Christophe Bonvin, de la finale de la Coupe à Wembley

La silhouette n'a pas changé. Elle reste longue et fine, comme si le poids des années n'avait pas d'emprise sur lui. Christophe Bonvin affiche 45 printemps et cela fait 14 ans déjà qu'il a troqué le cuir pour le verre. Autant dire que pour parler ballon(s), ce négociant en vins répond toujours présent.

S'il ne fréquente plus assidûment les stades, ce Valaisan, ex-attaquant de Sion, Servette, Neuchâtel Xamax et de l'équipe de Suisse, n'aurait manqué pour rien au monde la 12e étoile de son club de coeur en finale de Coupe de Suisse, dimanche à Bâle.

Les étoiles, c'est d'ailleurs ce qui revient dans les yeux de Bonvin à l'évocation de Wembley, stade qui accueillera Angleterre-Suisse samedi, et où il a disputé le match d'ouverture de l'Euro 1996... contre les Anglais.

tsrsport.ch: Christophe, vous avez assisté au 12e sacre du FC Sion en Coupe à Bâle. Qu'avez-vous pensé du match, qui opposait deux de vos anciens clubs?

CHRISTOPHE BONVIN: Vous savez, cette finale, tout le monde l'attendait en Valais, comme toutes les autres finales. Depuis la demi-finale gagnée, tout le monde ne parle plus que de ça plus les semaines avancent. Et ce superbe stade coloré de blanc et rouge, c'était tout simplement magnifique. Pour ce qui est du match, c'était un départ presque trop magnifique pour Sion. Le match était plié après 6 minutes! Franchement, à 2-0, j'ai dit à Patrick Sylvestre, qui m'accompagnait, qu'on pouvait aller boire un verre et manger des petits fours! Mais au niveau émotionnel, il n'y a pas vraiment eu grand-chose dans cette finale...

"En finale de Coupe, Sion avait de la marge"

tsrsport.ch: Sion a plusieurs fois remonté un score de 2-0 déficitaire dans ses finales passées. N'avez-vous pas pensé que Xamax pouvait réussir un retour "à la Sion"?

CHRISTOPHE BONVIN:

Si la légende était en faveur de Xamax, qu'il avait remporté plusieurs finales et que le stade était acquis à sa cause, peut-être. Mais là, c'était tout simplement impensable. A aucun moment je n'ai pensé que Xamax pourrait revenir. Les Neuchâtelois n'y étaient juste pas. J'ai senti que Nuzzolo, que je pense être un superbe joueur, était un peu dépité, pas dans son assiette. Tout le monde, côté xamaxien, semblait un peu désemparé. Et ces deux goals encaissés... Le premier, sur cette non-sortie de Bedenik, résume bien l'état d'esprit de Xamax. Et le deuxième, tu ne dois tout simplement pas le prendre. Vanczak en a marqué 13 ou 14 de la sorte cette saison, tout le monde le sait, Xamax devait le savoir! Enfin, j'ai l'impression que Sion avait juste bien de la marge...

tsrsport.ch: De l'extérieur, on a un peu l'impression que Sion a "offert" le maintien à Xamax à Tourbillon il y a une semaine et que Xamax a "offert" la Coupe aux Valaisans en contre-partie...

CHRISTOPHE BONVIN: Premièrement, je dois avouer que je n'ai pas vu le match de Tourbillon. Mais après, que ça puisse traverser l'esprit des gens, je peux le comprendre. Reste qu'au niveau des joueurs, ça me semble tout simplement impossible. Tu ne joues pas forcément 15 finales de Coupe, alors quand tu en disputes une, tu donnes tout!

tsrsport.ch: Vous, en tant qu'ancien Xamaxien, que pensez-vous de la direction que prend le club de la Maladière?

CHRISTOPHE BONVIN: Je dois vous avouer que j'ai quand même pris pas mal de recul depuis ce temps-là... Aujourd'hui, je suis davantage supporter qu'ancien joueur. Mais je suis d'un naturel positif, alors... il faut voir! En plus, j'ai pas mal de job à côté, et ne vais donc pas encore aller me soucier de comment Xamax est désormais géré...

Toutefois, avec la montée de Lausanne déjà acquise, c'est très positif. Il y aura beaucoup plus de derbies. Mais Xamax devra se renforcer, c'est sûr!

"Voir Wembley et mourir"

tsrsport.ch: Parlons quand même un peu de l'équipe de Suisse, qui joue samedi à Wembley contre l'Angleterre. Vous avez joué dans ce stade à l'occasion du match d'ouverture de l'Euro 1996. Que représente-t-il pour un joueur?

CHRISTOPHE BONVIN: Ce n'est aujourd'hui plus le même stade, et c'est pourquoi c'était peut-être encore plus mythique. C'est quand même le stade qui a accueilli toutes ces finales de "Cup" commentées par le duo Tillmann-Marky... Pour moi, ça a toujours été un peu "voir Wembley et mourir". Et comme j'étais déjà sûr d'arrêter le foot une année après, j'aurais même pu me retirer après avoir joué là-bas en 1996! Je me souviens que Patrick Sylvestre, un bon copain qui était aussi dans l'équipe mais qui n'a pas joué ce jour-là, était vraiment très content pour moi. On en discutait encore lors des 2-3h de bus jusqu'à notre hôtel.

Je ne suis pas trop cérémonial, mais Wembley, c'est le tapis rouge, la présentation au Duc de Kent, etc. C'est toute la tradition du football anglais. Dans ma carrière, il y a deux stades où je voulais absolument jouer: Wembley et Anfield Road (réd: stade de Liverpool). Et j'ai fini dans ce dernier, et en marquant un but, en plus!

tsrsport.ch: Que pensez-vous de la campagne de qualification à l'Euro 2012 de la Suisse. Le match de Wembley est vraiment celui de la dernière chance...

CHRISTOPHE BONVIN: Si notre équipe nationale est aussi bonne que son sélectionneur adjoint Michel Pont avait d'enthousiasme sur le plateau de la finale de la Ligue des champions, elle fera au moins un point (rires)!

C'est vrai sinon que cette campagne est très mitigée. Je suis tous les matches, mais je ne sens pas une cohésion extraordinaire au sein du groupe ni une grande sérénité. Mais attendons le match en Angleterre pour tirer un bilan.

"Il a du crédit, mais il faut recharger la carte à un certain moment"

tsrsport.ch: Et qu'avez-vous pensé du renouvellement du contrat d'Ottmar Hitzfeld aussi tôt, alors que la Suisse pourrait bien être déjà éliminée?

CHRISTOPHE BONVIN:

C'est effectivement difficile à expliquer, même si je n'en connais pas tous les tenants et aboutissants. Il a certes un crédit extra ordinaire, mais à un certain moment, il faut recharger la carte!

Il y a certes eu la victoire héroïque contre l'Espagne au Mondial, mais sinon pas grand-chose. Je vous avoue que j'ai un peu de peine à m'identifier avec le même enthousiasme que par le passé avec cette équipe de Suisse

tsrsport.ch: Et le départ de Frei, d'abord annoncé pour après le match en Angleterre, puis finalement bien plus tôt?

CHRISTOPHE BONVIN: Ca me paraît drôle. Mais Frei et Streller devaient sûrement avoir de bonnes raisons... Moi, je peux juste dire que quand je recevais une convocation de l'équipe de Suisse, j'y allais, un point c'est tout. C'était le graal quand même! Roy Hodgson ne m'avait pas pris pour la Coupe du monde 1994 aux USA. J'étais certes très déçu, mais quand il m'a reconvoqué ensuite pour un match à Malte, j'avais juste envie de lui dire "merci de me reprendre!".

tsrsport.ch: Votre pronostic pour ce match Angleterre-Suisse de samedi?

CHRISTOPHE BONVIN: 1-1, comme lors de l'Euro 1996. Actuellement, c'est bien difficile d'imaginer nos Suisses gagner, même si je suis et serai toujours leur premier supporter!

Propos recueillis par Daniel Burkhalter