"Pendant quelques secondes, je me suis demandé si c'était une blague", sourit Jérémy Frick
Inutile de préciser qu'une convocation en équipe nationale A apporte son lot d'émotions à son récipiendaire. Et Jérémy Frick a désormais l'honneur de faire partie de ceux qui peuvent évoquer le sujet en connaissance de cause. Lui qui avait jusqu'ici connu toutes les sélections de jeunes prend ce premier appel sous les drapeaux chez les "grands" comme un immense honneur, une reconnaissance de son implication de tous les instants. "Lorsque j'ai vu que Patrick Foletti (ndlr: entraîneurs des gardiens de l’équipe de Suisse) m'appelait alors que nous étions dans le train pour Lugano, je me suis demandé si c'était une blague, détaille-t-il. Puis je me suis vite dit qu'il ne m'appelait certainement pas pour me demander comment se passait le voyage (rires). Donc oui, c'est un rêve qui devient réalité, une immense fierté."
Cette convocation est une récompense personnelle, mais aussi collective. Pour mes coéquipiers, mon club, ma famille, pour Dani Blanco, mon entraîneur…
Sa fierté et son bonheur sont d'autant plus grands que, comme il nous l'avait confié l'automne dernier lorsqu'on l'avait lancé sur le sujet, il ne croyait plus à une possible arrivée en équipe nationale. "Notre pays a tant de gardiens talentueux que je dois reconnaître que ce n'était plus vraiment dans mon esprit, relève aujourd'hui "Frickouz". Bien sûr, tant que tu n'as pas raccroché les gants il subsiste une lueur d’espoir, mais je ne pensais plus que ça viendrait..."
Le croire dans l'incapacité de rallier le camp rouge et blanc, c'était occulter son excellente première partie de saison en Grenat, ainsi que les circonstances du destin (blessure de Gregor Kobel en l'occurrence). Mais certaines réussites dépendent justement de ces circonstances et c'est ainsi que l'actualité sourit à Jérémy Frick. "Je prends cette convocation comme la récompense de mon gros travail, surtout de celui des 4-5 dernières années, insiste-t-il. C'est une récompense personnelle, mais aussi collective. Pour mes coéquipiers, mon club, ma famille, pour Dani (ndlr: Daniel Blanco, entraîneur des gardiens du Servette FC)…"
Avec Frick on a un portier équilibré, qui a beaucoup mûri ces dernières saisons et qui a atteint l’âge idéal pour performer
Ses proches, et d'autres qui l'ont côtoyé au fil de sa carrière, ont eux aussi appris cette intégration dans la liste de Murat Yakin avec bonheur. C'est notamment le cas de Daniel Blanco. "Parce que cela met en lumière les qualités de 'Jerem', un vrai bosseur, un mec extrêmement fiable, présent à tous les entraînements et passionné par son poste, appuie celui qui travaille depuis près de 8 ans auprès du nouvel international. C'est un portier équilibré, qui a beaucoup mûri ces dernières saisons, beaucoup travaillé pour franchir des paliers, qui est plus posé aussi, et qui a atteint l’âge idéal pour performer."
Des propos corroborés par Tibert Pont et Anthony Sauthier, les deux prédécesseurs de Frick au capitanat servettien: "Jérémy est en pleine bourre et tient un rôle primordial dans la 2e place actuelle du SFC, lance le premier cité. C'est donc amplement mérité pour lui, car cela récompense l'ensemble de son œuvre et tout le travail qu'il a fourni depuis son retour à Genève." Passé désormais à Yverdon, Sauthier confirme: "Je savais son potentiel avant d'évoluer à ses côtés et je l'ai vu se développer encore. Année après année, il a franchi des paliers et progressé dans tous les compartiments."
Avoir Jérémy Frick dans un groupe est une garantie de bonne humeur. Il va amener sa touche dans l'équipe. Il a un côté "grand malade" qui fait du bien.
Au-delà même des qualités du bonhomme sur le terrain, tout un chacun loue l'état d'esprit de l'homme. "Jérémy est une crème dans un groupe, il se fond à merveille dans un collectif, reprend Pont, et chacun peut s’appuyer sur lui." Daniel Blanco souligne pour sa part que "Frick est un gars qui met de la vie, qui rassemble". "L'avoir à ses côtés est une garantie de bonne humeur, embraie Anthony Sauthier. Il va amener sa touche dans l'équipe. Il a un côté 'grand malade' qui fait du bien, si sérieux aux entraînements et puis si drôle en dehors."
Il en faut, des caractères comme ça, notamment dans un rôle de 3e gardien. Le principal intéressé dit se réjouir de l'aventure internationale qui sera la sienne pour exactement huit jours. "Je n'ai pas d’attentes particulières, simplement l'envie d’être le plus performant possible à l'entraînement, d'aider l'équipe, d'aider les deux autres gardiens, de voir aussi comment ceux-ci travaillent, insiste-t-il. Ça va être une merveilleuse expérience."
De celles qui apportent leur lot d'émotions.
Arnaud Cerutti - @arnaud_cerutti
"Une aberration", lâche Blanco
La convocation fera peut-être taire les sceptiques ayant pris en grippe le jeu aux pieds de Jérémy Frick; des critiques qui sont une aberration selon son coach attitré! "Car les stats de la Ligue démontrent aujourd'hui que Jérémy figure parmi les meilleurs gardiens du championnat dans ce domaine, rappelle Dani Blanco. Cette idée qu'il n’est pas bon aux pieds reste très genevoise, diffusée par certains qui croient avoir la pensée unique. Or, il y a une semaine, j’ai participé à un colloque d’entraîneurs de gardiens de toute la Suisse et je peux vous dire que personne ne dit cela de lui en dehors du canton."
"Avec ses grandes guiboles..."
"Il y a quelques années, on se foutait en effet de Jérémy pour son incapacité à jongler dans les petits jeux entre nous, mais je l’ai depuis vu bosser comme un fou pour combler son retard", défend Tibert Pont. Et Sauthier de relever "qu'il est désormais à l'aise dans ses relances, qu'il ne fait plus la 'spéciale Frick', à savoir ce dégagement dans les tribunes (rires)." Le latéral yverdonnois confie encore: "Vous ne pouvez pas savoir le boulot énorme qu’il a effectué pour en arriver là." Là, c’est donc en équipe de Suisse. Ce qui permet à Pont de conclure, dans un éclat de rire, que "c’est un signal magnifique de voir ce type avec ses grands panards et ses grandes guiboles recevoir une convocation…"
"Une pensée pour Collex-Bossy"
Propulsé gardien de but à l'âge de 8 ans, car son frère aîné et ses potes avaient considéré que c'était la seule place qu'il pouvait alors occuper, Jérémy Frick profite de cette convocation pour se retourner sur son parcours. Avec évidemment une pensée particulière pour son premier club, le FC Collex-Bossy (fondé en 1962). "C'est aussi une récompense pour tout le monde là-bas, souligne-t-il. Son président, Mehdi Derouazi, a d'ailleurs profité de m'appeler pour me féliciter. J'ai forcément une pensée pour Collex, où j'ai effectué mes premiers pas de footballeur. C'est un sentiment incroyable de me dire que je vais aussi le représenter en équipe nationale."
Qualifs Euro 2024
La sélection complète
Gardiens (3): Jérémy Frick (Servette), Jonas Omlin (Borussia Mönchengladbach), Yann Sommer (Bayern Munich).
Défense (8): Manuel Akanji (Manchester City), Eray Cömert (Valence), Nico Elvedi (Borussia Mönchengladbach), Michael Lang (FC Bâle), Ricardo Rodriguez (Torino), Dominik Schmid (Grasshoppers), Silvan Widmer (Mayence), Cédric Zesiger (Young Boys).
Milieu et attaque (13): Zeki Amdouni (Bâle), Breel Embolo (Monaco), Christian Fassnacht (Young Boys), Edimilson Fernandes (Mayence), Remo Freuler (Nottingham Forest), Cedric Itten (Young Boys), Noah Okafor (Salzbourg), Fabian Rieder (Young Boys), Djibril Sow (Eintracht Francfort), Renato Steffen (Lugano), Ruben Vargas (Augsbourg), Granit Xhaka (Arsenal), Denis Zakaria (Chelsea).
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— RTS Sport (@RTSsport) March 20, 2023