Vingt-deux ans après les JO de Calgary, le Canada s'apprête à
recevoir de nouveau la famille olympique d'hiver, du 12 au 28
février à Vancouver et dans les stations alentour, où le seul souci
reste le niveau d'enneigement de certains sites. Les organisateurs
de ces XXIe Jeux d'hiver se disent fin prêts, et espèrent seulement
que le phénomène climatique "El Nino", qui adoucit l'atmosphère,
épargnera la région de Vancouver, située en bordure du Pacifique et
au pied des Rocheuses.
Pour l'heure, c'est sur le site de Cypress Mountain, où se
disputeront les épreuves de ski acrobatique, de ski-cross et de
snowboard, que le manteau neigeux a fondu. Pendant deux semaines,
45 personnes se sont relayées jour et nuit pour déplacer depuis les
sommets du site plus de 300 camions de neige pour recouvrir les
deux parcours, afin d'accueillir les premiers athlètes qui doivent
commencer les entraînements le 5 février.
Le Canada vise la 1ère place au tableau des médailles
Aucun problème en revanche à Whistler, la station des Rocheuses
où se courront les épreuves de ski alpin et de fond: quatre mètres
de neige sont tombés en début d'hiver. Les épreuves de patinage et
de hockey, elles, se dérouleront dans des patinoires en
ville.
Avant même la cérémonie d'ouverture, Vancouver peut déjà se
targuer d'un premier succès: entre 250'000 et 300'000 visiteurs
sont attendus, et une très grande partie des billets ont été
vendus. Sur le plan sportif, le Canada a mis d'énormes moyens dans
la préparation de ses athlètes, et annonce ouvertement son
intention de devenir la première nation au tableau des médailles,
avec un objectif affiché de 35 médailles! L'Allemagne avait terminé
première nation en 2006 avec 29 médailles, contre 22 au Canada,
quatrième.
Bjoerndalen roi des Jeux?
Les hockeyeurs,
vice-champions du monde, mais aussi la skieuse acrobatique Jennifer
Heil, médaillée d'or à Turin en 2006, ou le surfeur Jasey-Jay
Anderson, quadruple champion du monde, sont les Canadiens les plus
attendus. Il s'agira pour eux de faire oublier les cauchemars des
Jeux d'hiver 1988 à Calgary et d'été 1976 à Montréal, où les
athlètes à la feuille d'érable n'avaient remporté aucune médaille
d'or.
Chaque édition des Jeux couronne son roi ou sa reine. Ce pourrait
être en 2010 le biathlète norvégien Ole Einar Bjoerndalen, qui
tentera de battre le record absolu de médailles gagnées lors de
Jeux d'hiver. Personne encore n'a fait mieux que son compatriote
Björn Daehlie, qui a glané 12 médailles en ski de fond entre 1992
et 1998. Bjoerndalen, qui compte déjà cinq médailles d'or, trois
d'argent et une de bronze, aura cinq courses pour rattraper
Daehlie.
Janka également cité pour une razzia de médailles
Un autre Norvégien rêve aussi de devenir étoile en son pays: à
24 ans, le fondeur Petter Northug, qui a dominé la saison, est
désigné comme le grand favori par ses rivaux eux-mêmes. Tout comme
le Suisse Carlo Janka (23 ans) en ski alpin, à qui certains
président déjà quatre médailles, une par discipline. En ski alpin
toujours, le public suivra aussi l'histoire du duo royal Lindsey
Vonn et Maria Riesch. L'Américaine et l'Allemande, grandes amies
dans la vie au point de passer des vacances ensemble, rêvent de se
partager tous les titres olympiques.
Sur le front du dopage, le CIO continue de déployer un arsenal
onéreux et, espère-t-il, dissuasif. Durant la période olympique qui
démarre avec l'ouverture du Village, le CIO prévoit de mener 2000
tests - 1600 tests urinaires et 400 sanguins - soit 2/3 de plus
qu'aux précédents Jeux d'hiver à Turin en 2006.
afp/alt
La cynique histoire de Beckie Scott
La Canadienne Beckie Scott est la seule athlète de l'histoire des Jeux olympiques à avoir obtenu, après des affaires de dopage, le bronze, l'argent et l'or pour la même épreuve. Aujourd'hui membre de l'Agence mondiale antidopage, l'ancienne fondeuse veut s'assurer qu'elle sera bien la dernière.
"Ce qui m'importe le plus est de protéger le droit des athlètes propres à participer à une compétition qui se déroule à armes égales", souligne-t-elle. Car, à Salt Lake City en 2002, la skieuse de l'Alberta ne se faisait guère d'illusion sur les Russes Larissa Lazutina et Olga Danilova, qui avaient écrasé la poursuite et la précédaient sur le podium.
"Je trouvais cela cynique qu'elles courent comme des athlètes propres. L'équipe russe, surtout féminine, avait connu plusieurs cas de contrôles positifs dans les années précédant les Jeux. En voyant la manière dont elles dominaient les courses, c'était difficile de croire qu'elles ne prenaient rien", raconte la première Canadienne médaillée olympique en fond.
Le jour de la clôture des Jeux, alors que la camionnette de l'équipe est prête à rentrer, la fondeuse reçoit un appel: les deux Russes ont été contrôlées positives à une nouvelle EPO. "Je me suis dit, c'est fantastique, je vais avoir l'or, poursuit-elle. Mais j'étais naïve".
Petite cérémonie... deux ans plus tard
L'or, Beckie Scott finira par l'avoir, deux ans plus tard. D'abord à l'automne 2002, c'est une médaille... d'argent qu'elle reçoit. La Fédération internationale de ski (FIS), apprenant qu'une des Russes avait déjà été testée positive avant les Jeux, décide de la rayer du classement. Les médailles sont ainsi réattribuées.
"Le Comité international olympique (CIO) lui ne voulait pas redistribuer les médailles. Trois fondeurs norvégiens étaient aussi concernés par le cas de l'Espagnol Johann Mühlegg qui avait été testé positif. Avec le comité olympique canadien et celui norvégien, nous avons saisi le Tribunal arbitral du sport (TAS)", explique la championne.
Le tribunal leur donne raison en décembre 2003 et en avril suivant, une petite cérémonie protocolaire a lieu à Vancouver pour lui passer l'or autour du cou. "J'espère que cela n'arrivera à personne d'autre", dit Beckie Scott qui, avant cette saga, a vécu d'autres moments dans sa carrière où elle s'est sentie volée. Pour faire avancer les choses, elle est devenue en 2006 l'une des représentantes des athlètes au sein du CIO. "Ironique, n'est-ce pas ?", dit-elle en riant.