Robert Louis-Dreyfus, l'actionnaire majoritaire de l'Olympique
de Marseille, est décédé samedi à Zurich à l'âge de 63 ans des
suites d'une leucémie. Le milliardaire n'a jamais réussi à faire de
l'OM un grand club européen, malgré quelques coups d'éclat.
Jusqu'en 1996, la chronique sportive n'avait eu que peu de raisons
de s'intéresser à cet homme, père de trois fils, abonné aux éloges
des gazettes économiques. Héritier d'une dynastie de courtiers en
céréales et d'armateurs, né dans les beaux quartiers de Paris et
résidant en Suisse à Davos, «RLD» s'est d'abord fait un nom hors du
giron familial qu'il a quitté après avoir travaillé brièvement dans
les campagnes américaines puis au Brésil. Il est titulaire d'un MBA
à Harvard décroché sans son bac, aime-t-il rappeler.
Le jackpot dans les années 80
Il transforme en jackpot, de 1981 à 1989, une société d'études
de marché dans le secteur médical aux Etats-Unis (IMS), avant de
relancer l'agence de pub londonienne Saatchi et Saatchi (PDG de 89
à 93) et d'orchestrer jusqu'en 2001, délocalisations à l'appui, le
redressement d'Adidas dont il fut le patron.
Ce n'est qu'en 2000 qu'il revient dans le groupe familial (plus de
20 milliards d'euros de chiffre d'affaires), en quête de dirigeants
du sérail. Il a aussi fondé, à titre personnel, la société de
droits sportifs Infront, née de la chute de l'empire Kirch.
si/alt
Quel avenir pour l'Olympique de Marseille?
En 1996, il se laisse convaincre par le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, président ès qualité de l'OM pendant une courte période. Par attrait pour cette ville, par envie de se piquer au jeu du foot, mais aussi par stratégie commerciale, pour offrir à Adidas une vitrine de luxe comme l'OM. C'est l'époque où il lance: «Je sais que je ne gagnerai jamais de l'argent avec l'OM». De là à se voir délester sur ses propres deniers d'environ 210 millions d'euros en un peu plus de douze ans....
Car Louis-Dreyfus investit alors dispendieusement, parfois abusé par des agents et dirigeants délégataires. Ce manque de contrôle direct a notamment valu à Robert-Louis Dreyfus d'être condamné en octobre 2007 à dix mois de prison avec sursis et une amende de 200'000 euros pour des transferts illicites. Son entraîneur de l'époque, Rolland Courbis, a, lui, été condamné dans le cadre de la même affaire à deux ans de prison ferme.
Echec retentissant de vente du club en 2007
Très affecté par ce jugement qu'il vit comme un déshonneur, «RLD» décide alors de mettre en vente le club. Mais l'opération se solde par un échec retentissant fin mars 2007, en raison du caractère sulfureux de l'acquéreur potentiel, le Canadien Jack Kachkar. Echaudé, il décidera finalement de conserver l'OM, d'autant que les résultats sportifs en amélioration (2e en 2006-2007, 3e en 2007-2008, 2e cette saison) nourrissent son espoir d'un titre, que deux finales perdues de coupe de l'UEFA (1999 et 2004) et de Coupe de France (2006 et 2007) n'ont pu satisfaire.
Son décès ne va pas manquer de relancer les spéculations sur un nouveau projet de vente. D'autant que la holding Eric Soccer, qui appartenait en nom propre à «RLD» pourrait réintégrer le groupe Louis-Dreyfus lui-même. De l'intérêt stratégique ou non d'un club de football pour une multinationale de cette taille dépendrait désormais l'avenir de l'OM...