Fraîchement intronisé au poste de sélectionneur de la Corée du Sud, l'Allemand s'est remémoré ses années couronnées de succès à Madrid (1977-1985). "La chose qui n'a pas changé, c'est la pression du résultat", lance-t-il.
Fin connaisseur du foot espagnol, de même que du foot helvétique, Stielike croit le FCB capable de créer la surprise. A condition d'aborder la rencontre de la bonne manière.
L'exemple de Chelsea
RTSsport.ch: Sur le papier, le groupe du FC Bâle dans cette Ligue des champions est très fort (trop fort?). Peut-on espérer une surprise de la part de l'équipe de Paulo Sousa?
ULI STIELIKE: Une chose est certaine: Bâle n'a rien à perdre dans un tel groupe. Cela pourrait même constituer un avantage. Personne n'attend une qualification bâloise pour les huitièmes de finale. Mais l'équipe a l'expérience des Coupes d'Europe et a déjà prouvé, par le passé, qu'elle était capable de créer des surprises. Les deux matches de la saison dernière face à Chelsea (réd: succès du FCB 2-1 et 1-0) en sont des parfaits exemples.
RTSsport.ch: Pour son premier match, Bâle se déplace chez le Real Madrid, champion en titre. Pensez-vous vraiment le FCB capable de ramener un résultat du Santiago Bernabeu?
ULI STIELIKE: C'est le bon moment pour jouer le Real! La politique de la direction du club n'est pas comprise par certains joueurs d'après ce que j'ai pu lire. Les départs d'Angel Di Maria et Xabi Alonso n'ont pas été bien accueillis. Je pense qu'il y aura une possibilité pour le FCB à condition que les joueurs abordent la rencontre avec une certaine fraîcheur. J'entends par là qu'ils ne doivent pas y aller dans le costume de victimes désignées, sinon ils courent à la catastrophe.
"A Madrid, le marketing a pris le pas sur le côté sportif"
RTSsport.ch: Ce Real Madrid est-il aussi fort qu'on le pense? A-t-il des faiblesses?
ULI STIELIKE:
Offensivement, c'est très très fort. Mais il y a des faiblesses défensives, oui. On l'a vu notamment lors de la défaite contre la Real Sociedad (réd: 2-4 lors de la 2e journée). Le doute peut vite s'installer s'ils encaissent un but. Je le répète, c'est le bon moment pour jouer le Real, qui est encore en rodage. Il y a des petites tensions et quelques doutes.
RTSsport.ch: Champion d'Europe en titre, le Real a connu beaucoup de changements, certains difficiles à comprendre, cet été. Le marketing a-t-il pris le pas sur le côté sportif?
ULI STIELIKE: Oui, et ça fait longtemps. Depuis que Florentino Perez a pris le club en mains. C'était déjà le cas lors de son précédent mandat et la période des Galactiques (réd: 2000-2006). C'est sa politique. Une chose est claire: ce n'est pas bon pour la cohésion d'équipe, pour l'esprit de groupe. Des joueurs appréciés dans le vestiaire ont été contraints de partir.
"Séances d'entraînements suivies par 150 journalistes"
RTSsport.ch: Si vous deviez comparer le Real d'aujourd'hui avec celui de votre époque...
ULI STIELIKE: C'est incomparable... Je vais vous donner un exemple qui illustre tout je pense. A l'époque, on pouvait garer la voiture devant le stade et aller tranquillement s'entraîner devant 4 ou 5 représentants des médias. Maintenant, les joueurs sont encadrés, on ne peut pas les approcher et les séances d'entraînements sont suivies par 150 journalistes. C'est un autre monde.
RTSsport.ch: La pression était-elle, selon vous, moins forte avant?
ULI STIELIKE: Non, c'est une chose qui n'a pas changé. Une fois que tu portes le maillot du Real, tu dois gagner. Quand j'ai signé là-bas, le club venait de terminer à la 9e place la saison précédente et ne s'était pas qualifié pour la Coupe d'Europe. D'un côté, c'était le bon moment pour arriver car on ne pouvait pas faire pire. Nous avons perdu le premier match contre Salamanque et l'entraîneur Miljan Miljanic s'est fait virer juste après. Ca montre la pression qui régnait déjà à l'époque.
"Les succès ont facilité les choses"
RTSsport.ch: Quelle avait été votre réaction?
ULI STIELIKE: C'était un jour très triste pour moi, j'en avais pleuré. Miljan Miljanic m'avait soutenu dans les premiers jours, c'est lui qui m'avait fait venir. Mais après il a fallu se remettre au travail. Nous avons bien réagi par la suite et avons fini champions. En tant qu'étranger, c'était spécial car les clubs n'avaient droit d'en aligner que deux sur le terrain. J'ai dû lutter pour garder ma place.
RTSsport.ch: Quel bilan tirez-vous de vos années madrilènes?
ULI STIELIKE: Je dirais que j'ai fait mon apprentissage de footballeur à Mönchengladbach et que j'ai passé mon diplôme de footballeur professionnel au Real Madrid. J'avais 22 ans, c'était la première fois que sortais d'Allemagne. Il a fallu apprendre une nouvelle langue, une nouvelle culture. Les Espagnols m'ont beaucoup aidé, sur et en dehors du terrain. J'ai eu la chance de remporter trois titres de champion lors de mes trois premières années, ça a facilité les choses. Surtout au Real...
Propos recueillis par Axel David - twitter @axel_david7
Uli Stielike en bref
Né le 15 novembre 1954 à Ketsch (Allemagne)
Milieu de terrain
Parcours de joueur:
1973-1977 Borussia Mönchengladbach
1977-1985 Real Madrid
1985-1988 Neuchâtel Xamax
42 sélections avec l'Allemagne de l'Ouest
Palmarès:
Vainqueur de l'Euro 1980, finaliste de la Coupe du monde 1982, champion d'Allemagne en 1975, 1976 et 1977, vainqueur de la Coupe d'Allemagne en 1973, champion d'Espagne en 1978, 1979 et 1980, vainqueur de la Coupe d'Espagne en 1980 et 1982, vainqueur de la Coupe UEFA en 1975 et 1985, champion de Suisse en 1987 et 1988
Parcours d'entraîneur:
1989-1991 équipe de Suisse
1992-1994 Neuchâtel Xamax
1994-1995 Waldhof Mannheim
1996 Almeria
1998-2000 équipe d'Allemagne (assistant)
2003-2006 équipe d'Allemagne espoirs
2006-2008 Côte d'Ivoire
2008 Sion
2008-2010 Al-Arabi Doha
2010-2012 Al-Sailiya
2014- Corée du Sud