Si aujourd'hui le Servette FCCF est au sommet du football helvétique, il n'en était rien il y a quelques années encore. Pour trouver les premières traces du club, il faut remonter à l'automne 2016. "Avec Loïc Luscher, qui est notre responsable médias actuellement, nous avons eu l'idée de proposer un projet féminin pour le Servette FC. On a discuté avec notre ancien président Didier Fischer, qui a tout de suite vu cela d'un très bon oeil. Il y avait cette volonté de développer les valeurs du Servette FC, c'est-à-dire de donner les mêmes chances aux hommes et aux femmes", explique Richard Feuz, directeur sportif du Servette FCCF.
Des contacts sont alors noués avec le Football Féminin Chênois Genève et le FC Aïre-le-Lignon, qui sont les deux équipes genevoises à évoluer en LNB à ce moment-là. L'idée est de s'approcher d'un club existant plutôt que de créer une équipe de A à Z et de partir du plus bas niveau de championnat. Les discussions débouchent sur une collaboration exclusive avec le FF Chênois Genève.
"Le FF Chênois Genève avait toute cette connaissance et cette expérience du football féminin, mais manquait peut-être de ressources techniques et sportives, analyse Richard Feuz. Je pense qu'ils ont eu l'humilité de se rapprocher d'une autre structure au même titre que le Servette FC, qui a eu l'humilité de dire: 'on ne connaît pas ce milieu' pour créer une synergie des connaissances et pour développer un projet cohérent à Genève."
Afin de maintenir le FF Chênois Genève en LNB, le Servette FC décide de mettre à disposition du club un entraîneur dès le deuxième tour du championnat. Bernardo Hernandez, entraîneur à l'époque à l'Académie du Servette FC, est alors en charge de cette mission "sauvetage". Une mission pleinement réussie à l'issue de la saison.
En juin 2017 se tient l'assemblée générale extraordinaire qui scelle la fusion des deux clubs, ou plutôt le mariage comme aiment le dire les dirigeants genevois. "Ce n'est pas vraiment une fusion, car nous n'avions pas de structure féminine au Servette FC", précise Richard Feuz. Le Servette FC Chênois Féminin voit ainsi le jour.
Un nouveau staff technique est mis en place. Eric Sévérac est nommé entraîneur. "Je connaissais un peu Richard Feuz et Salvatore Musso (réd: ancien entraîneur du FF Chênois Genève et actuel secrétaire général du club), qui cherchaient un entraîneur pour ce nouveau projet, raconte le coach des Grenat, qui vit au SFCCF sa première expérience dans le football féminin. J'étais en pré-retraite de foot vu que j'étais sorti de Carouge quelques mois auparavant. Je me suis dit que cela pouvait être intéressant de plonger dans le foot féminin dans lequel jouait ma fille et d'apporter quelque chose de nouveau."
Outre ce staff technique, un staff médical est également mis à disposition des joueuses. Du côté administratif, tous les employés du Servette FC travaillent autant pour la section masculine que féminine.
Du point de vue financier, cette union permet de donner un coup d'accélérateur au budget du club. Des 150'000 francs environ dont disposait Chênois, le club passe à un budget de 300'000 francs. "On n'a pas fait exploser le budget lors de notre arrivée. Le but était de présenter un projet cohérent, de grandir année après année", confie Richard Feuz. Aujourd'hui, le budget pour l'entier de la structure de l'Association du Servette FCCF est de 500'000 francs.
Toutefois, malgré la fusion, l'identité du Chênois n'est pas oubliée, comme en témoigne Richard Feuz: "Il était très important pour nous de garder les racines, de ne pas faire penser aux gens que le club était né en 2017. Le club est né il y a 30 ans quand Chênois a décidé de monter ce projet." Cette volonté de conserver l'identité du FF Chênois Genève se voit notamment à travers le logo du club, mais aussi à travers la présence de membres du Chênois dans l'encadrement du Servette FCCF. C'est le cas notamment de Salvatore Musso, secrétaire général, et de Marie Lacroix, responsable juniors.
Une première saison couronnée d'une promotion en LNA
A l'aube de la saison 2018-2019, le Servette FCCF ne se cache pas. "Nous nous sommes fixés comme objectif de monter en première division dans les deux premières années, de jouer l'Europe dans les cinq premières années et d'essayer de décrocher le titre par la suite", explique le directeur sportif Richard Feuz.
Pour atteindre la montée en LNA, Eric Sévérac peut compter sur une équipe formée de jeunes talents et de joueuses plus expérimentées. Parmi elles, Maeva Sarrasin. Revenue à Chênois en 2014 après un passage à Yverdon, la capitaine genevoise devient l'un des piliers de l'équipe. Elle qui pensait calmer le jeu en revenant jouer à Chênois, la voilà partie pour un nouveau défi!
Le Servette FCCF ne va pas tarder à montrer son potentiel. En novembre 2017, l'équipe crée en effet l'exploit en éliminant Young Boys, pensionnaire de LNA, en 8es de finale de la Coupe de Suisse (7-6 tb). L'aventure se terminera en demi-finales pour les Grenat, battues 3-2 par le FC Zurich, meilleure équipe du pays. Malgré cette élimination, ces deux matches contre des pensionnaires LNA montrent aux Servettiennes qu'elles ont le niveau pour évoluer dans cette catégorie. "Ce match a été le premier acte fondateur de ce projet. Il a permis de convaincre les filles qu'elles pouvaient réussir des choses", confirme Eric Sévérac.
Durant l'hiver 2018, le Servette FCCF réalise un transfert de choix avec l'arrivée de Sandy Maendly. "Ce transfert a été un tournant pour le club", affirme Richard Feuz.
Après une carrière qui l'a menée en Italie, où elle a décroché trois titres nationaux, et en Espagne, où elle a évolué au Madrid CFF, l'internationale helvétique souhaite revenir en Suisse. "J'avais vécu une première partie de saison compliquée à Madrid. Le club, l'ambiance, cela ne répondait pas forcément à toutes mes attentes. Le mieux était de revenir vers mes proches, vers ma famille. J'avais toujours gardé le contact avec Servette. On s'est entretenu par téléphone et j'ai signé."
Comme d'autres joueuses avant elle, la Genevoise est séduite par le projet du club. "Au moment de la fusion, le club n'a pas voulu révolutionner d'un coup son effectif ou son mode de fonctionnement. Il a pu compter sur un noyau et sur un groupe solide. On a gardé une base qui nous a permis de grandir ensemble."
Cette stratégie du club ne tarde pas à porter ses fruits. A l'issue de la saison 2017-2018, un premier titre vient récompenser les efforts du Servette FCCF. L'équipe est sacrée championne de LNB et devient la première équipe genevoise à être promue dans l'élite du foot féminin. Les Genevoises rejoignent ainsi Yverdon, seul club romand présent alors en LNA.