Mélanie Pauli, coach de condition physique: "la préparation entre deux matches est très individuelle"
La Biennoise de 43 ans compte, avec son homologue Michel Kohler, parmi ces membres du staff si précieux. L'ancienne volleyeuse internationale est de ces personnes de l'ombre qui rendent les grandes performances possibles sur le terrain. Elle joue un rôle particulièrement important dans ces phases entre deux rencontres. "La préparation entre deux matches est très individuelle", précise l'ancienne libéro de Kanti Schaffhouse. "Pour certaines joueuses, on est deux jours avant le match, pour d'autres, on est aussi deux jours après le match. Le niveau de fatigue n'est par exemple pas le même pour les titulaires du duel face aux Philippines que pour celles qui n'ont pas joué. Pour celles qui n'ont pas joué, tu donneras peut-être plus de choses à faire individuellement selon la phase du cycle dans laquelle elles se trouvent. Et cette phase n'est pas pareille pour tout le monde."
C'est comme une montre mécanique. Tu as plein de petites pièces. Pour la performance, il y a également plein de choses qui vont la définir. Si tu sépares toutes les pièces de la montre, il y en aura une toute petite qui représentera le cycle menstruel.
Ce cycle, dont il est question, est le cycle menstruel, et ne représente finalement qu'une information parmi beaucoup d'autres qui permettent de préparer au mieux les joueuses. "C'est comme une montre mécanique. Tu as plein de petites pièces. Pour la performance, il y a également plein de choses qui vont la définir. Si tu sépares toutes les pièces de la montre, il y en aura une toute petite qui représentera le cycle menstruel. Les autres, ce sera la technique, la tactique, la forme physique, la force mentale, etc. C'est important de la prendre en compte, elle donne une information supplémentaire sur l'état des joueuses pour pouvoir développer des stratégies afin qu'elles se sentent bien et puissent s'entraîner dans de bonnes conditions. Mais il n'y a pas que cela", insiste Pauli qui a rejoint l'encadrement de l'équipe de Suisse en 2021.
En somme, les informations du cycle menstruel permettent d'adapter non pas forcément la charge de travail, mais surtout tout ce qui concerne la préparation et la régénération avant et après les efforts. L'activation musculaire, la nutrition par exemple sont des éléments-clés dans un processus qui peut être individualisé selon les spécificités de chaque joueuse, sans modifier les blocs de travail collectif. "Le corps peut s'entraîner dans n'importe quelle phase, ce n'est pas le problème. Mais si tu sais dans quelle phase tu te trouves, que pendant celle-ci tu as par exemple besoin de plus de régénération, on travaillera avec ces données au niveau de la nutrition, de la régénération pour aider le corps à être dans les meilleures conditions. La même chose lors du pic d'ovulation. On sait qu'il y a une laxité des tendons. On ne va pas de se dire 'non, je ne joue pas aujourd'hui, je risque de me blesser', on va utiliser l'information pour activer les chaînes (ndlr: musculaires) arrières qui protègent le genou."
On sait que le cycle peut jouer un rôle sur les blessures des ligaments croisés du genou, mais ce n'est pas la seule explication.
Interlocutrice privilégiée des joueuses, Mélanie Pauli se refuse de voir le cycle menstruel comme un élément négatif. Au contraire, elle insiste sur le fait qu'il s'agit d'une donnée parmi d'autres à prendre en considération pour favoriser la performance. Il en va de même pour les blessures et plus particulièrement celles aux ligaments croisés des genoux. Le cycle menstruel n'est qu'un facteur d'explication parmi d'autres, mais il n'est pas la seule et unique cause. "La recherche est encore très jeune. On sait que le cycle peut jouer un rôle sur les blessures des ligaments croisés du genou, mais ce n'est pas la seule explication. Il y a toute la question du développement physique, celle des crampons, qui sont faits pour la physiologie des hommes et pas forcément celle des femmes. Cela dépend aussi du terrain."
"Au niveau des spécificités féminines, outre le cycle, il y a aussi le fait que les femmes ont un bassin plus large, ce qui fait que nous avons tendance à avoir plus les jambes en 'X' et que nous avons aussi moins de force dans les chaînes arrières", ajoute la préparatrice. "Mais la bonne nouvelle est que tu peux les activer, ces chaînes. Il faut donc faire ce travail de prévention, de réduction des risques de blessure." La prise en considération de l'ensemble de ces éléments et du travail fait tant avant qu'après les efforts permet une optimisation de la performance tout en minimisant les risques de blessures. L'accent mis sur la nutrition, si importante dans les processus de préparation et de récupération, est visible pour cette Coupe du monde avec la présence, tout sauf anodine, du chef cuisinier de l'équipe masculine Emil Bolli. Un vrai pas en avant consenti pour cette phase finale qu'il s'agira de pérenniser pour permettre à la sélection helvétique de progresser encore.
Dunedin, Ludovic Perruchoud
Collaboration avec les clubs
La collaboration évolue également avec les clubs qui ne bénéficient pas forcément toujours des mêmes moyens que l'équipe nationale. "Nous avons de plus en plus de demandes de clubs", explique Mélanie Pauli. "L'idée est vraiment d'échanger et de mettre à disposition nos informations. Nous avons récolté beaucoup d'informations, nous avons aussi nos stratégies, nos concepts, que nous allons partager. C'est important qu'on partage et pas seulement pour le football, mais aussi pour l'ensemble du sport féminin."
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