"Si tu joues, les portes s'ouvrent"

Benvenguts a Montpelhièr! Loin des coteaux valaisans, Sébastien Wüthrich est bien décidé à s'épanouir sous le soleil d'Occitanie, là où chante l'inénarrable accent de Rolland Courbis. Sevré de temps de jeu au FC Sion, le  Neuchâtelois de 24 ans a choisi de  répondre à l'appel du pied du coach marseillais de Montpellier et de rejoindre le 7e de Ligue 1 au mercato hivernal, soit 6 mois avant la fin de son contrat avec le club valaisan.

A l'aube de cette nouvelle expérience qu'il espère voir couronnée de succès, l'ancien milieu de NE Xamax et du FC St-Gall s'est confié à RTSsport.ch, sur une terrasse baignée de soleil de Palavas-les-Flots, à une quinzaine de minutes du magnifique centre d'entraînement de Grammont.

"Cela devenait galère pour moi"

RTSSPORT.CH: Comment s'est passé votre transfert au Montpellier Hérault Sport Club ? La présence de Rolland Courbis, qui était passé par Sion (ndlr: 2 matches à la fin de la saison 2011-12), a-t-elle joué un rôle essentiel?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Oui, c'est clair. Il était venu entraîner Sion durant 2-3 semaines et on m'avait dit par la suite qu'il avait été intéressé par mon jeu. Il y a eu une première approche quand je suis revenu à Sion après mon prêt à St-Gall (2013-14), mais elle n'avait pas abouti en raison de la somme de transfert demandée qui était trop importante. Puis, il y a eu une seconde approche cet hiver, qui a cette fois débouché sur du concret. Tant mieux pour moi, par rapport à la situation qui était la mienne.

RTSSPORT.CH: Cette situation justement était compliquée avec très peu de temps de  jeu. Avez-vous vécu des mois de galère?

SEBASTIEN WÜTHRICH: C'était frustrant. Je découvrais mon premier club après Neuchâtel et j'avais à cœur de bien réussir. Après... il y a des clubs où  cela ne va pas, et à Sion cela n'a pas  marché pour moi. Mais j'ai aussi de  bons souvenirs, surtout lors de mon  prêt à St-Gall (rires). Je pensais  aussi en revenant à Sion pouvoir entrer dans une nouvelle dynamique, mais il y  a eu une blessure. Puis, le club m'a proposé une prolongation de trois ans  que j'ai refusée. Et cela a amené  l'écartement de l'équipe, les matches en tribune et pas même du temps de jeu avec les M21. Cela devenait galère pour moi. Mais c'était un choix et je savais que je m'exposais à ce risque en ne prolongeant pas. Je ne regrette pas cette décision aujourd'hui.

"Tout dépend de ce que tu montres"

RTSSPORT.CH: Est-ce que vous pensez pouvoir vous imposer ici? Avez-vous eu des promesses en signant ici?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Dans le foot, il n'y a jamais de promesses à ce niveau- là. Tout dépend de ce que tu montres à l'entraînement. Le point positif est que le coach me voulait, qu'il m'a fait venir ici avant la fin de mon contrat pour que je puisse m'installer, m'acclimater en vue de la saison prochaine. Mais j'ai vraiment envie de travailler pour intégrer l'équipe première et avoir du temps de jeu rapidement. Mais c'est clair qu'il me manque de la compétition après ces six derniers mois à Sion. J'ai pu jouer deux matches avec l'équipe de CFA (4 div.), qui m'ont remis dans le bain. J'ai eu ma première convocation contre Lyon et j'espère que ce sera progressif.

RTSSPORT.CH: Dans un championnat physique comme celui de la Ligue 1, est-ce qu'un joueur avec votre profil plus technique n'aura pas plus de peine à s'imposer?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Oui, ce n'est pas forcément le championnat où ce sera facile pour moi de m'imposer. Le jeu espagnol aurait peut-être mieux correspondu à mes qualités. Mais il ne faut pas s'arrêter à cela. C'est surtout une question de travail, de mental.

RTSSPORT.CH: Comment s'est passée l'installation à Montpellier?

SEBASTIEN WÜTHRICH: J'ai toujours fait des vacances à la mer, je n'y ai jamais habité, ce sera donc une première. C'est un peu compliqué au début, quand tu es seul à l'hôtel. Les journées sont parfois longues, mais je vais bientôt avoir ma maison (le lundi 16 mars, cinq jours après l'interview). Ce sera sans doute plus facile pour moi par la suite, je vais pouvoir retrouver mes chaînes suisses, si j'arrive à les mettre (rires). Il y a aussi eu pas mal de démarches administratives. J'espère avoir fini avec cela rapidement, pour pouvoir me focaliser sur le foot et montrer ce que je sais faire.

"J'ai dû chanter devant l'équipe et le staff"

RTSSPORT.CH: Et l'intégration au sein de  l'équipe?

SEBASTIEN WÜTHRICH: J'avais eu une expérience moyenne à Lorient où j'avais  fait des essais (janvier 2011), mais bon la  donne était différente, je n'avais pas  signé là-bas. Ici, cela a été différent. Peut-être parce qu'ils savaient  qu'ils allaient devoir me supporter trois ans et demi (rires). Et puis, je  connaissais Dylan Gissi (l'Argentin né  en Suisse a joué à Neuchâtel entre 2008  et 2010 et a fait une apparition avec la Suisse M21). C'est toujours plus facile  avec un point de repère dans une nouvelle équipe. L'état d'esprit est excellent. Il n'y a pas d'ego, de concurrence. Tout se passe bien. D'ailleurs, pour ma première convocation dans les 18 (le 8 mars face à Lyon, il n'est cependant pas entré en jeu), j'ai dû chanter devant l'équipe et le staff. Ce n'est pas facile, mais cela m'a aidé à me sentir encore mieux intégré, à me libérer.

RTSSPORT.CH: Vous parliez de Lorient. Vous disiez en quittant les tests que cela ne vous intéressait pas de rester dans un club pour chauffer le banc, mais que vous aviez vu là où il vous fallait travailler pour jouer à l'étranger. Quelles étaient ces choses à améliorer?

SEBASTIEN WÜTHRICH: J'étais encore très jeune et même si cela n'a duré que trois jours, j'ai pu voir ce qui allait m'attendre, si je partais. J'ai pu me rendre compte du caractère qu'il fallait pour aller vivre dans une autre ville, un autre pays. Alors qu'à Neuchâtel, c'était pour moi le top. J'avais ma famille, mes amis. Je n'étais pas encore prêt.

"Courbis est extraordinaire avec les joueurs"

RTSSPORT.CH: On dit que Rolland Courbis a une relation privilégiée avec ses joueurs. Comment cela se passe avec lui?

SEBASTIEN WÜTHRICH: J'avais rarement vu un entraîneur comme cela. Il est vraiment extraordinaire avec les joueurs. Il n'a pas besoin de faire dix phrases pour se faire comprendre. Et lors des théories, il n'y a pas une seconde où tu ne l'écoutes pas. C'est vraiment passionnant, il fait aussi de bonnes blagues (rires). Puis, il est proche de nous. Il m'a dit par exemple qu'il n'y avait pas de stress, qu'il me fallait travailler bien sûr, mais sans pression. On a également parlé de ma position sur le terrain... on voit aussi avec le classement de Montpellier, le résultat de son travail.

RTSSPORT.CH: Il ne passe donc pas son temps au téléphone, comme ce matin lors de la première partie de l'entraînement?

SEBASTIEN WÜTHRICH: C'est un peu lui cela (rires). On dirait qu'il a quatre vies. Mais une fois que nous faisons du jeu, des matches, il est bel et bien avec nous, et là plus de téléphone.

"Le terrain qui me passionne surtout"

RTSSPORT.CH: Bulat Chagaev, Christian Constantin et maintenant Louis Nicollin. Peut- on dire que vous aimez jouer pour des présidents au caractère bien trempé?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Non. Mais c'est vrai qu'en regardant cela... (rires) Je plaisante bien sûr. C'est le terrain qui me passionne surtout. Le nom du président n'entre pas en ligne de compte dans mes choix. Après, même si cela ne s'est pas bien passé à Sion, je garde de l'estime pour Constantin. On le cri- tique beaucoup sur ses choix, il fait peut-être des erreurs, mais il arrive quand même à garder un club à lui tout seul. Et je ne sais pas si Sion survivrait, s'il partait. Je connais surtout Nicollin pour ses coupes de cheveux quand Montpellier est champion (il s'était teint les cheveux en orange et bleu en 2012). Non, sérieusement, je suis très content de travailler pour lui. J'espère qu'il sera satisfait de m'avoir engagé.

RTSSPORT.CH: Est-ce que vous êtes mieux payé à  Montpellier qu'à Sion?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Non. C'est vraiment d'abord un choix sportif.

RTSSPORT.CH: Vous n'avez que 24 ans. Est-ce que  vous pensez à l'équipe nationale?

SEBASTIEN WÜTHRICH: Chaque chose en  son temps. Mon premier objectif est de  bien m'installer dans ce club, de trouver du temps de jeu. Et après l'équipe  nationale arrivera peut-être. Je pense  que si tu t'imposes en Ligue 1 dans un  club du haut de tableau, tu as plus de  chances. Donc oui j'y pense, mais je  dois d'abord m'imposer ici. Le football  rime avec jeu. Si tu joues, les portes  s'ouvrent.

Propos recueillis à Montpellier par Ludovic Perruchoud