
parraineurs, d'autres sont de mauvaises cartes dont il faudra se
débarrasser pour réussir.
LES ATOUTS POUR LE RENOUVEAU :
Le soutien inconditionnel du public
Malgré les tricheurs, malgré les doutes, le Tour de France
continue à drainer des foules impressionnantes chaque jour sur son
passage. Le public, cette année, a explicitement soutenu les
organisateurs dans leur lutte contre le dopage et félicité les
coureurs considérés comme "propres", même lorsqu'ils étaient dans
les profondeurs du classement.
La rentabilité
Cet engouement impressionnant intéresse évidemment les
sponsors,
et permet au Tour de n'avoir pas de souci financier dans
l'immédiat. D'autant que les audiences télé, même si elles sont en
baisse, restent à des niveaux élevés. Les partenaires majeurs de
l'événement (LCL, Aquarel, Champion, etc.), associés à ASO, n'ont
constaté aucune réaction de rejet du public lié aux affaires de
dopage.
"Tant que le public est là et que les audiences télé sont bonnes,
nous n'avons aucune raison de quitter le Tour", déclarait un
responsable marketing d'une grande marque au plus fort de l'affaire
Rasmussen, à Pau.
Une direction déterminée
Christian Prudhomme, directeur du Tour, et Patrice Clerc,
président d'ASO, ont démontré une détermination sans faille à
lutter contre le dopage. Contrairement à ce qui était arrivé à
d'autres périodes troublées du Tour, la direction n'a jamais été
mise en accusation cette année. Leur volonté de relancer le Tour
2008 sur des bases nouvelles semble, pour l'instant, faire
l'unanimité en France.
LES OBSTACLES A SURMONTER :
La perte de crédibilité sportive
Depuis 1996, tous les vainqueurs du Tour
ont été soit convaincus soit soupçonnés de dopage. Cette année
encore, la valeur sportive de la victoire d'Alberto Contador est
contestable, ne serait-ce que parce que le déroulement de la course
a été fortement influencé par la stratégie de Michael Rasmussen,
finalement évincé. La télévision allemande a interrompu sa
retransmission au premier cas de dopage, estimant que course
n'était plus crédible.
La désaffection du grand public
Le Tour est devenu une immense parade, mais le public ne se
passionne pas pour la course et les champions ne le font plus rêver
depuis longtemps. Derrière les haies de spectateurs qui viennent
encourager les coureurs, la France se lasse. Un sondage paru
dimanche dans le quotidien l'Equipe démontre une baisse régulière
de l'intérêt du grand public pour le Tour, notamment des
jeunes.
Pas de danger à court terme, mais les patrons du Tour pensent
qu'il
faudrait rendre un intérêt sportif à l'épreuve pour inverser la
tendance.
La rivalité entre ASO et l'UCI
La guerre ouverte entre les organisateurs du Tour et l'Union
cycliste internationale (UCI) menace l'épreuve. Patrice Clerc a
plusieurs fois dénoncé une "volonté de nuire" de l'UCI. ASO
souhaiterait pouvoir choisir elle-même les équipes invitées sur le
Tour, quitte à écarter certains des meilleurs coureurs du monde.
Bras de fer en perspective cet automne.
Les rivalités au sein du peloton
Les équipes professionnelles ne sont pas toutes sur la même
longueur d'onde lorsqu'il s'agit de lutte contre le dopage. Six
équipes françaises et deux allemandes ont fondé un "Mouvement pour
un cyclisme crédible". Les 13 autres formations du Tour n'ont pas
encore suivi. Toutes seront-elles au départ le 5 juillet 2008 à
Brest? Cette interrogation et est encore loin d'être levée et les
travaux de rénovation devront rapidement débuter pour tenter de
retrouver la voie de la crédibilité.
Avec Si/jbf
La presse allemande est chiffonnée par ce Tour
L'Espagnol Alberto Contador, vainqueur de la 94e édition du Tour de France dimanche, est pour la presse allemande le symbole d'un cyclisme "à jeter à la poubelle", comme le titre le quotidien populaire Bild, soulagé que "ce Tour de farce soit enfin terminé".
Chiffonnée, déchirée, telle est la photo du triomphe de Contador sur les Champs Elysées qui a été choisie par Bild pour illustrer la victoire de l'Espagnol. Le quotidien à plus grand tirage d'Allemagne s'interroge: "Quelle est la valeur de ce maillot jaune ?" et donne sa réponse en publiant les photos de tous les maillots jaunes, convaincus ou soupçonnés de dopage, de Contador à Jan Ullrich, de Bjarne Riis à Pedro Delgado. "Il ne peut y avoir un autre Tour comme celui-ci", prévient Bild.
"Le Tour de France a le vainqueur qu'il mérite, un coureur espagnol soupçonné d'avoir recours au dopage", renchérit le quotidien Die Welt, en référence à la présence des initiales de Contador dans le dossier de la police espagnole contre le Dr Eufemiano Fuentes. "Le Tour est à bout", poursuit le quotidien berlinois.
Le Frankfurter Rundschau souligne que ce Tour 2007 a posé "beaucoup de questions, sans apporter aucune réponse": "Un an après le succès de Floyd Landis, le Tour a encore un vainqueur qui suscite la suspicion (...) Sinkewitz, Vinokourov, Moreni et Rasmussen sont les acteurs principaux d'un "freakshow" où le mensonge et la tromperie intéressent plus que la performance sportive pure", insiste le quotidien de Francfort.
La presse allemande s'interroge également sur la guerre ouverte entre les organisateurs du Tour de France et l'Union cycliste internationale: sans prendre de partie, elle critique aussi ASO, la maison-mère du Tour de France, qui, regrette le Frankfurter Rundschau, "n'a jamais envisagé d'arrêter ce Tour: ce genre de pensée est pour les idéalistes et les romantiques qui n'ont plus leur place dans le "business" du sport".
La presse espagnole salue le champion de l'espoir
L'Espagnol Alberto Contador, vainqueur dimanche à Paris d'un Tour de France marqué par le dopage, a séduit la presse de son pays.
"Champion de l'espoir", titrait AS lundi à sa Une. "Contador couronné à Paris comme le symbole du nouveau cyclisme", poursuivait le journal sportif.
Le premier quotidien d'Espagne, El Pais, publiait en Une une photo d'Alberto Contador tout sourire sur son vélo avec le drapeau espagnol autour du cou. En titre, des déclarations du jeune coureur: "J'espère que ma victoire va apporter de l'air frais au cyclisme".
"Le regard frais de Contador", titrait plus loin le journal dans ses pages sportives. "Le Madrilène, à seulement 24 ans, remporte le neuvième Tour pour l'Espagne. Le cycliste de Pinto (au sud de Madrid) reconnaît qu'il devra supporter les soupçons qui frappent le cyclisme", poursuivait El Pais. "Un fait sans précédent: six Espagnols terminent dans les dix premiers" (Contador, Carlos Sastre, Haimar Zubeldia, Alejandro Valverde, Mikel Astarloza, Oscar Pereiro), se félicitait également le journal.
"Le triomphe du rêve", assurait El Mundo. "Alberto Contador remporte un Tour de France couvert de scandales. Le cinquième Espagnol vainqueur de la course est à la tête d'un nouveau cyclisme qui a besoin de se défaire des cas permanents de dopage".