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Del Bosque part à la conquête du Graal avec l'Espagne

Del Bosque: "Je suis un homme chanceux".
Del Bosque: "Je suis un homme chanceux".
Vicente Del Bosque, entraîneur au parcours atypique, s'apprête à relever un autre défi de taille à la tête de l'Espagne, en quête de sa première Coupe du monde. L'entraîneur de la "Roja" est confiant, mais prudent.

Le principal adversaire de l'Espagne est l'Espagne elle-même.
C'est en substance le discours que tient le sélectionneur ibérique
Vicente Del Bosque, qui a accordé à Sportinformation un long
entretien à quelques semaines du début de la préparation des
champions d'Europe pour la Coupe du monde 2010.



L'ancien milieu de terrain international et entraîneur à succès du
Real Madrid se méfie au moment d'aborder un tournoi que tout le
monde dit promis à son équipe. S'il craint surtout l'excès de
confiance, il refuse également de sous-estimer ses futurs
adversaires, à commencer par la Suisse d'un Ottmar Hitzfeld que Del
Bosque loue volontiers.



- Monsieur Del Bosque, on imagine que vos journées sont
longues actuellement...




VICENTE DEL BOSQUE: Effectivement, mon agenda est
bien rempli. J'enchaîne de nombreuses séances avec la Fédération,
avec mon staff et je vais voir beaucoup de matches. Sans parler des
moments de réflexion que je dois m'accorder.



- Parlez-nous des échéances à venir avant la Coupe du
monde.




VICENTE DEL BOSQUE: Je rendrai ma liste
définitive probablement le 19 ou le 20 mai. La concentration de
l'équipe débutera le 24, car je dois attendre la fin de tous les
matches. Nous ne pourrons même pas être au complet, puisque les
internationaux du FC Séville et de l'Atletico Madrid disputeront
encore la finale de la Coupe du Roi le 26 mai. Nous partirons
ensuite en Autriche dès le 29.



- Vous disputerez alors plusieurs rencontres de préparation
?




VICENTE DEL BOSQUE: Oui, nous avons trois matches
amicaux au programme. Les deux premiers en Autriche, le 29 mai
contre l'Arabie Saoudite et le 3 juin contre la Corée du Sud. Puis
nous affronterons la Pologne le 8 juin en Espagne, avant de partir
pour l'Afrique du Sud.



- Comme toujours, la préparation de l'équipe sera certainement
axée avant tout sur la récupération et les soins.




VICENTE DEL BOSQUE: C'est vrai. La plupart de mes
joueurs évoluent dans de grands clubs, ce qui implique des
participations à la Ligue des Champions ou à l'Europa League. Ce
sont des calendriers très intenses qui demandent énormément
d'énergie. Alors oui, la récupération physique et mentale est le
principal aspect d'une préparation à la Coupe du monde. Mais c'est
le lot de tous les sélectionneurs. J'espère simplement que l'envie,
le bonheur et l'honneur de disputer un Mondial prendra le dessus
sur tout le reste.

"Il y a quand même un Mondial à jouer"

- L'excès de confiance dont nous
parlions avant, surtout celui dont font preuve les médias
espagnols, peut-il avoir une mauvaise influence sur votre
équipe?







VICENTE DEL BOSQUE:

Etre enthousiaste est une
chose, déborder d'un optimisme démesuré en est une autre. Il y a
quand même un Mondial à jouer! Une compétition que l'Espagne n'a,
je le rappelle, jamais remportée. Ce sera très difficile,
contrairement à ce que certains pensent chez nous. Nous, au sein de
la sélection, nous savons la difficulté que représente la quête
d'une Coupe du monde.



- Souvent considérée comme favorite des tournois
internationaux, l'Espagne a régulièrement déçu dans le passé.
Jusqu'à l'Euro 2008. Comment expliquer ce déclic
?



VICENTE DEL BOSQUE:

Nous avons déjà eu, par le
passé, de bonnes, voire de très bonnes générations de joueurs. Mais
là, cette équipe est incroyable. Elle a pris l'habitude de gagner,
c'est la différence. Et l'expérience acquise par mes joueurs ces
dernières années en Ligue des Champions a pris une part essentielle
dans le succès actuel. Mes joueurs ont réussi à vaincre un vieux
complexe.



- Cela signifie-t-il que les tensions entre joueurs du Real
Madrid et du Barça sont de l'histoire ancienne
?



VICENTE DEL BOSQUE:

Ces histoires ont souvent été
gonflées, pour faire croire qu'il y avait une guerre intestine dans
la sélection. Mais c'est faux. L'ambiance et l'entente ont toujours
été bonnes entre les joueurs.



- Les succès viennent-ils alors du fait que de plus en plus
d'Espagnols évoluent, ne serait-ce que quelques saisons, dans
d'autres championnats que la Liga et qu'ils élargissent de fait
leur horizon
?



VICENTE DEL BOSQUE:

C'est une évolution normale
dans le football d'aujourd'hui. Mais je ne suis pas sûr que ce soit
un facteur déterminant. Les clubs espagnols ont toujours eu un très
bon niveau sur la scène continentale, avec le Real Madrid et
Barcelone bien sûr, mais aussi avec le Deportivo La Corogne ou
Valence ces dernières années. Et cela continue."

"Une liste assez stable"

- Les problèmes de santé que connaissent certains de vos
internationaux vous font-ils peur ?




VICENTE DEL BOSQUE: Ce ne sont pas vraiment des
peurs, mais plutôt des préoccupations. Nous avons des ennuis. Par
exemple, Fabregas, Iniesta et Xavi sont blessés, Torres l'est
souvent aussi et Villa est fragile. Ce sont les effets directs
naturels de la pratique d'un sport au niveau professionnel.



- Combien de joueurs sont-ils, dans votre esprit, déjà assurés
d'être retenus pour l'Afrique du Sud ?




VICENTE DEL BOSQUE: Vous savez, depuis longtemps,
notre liste est assez stable. Maintenant, si j'élargis un peu,
j'estime le cadre plus vaste à une trentaine de joueurs. Le plus
important est que tous ont la légitimité d'une sélection et peuvent
prétendre à une place sur le terrain.



- De l'avis de beaucoup, l'Espagne pratique le meilleur
football du monde. Or, depuis le titre européen en 2008, on a
l'impression que les médias de votre pays pensent que la partie est
déjà gagnée cet été. Craignez-vous un excès de confiance
?




VICENTE DEL BOSQUE: La vérité est que nos
résultats récents ont été fantastiques. Mais la vérité, c'est
également qu'une Coupe du monde est la chose la plus difficile à
gagner. Oui, l'Espagne pratique un beau football. Mais nous ne
devons pas nous croire arrivés avant même le début du tournoi. Il
ne faut pas confondre confiance avec présomption. Sinon nos forces
deviendront nos faiblesses.



- Pour revenir à la qualité du jeu de l'Espagne, que
reste-t-il à travailler? Où votre équipe peut-elle encore
s'améliorer ?




VICENTE DEL BOSQUE: Il est toujours possible de
s'améliorer, car la perfection n'a jamais été atteinte par aucune
équipe au monde. Il nous reste du travail. Je pense avant tout au
travail défensif et au jeu sans ballon.

"La Suisse peut régater avec n'importe quelle équipe"

- Parlons un peu de l'équipe de
Suisse. Que vous inspire cet adversaire?







VICENTE DEL BOSQUE: Ses antécédents me poussent à
le respecter et à m'en méfier. Je n'oublie pas qu'à la Coupe du
monde 2006, la Suisse a battu la Cor
ée du Sud et le Togo après
avoir fait match nul contre la France finaliste. Et ce n'est qu'aux
tirs au but qu'elle s'est faite sortir par l'Ukraine. Soit une
élimination sans la moindre défaite. La Suisse peut régater avec
n'importe quelle sélection européenne. Sa campagne qualificative a
également été une réussite, avec une montée en puissance et une
certaine solidité.



- Un joueur ressort-il du lot selon vous ?



VICENTE DEL BOSQUE: Je connais tous les joueurs
de la Suisse, mais je refuse de donner des noms. Ce qui compte avec
cette équipe, c'est le mélange ent
re joueurs expérimentés et jeunes
loups, dont beaucoup jouent à l'étranger. Et la Suisse a un très
très grand sélectionneur!



- Connaissez-vous bien Ottmar Hitzfeld ?



VICENTE DEL BOSQUE: Bien sûr que je le connais,
nous nous sommes déjà affrontés quelques fois.



- Combien de fois ?



VICENTE DEL BOSQUE: Je ne s
ais plus exactement.
Qua
tre, six, peut-être huit fois. C'est un des meilleurs du
monde.



- De manière plus générale, comment voyez-vous la situation de
ce groupe H?



VICENTE DEL BOSQUE: Quoi qu'on en dise, ce groupe
est assez équilibré. Nos trois adversaires peuvent créer la
surprise. C'est pourquoi nous devons nou
s préparer le mieux
poss
ible pour ne pas connaître de désillusion.



- Mais l'Espagne est clairement favorite et ne devrait pas
rencontrer trop de problèmes pour se qualifier.



VICENTE DEL BOSQUE: Pas du tout! Le terrain. Il
n'y a que le terrain qui compte. Nous verrons sur le terrain qui
sera le plus fort, pas avant.



- Q
ui est votre favori pour le titre suprême?



VICENTE DEL BOSQUE: L'Angleterre, l'Argentine et
le Brésil me plaisent beaucoup. Il y a d'autres équipes qui seront
dangereuses, comme l'Allemagne, l'
Italie, les Pays-Bas et la
Serbie. Attention aussi aux Africains, à commencer par la Côte
d'Ivoire. Mais, si je devais vraiment sortir deux ou trois noms, je
dirais Angleterre, Argentine et Brésil. J'espère que nous pourrons
nous mêler à la lutte.



Sportinformation/propos recueillis par Julien Pralong

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"Je suis un homme chanceux"

Après ses expériences au Real Madrid comme entraîneur de l'équipe première et formateur, à Besiktas Istanbul et dans le département technique de Cadiz, Vicente Del Bosque découvre depuis 2008 le rôle de sélectionneur. Une tâche qui convient parfaitement au Castillan.

"Les deux métiers n'ont en fait pas grand chose à voir l'un avec l'autre, lâche-t-il en préambule. Il est très compliqué de tisser des relations avec des joueurs en tant que sélectionneur, puisque les rendez-vous internationaux sont rares." Un fait qui comporte "un avantage" par rapport au cahier des charges des entraîneurs de club.

"Le fait de devoir gérer tous les jours les relations internes dans un club est périlleux. Les mécanismes doivent être huilés au quotidien et les risques de tensions sont plus importants. Il existe moins de problèmes de cohabitation au sein d'une sélection."

Une relative tranquillité qui ne fait toutefois pas pencher le coeur du Castillan. "Je suis un homme chanceux. J'ai pu rester quatre ans à la tête du Real Madrid, chose que l'on sait tous être très compliquée. Et, aujourd'hui, je suis un sélectionneur heureux. Cela me permet de toucher un deuxième grand rêve dans la carrière d'un entraîneur."

Del Bosque, un parcours atypique

Vicente Del Bosque n'a pas un parcours classique en tant qu'entraîneur. Arrivé à la tête du Real Madrid presque par hasard, le natif de Salamanque s'est forgé un palmarès et une réputation de premier plan. Il s'apprête à relever un autre défi de taille à la tête de l'Espagne, en quête de sa première Coupe du monde.

Né en 1950, Vicente Del Bosque a tout d'abord été un joueur professionnel, passant notamment par la Castilla, Cordoue, Castellon et, bien sûr, le Real Madrid, avec qui il a remporté cinq fois la Liga et quatre fois la Coupe du Roi. Honnête milieu de terrain, il a même porté 18 fois le maillot de la sélection nationale, participant à l'Euro 1980.

Après sa retraite sportive, Del Bosque se lance dans une carrière d'entraîneur/formateur au Real Madrid. Appelé en catastrophe à la rescousse du club merengue en 1994 après le licenciement de Benito Floro, il dirige la première équipe quelques mois seulement. Il connaîtra un deuxième intérim - d'un seul match! - en 1996.

Ce n'est que lors de la saison 1999/00 que le Real lui confie réellement les rênes de l'équipe, à la tête de qui il succède à John Toshack. Avec un grand succès à la clé, puisque le "Bigoton" (la grosse moustache) remporte entre autres deux fois la Liga et deux fois la Ligue des Champions.

Del Bosque est surtout l'homme qui aura réussi à faire cohabiter les stars du Real Madrid galactique premier du nom, comme Zidane, Ronaldo, Figo, ou encore Roberto Carlos. "Je n'ai finalement jamais connu trop de complications avec mes joueurs, explique-t-il. J'ai toujours travaillé avec des gens généreux, avec des gens biens."

Reste que celui que l'on surnommait affectueusement mais d'une manière un peu moqueuse "Mr. Potato" a totalement su gérer la pression madrilène, restant quatre ans sur le banc de la capitale! Avait-il un secret pour annoncer à ses stars qu'elles devraient s'asseoir sur le banc avant un match? "Il ne s'agissait pas de savoir qui mettre en avant. Tout était question de collaboration. Ce n'était pas difficile à mettre en place au Real. Et, finalement, très peu de conflits ont surgi."

DEUX FORFAITS DANS L'EQUIPE D'ALLEMAGNE
Le gardien René Adler et le milieu Simon Rolfes, qui évoluent tous deux au Bayer Leverkusen, ne disputeront pas le Mondial avec l'Allemagne. Adler s'est fracturé une côte, alors que Rolfes n'a pas encore récupéré d'une blessure à un genou. Adler (25 ans) était le portier titulaire désigné. Joachim Loew devrait le remplacer par Manuel Neuer (Schalke).