Gelson: "rarement eu autant d'occasions"

Le plus souvent remplaçant dans un milieu de terrain très dense, le Valaisan de 28 ans ne s'en formalise pas. Il voit au contraire dans ce rôle, que beaucoup trouveraient ingrats, la marque du potentiel de la sélection. Avec le sourire, l'ancien joueur du FC Sion revient sur ses expériences avec l'équipe de Suisse et livre son analyse de la situation actuelle.

"Une pléiade d'occasions"

RTSsport.ch: La campagne de qualification a plutôt mal commencé. Après ces débuts difficiles (défaite contre l'Angleterre 2-0, puis en Slovénie 1-0), la Suisse s'est bien reprise.Vladimir Petkovic a-t-il désormais l'équipe bien en mains?

GELSON FERNANDES: Ce n'est pas facile pour Petkovic. Quand tu arrives après le départ d'un entraîneur en place pendant six ans, que tu n'as pas de matches de préparation et que tu commences par l'Angleterre... Nous avons été timorés contre les Anglais en première mi-temps. Nous nous sommes créés des occasions en deuxième période. En Slovénie, nous avons eu une pléiade d'occasions. Une pléiade! Je pense que la Suisse s'est rarement autant procuré d'opportunités en matches. Bien sûr, nous n'avons pas affronté l'Allemagne, la France. Mais auparavant, nous avions des difficultés à nous offrir des chances même contre un adversaire présumé plus faible.

RTSsport.ch: Comment vous l'expliquez?

GELSON FERNANDES: Le système en losange derrière Shaqiri permet d'avoir plus de poids offensif, d'amener du danger par les latéraux, même si c'est peut-être plus compliqué pour les milieux axiaux. Ceci, contre une équipe qui a moins la possession de balle, est excellent. Même si contre une formation qui a plus le ballon, nous pouvons être plus en difficulté, ce système nous réussit bien et, je crois, a fait ses preuves jusqu'à maintenant.

"Pas si simple d'être titulaire dans un club"

RTSsport.ch: La Suisse se crée des occasions, mais est-ce qu'il ne lui manque pas un attaquant...

GELSON FERNANDES: Un Alex Frei (rires)?

RTSsport.ch: Par exemple, oui.

GELSON FERNANDES: Nous n'avons pas encore un attaquant qui a pris sa dimension. Mais à leur décharge, ils sont tellement jeunes. Et le problème c'est que ce n'est pas si simple d'être titulaire dans un club. Quand tu as un passage à vide de deux mois et que tu joues un peu moins, on dit "il n'a plus de temps de jeu, il ne faut plus qu'il soit convoqué, etc." Ce n'est pas bon.

RTSsport.ch: La pression augmente aussi avec des attentes qui grandissent autour d'une équipe au potentiel certain...

GELSON FERNANDES: Oui, car la Coupe du monde au Brésil a été géniale. Une fois par mois, je regarde le huitième de finale contre l'Argentine (défaite 1-0 en prolongation). Car je trouve qu'en matière de personnalité, de courage, d'abnégation, je pense que ce match a marqué l'histoire du football suisse. Mettre le futur vice-champion du monde autant en difficulté dans le jeu, c'était   juste... extraordinaire. En première mi-temps de la prolongation, le stade vibrait pour la Suisse. Et après le poteau... c'était fou. Nous ressentions la force de tout le pays derrière nous. Une expérience vraiment excellente.

"Il y a tellement de joueurs de valeur"

RTSsport.ch: Vous avez plutôt un rôle de remplaçant en équipe de Suisse, ce n'est pas quelque chose de frustrant?

GELSON FERNANDES: Nous avons de la qualité au milieu. Je suis titulaire à Rennes. Il y a peut-être dix ans, un joueur titulaire à Rennes est sur le terrain avec la Suisse. Mais aujourd'hui, il y a le titulaire de Gladbach (ndlr: Granit Xhaka), celui de Naples (Goekhan Inler), celui de l'Inter (Xherdan Shaqiri), celui de Galatasaray (Blerim Dzemaili), celui de l'Olympiakos (Pajtim Kasami). Il y a des joueurs qui passent avant moi, je suis le premier à les soutenir. Tu peux aussi me faire confiance, me faire rentrer, si tu en as besoin. C'est une fierté d'avoir autant de sélections dans une équipe d'un tel niveau. Regarde Ricardo Rodriguez! Est-ce que nous avons déjà eu un joueur suisse aussi proche du gratin européen? Il est l'un des meilleurs à son poste. Et Yann Sommer? Etc. Etc. Il y a tellement de joueurs de valeur...

RTSsport.ch: De quoi aborder avec confiance le rendez-vous de Vilnius notamment?

GELSON FERNANDES: Avec confiance, oui. Mais sans la solidarité, la combativité, le respect des valeurs du collectif, nous devenons une équipe moyenne. En Lituanie, ce sera sur du synthétique, il fera chaud, après un championnat long. Il faudra une mobilisation totale. Il faut se mettre en mode trois points. Nous ne pouvons pas prendre ce match à la légère si nous voulons vivre notre rêve de l'Euro 2016. En France, avec un public suisse qui sera proche, qui viendra nombreux. En face, ils seront regroupés, vont se battre, mais nous, nous n'avons pas le choix. Nous devons être agressifs, tueurs à la moindre occasion. Nous devons faire notre job et après nous songerons aux vacances.

Propos recueillis par Ludovic Perruchoud