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"Les grands clubs européens de foot sont clairement menacés"

Nicolas Bancel: "Je ne vois pas comment il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent".
Nicolas Bancel: "Je ne vois pas comment il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent".
La crise sanitaire liée au Covid-19 aura des conséquences financières très lourdes pour le monde du sport professionnel. Interviewé pour Sport Dimanche, Nicolas Bancel, historien du sport et professeur à l’Université de Lausanne, s’inquiète particulièrement pour les clubs de foot endettés.
Nicolas Bancel (historien du sport): ''Je ne vois pas comment, il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent''
Nicolas Bancel (historien du sport): ''Je ne vois pas comment, il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent'' / RTS Sport / 6 min. / le 4 mai 2020

Rien qu'en Suisse, le sport génère un chiffre d’affaires de près de 22 milliards de francs, soit l’équivalent de 100'000 emplois à temps plein et contribue à environ 2% du PIB. Au niveau mondial, le sport professionnel représente également 2% du PIB. Autant dire que les enjeux de la crise économique liée au Covid-19 sur ce secteur d'activité sont énormes.

Interrogé par Skype pour Sport Dimanche, Nicolas Bancel, professeur d’histoire du sport à l’Université de Lausanne estime que "les conséquences sur l'économie seront très importantes et ce d’autant plus que c’est un secteur, très employeur de main d'œuvre, qui génère des dizaines de milliers d'emplois."

"Je ne vois pas comment il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent"

Pour l’historien, tous les sports sont menacés à tous les niveaux mais plus particulièrement encore les sports qui vivent du sponsoring et du merchandising comme le football ou le hockey ou ceux qui, comme la NBA aux Etats-Unis, dépendent en grande partie des droits TV. "Je ne vois pas comment il n'y aura pas de faillite dans les mois qui viennent. La situation financière des grands clubs internationaux est tendue depuis très longtemps, ils naviguent sur une marre de dette. Les pertes vont se chiffrer en milliards de francs et des clubs comme le Barça, le Real Madrid mais aussi des clubs en Italie ou en Angleterre sont très fragilisés par cette crise et directement menacés."

"Toute crise est porteuse d'une leçon"

Nicolas Bancel rappelle que les matches à huis clos, au début de la pandémie, ont été "boudés par les téléspectateurs." Un match à huis-clos est contraire à l’essence même du sport. "Les spectateurs lors d’un match jouent un rôle tout aussi important que les joueurs. Ils sont là pour vibrer, participent de la passion véhiculée par le sport."

L’historien espère que cette crise permettra une saine remise en question du fonctionnement actuel du sport business. "Toute crise est porteuse d'une leçon. Il faudrait envisager d’obliger les clubs à concevoir des réserves, des fonds propres et à limiter les emprunts. Ca limiterait l’endettement, ça permettrait d’assurer des effectifs plus durables et réduirait aussi la course à l’armement au niveau des salaires les plus élevés. C’est aux instances sportives internationales d’agir. On peut aussi imaginer une aide des Etats aux secteurs sportifs les plus en difficultés. Des aides dirigés directement vers les entreprises et les associations pour faire vivre l'économie réelle du sport."

Isabelle Musy

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