"Actuellement, la Suisse ne peut pas se passer d'un joueur comme Dereck Kutesa"
Il y a ceux qui ont la bonne tête de vainqueur du mercredi soir, et pas forcément quand on parle de Ligue des champions, puis celui qui pourrait être le sauveur du vendredi, au moins. Oui, avouons-le: on sent bien Dereck Kutesa comme potentiel grand bonhomme du match Suisse-Serbie du 15 novembre (20h05 sur RTS 2).
Revenu sous le maillot national après 3 mois passés à marcher sur l'eau et à donner le tournis aux défenses de Super League, mais aussi à celle de Chelsea notamment, l'ailier du Servette FC est le joueur le plus attendu de la dernière liste de Yakin, décimée mais pas forcément déplaisante (lire ci-dessous). "Il en est la grande attraction, celui que l'on veut voir à l'œuvre", pose d'ailleurs Sébastien Roth, ancien gardien du SFC et de la sélection. "Il a beaucoup évolué ces dernières années, son travail paie, et il mérite cette opportunité d'exposer son talent au très haut niveau international", complète Bojan Dimic, entraîneur-assistant des Grenat.
Dereck Kutesa n'a pas le profil d’un joker, mais bien celui d'un joueur que tu alignes d'emblée et qui va, à un moment ou à un autre, pouvoir mettre le bazar...
Snobé le mois dernier, et logiquement déçu de l'avoir été, le joueur de bientôt 27 ans s'était alors juré de mettre encore et encore le feu dans son couloir, histoire que plus personne ne ferme les yeux sur son état de forme. Premier pari gagné. Le deuxième, qui consistera à rayonner sous le maillot rouge à croix blanche, vient ces prochaines heures, sans que quiconque ne puisse imaginer qu'il ne soit pas aligné dès le coup d'envoi, vendredi à Zurich. "Dereck n'a pas le profil d'un joker, mais bien celui d'un joueur que tu alignes d’emblée et qui va, à un moment ou à un autre, pouvoir mettre le bazar", souligne Eddy Barea, consultant pour la RTS et ex-défenseur de Servette, Xamax et Lugano.
"Kutesa est le meilleur buteur de Super League, incontestablement l'attaquant suisse le plus fort et le plus régulier du moment, acquiesce Roth. Je ne vois pas comment, à l'heure où ses pairs ne jouent que quelques minutes par-ci par-là, on pourrait ne pas s'appuyer sur ses qualités." Si la première cape du Genevois, en mars en Irlande, n'avait guère été enthousiasmante, rappelons que c'est la Suisse entière qui était alors passée à côté du rendez-vous de Dublin. Le contexte sera tout autre au Letzigrund.
Aussi car l'intéressé a bossé deux fois plus pour retrouver le maillot rouge à croix blanche. "Dereck fait beaucoup plus attention à plein de choses à l'entraînement comme en dehors, à sa nutrition aussi, observe Bojan Dimic. Il a beaucoup évolué et s'est donné les moyens de franchir de nouveaux paliers. Il travaille énormément, ne rechigne pas à remettre l'ouvrage sur le métier. Je me réjouis de le revoir en sélection."
Dereck est un joueur percutant, insouciant, avec de la vitesse, qui va pouvoir tenter de grandes choses si on lui en donne l'occasion...
L'assistant de Thomas Häberli sait mieux que personne ce que son poulain peut apporter à la troupe de Murat Yakin: "Dereck est un joueur percutant, insouciant, avec de la vitesse, qui va pouvoir tenter de grandes choses si on lui en donne l'occasion. A mon avis, quel que soit son temps de jeu, tout le monde va voir ce qu'il a dans les jambes. Parce que oui, il est en grande confiance!"
Habité justement par cette confiance qui, dans le sport encore plus qu'ailleurs, peut tout changer, Dereck Kutesa n'a pas de pression à se mettre. Il va devoir savourer le moment et "simplement" afficher les mêmes intentions qu'en Grenat. "Sans Vargas ni Ndoye, on n'en a pas d'autres, des joueurs comme lui, dans cette équipe, alors ne nous passons pas de ses services, prolonge Sébastien Roth. Il va pouvoir amener ses qualités, de la concurrence et bousculer un peu l'offensive helvétique."
Arnaud Cerutti
"Mettre la pression"
L'oeil sur une qualification pour la Coupe du monde 2026 - qui ne sera pas du tout simple à aller chercher -, la Suisse a aussi le maintien au sein de l'élite de la Ligue des nations dans le viseur. Sauf que, décimée, elle n'a pas les meilleures cartes en main pour les rencontres à venir et a dû miser sur plusieurs visages méconnus en sélection (Aurèle Amenda, Albian Hajdari, Dereck Kutesa, Miro Muheim, Simon Sohm...). Un problème? "Pas forcément, répond Sébastien Roth. A mon sens, ces gars-là peuvent venir mettre la pression sur les titulaires habituels, dont certains se sentent peut-être un peu trop "installés" dans l'équipe". Et Eddy Barea de relever que "tous ces joueurs disposent d'une opportunité en or de marquer les esprits, de mettre le doute dans la tête du sélectionneur".
La défense centrale en question
Manuel Akanji et Nico Elvedi absents, Fabian Schär à la retraite, le couteau suisse Denis Zakaria, capable d'évoluer à ce poste, blessé; la défense centrale, déjà peu brillante en septembre et octobre, est l'immense chantier de Murat Yakin, qui devra composer avec Eray Cömert comme joueur le plus expérimenté. Mais n'aurait-il pas fallu retenir un vieux briscard, en plus d'Aurèle Amenda et Albian Hajdari? "On aurait, je crois, pu prendre Steve Rouiller, le meilleur défenseur central de Super League depuis 2 ans, lance Eddy Barea. Même s'il a 34 ans, il aurait eu les capacités, au moins pour ces 2 matches, de tenir la baraque. Le tout en lui tenant un discours honnête, lui disant qu'il incarne le présent, donc ce mois de novembre, mais pas l'avenir, à savoir les éliminatoires de la CM 2026."