La vie reprend son cours, mais il est difficile de s'ôter de l'esprit ce ciseau de Xherdan Shaqiri, qui a disputé sa meilleure mi-temps du tournoi lors de l'élimination de la Suisse face à la Pologne en huitièmes de l'Euro. Ce geste lumineux, qui a ramené la Suisse à égalité (1-1), pouvait déclencher quelque chose, porter une équipe jusque dans une nouvelle dimension. L'histoire aurait été belle.
Les larmes de Valon Behrami
Elle l'aurait notamment été pour Valon Behrami. L'héroïque milieu de Watford a abandonné ses tripes sur les terrains à chaque match. Quel crève-coeur de le voir en larmes, lui, toujours si généreux sur le terrain. Quel drame de le voir si abattu après une nouvelle performance remarquable à la récupération. Il aurait mérité mieux, mille fois mieux pour son investissement constant et irréprochable sous le maillot suisse.
Il a été le véritable poumon d'une équipe dont Granit Xhaka a été le coeur. La nouvelle recrue d'Arsenal a pris une nouvelle carrure dans ce tournoi. Véritable patron de cette équipe, il a été comme tant d'autres avant lui, le héros malheureux du duel contre la Pologne en manquant son tir au but (5-4).
Cet Euro laissera un goût d'inachevé du côté suisse. Car même si le sélectionneur Vladimir Petkovic lui a apporté une volonté de jouer, un côté séduisant, même si elle s'est créé une multitude d'occasions, la Suisse sort sur une énième défaite honorable. Il lui aura simplement manqué un tueur dans la surface, un digne héritier d'Alexander Frei pour franchir cette porte sur le pas de laquelle elle avait pourtant mis un pied.
"Nous avons fait de grands progrès dans notre capacité à nous créer des occasions, mais l'efficacité n'a pas été là", reconnaît le directeur technique de l'ASF Laurent Prince. "Il faut la travailler, c'est certain. Nous oeuvrons depuis des années déjà dans ce secteur. Mais nous devons faire plus avec les clubs et dans la formation des jeunes attaquants. Nous avons un concept que nous allons faire évoluer pour aller de l'avant."
Bilan mitigé
Cette défaillance dans les derniers gestes a été le grand point noir de la prestation helvétique sur les pelouses françaises. Car pour le reste, l'équipe de Suisse a montré qu'elle avait les moyens de ses ambitions. Le bilan demeure donc mitigé. "Tout d'abord, il y a une désillusion. C'est clair. Nous voulions rester plus longtemps ici, passer en quarts", résume le président de l'ASF Peter Gilliéron.
"Mais il y a quand même des côtés positifs. Il y a une vraie solidarité, un bel esprit d'équipe. Nous avons aussi bien joué, fait des progrès et cette équipe est encore jeune". Oui, cette équipe porte en elle de belles promesses qu'il s'agira de traduire en réalité dans le futur et peut-être déjà au cours de qualifications pour le Mondial 2018 qui s'annoncent difficiles dans le groupe qui comporte notamment le Portugal (1/4 à l'Euro) et la Hongrie (1/8 encore à disputer).
Montpellier, Ludovic Perruchoud - Twitter @LPerruchoud
Suisse-Pologne, les tops helvétiques
XHERDAN SHAQIRI: pas franchement à son avantage et même clairement décevant depuis le début du tournoi, le milieu de Stoke a disputé septante-cinq excellentes dernières minutes, prolongation comprise. Il a bien sûr également inscrit cet incroyable but en ciseau qui a remis la Suisse sur les bons rails. Las, son réveil n'aura pas suffi pour qualifier son équipe.
YANN SOMMER: le portier du Borussia Moenchengladbach a réussi, une nouvelle fois, plusieurs parades déterminantes qui ont maintenu la Suisse dans le match. Très à son aise depuis le début du tournoi, il a une nouvelle fois prouvé qu'il était l'un des meilleurs gardiens d'Europe. Malheureusement, il n'a pas été servi par la chance. Le ballon du 1-0, parfaitement joué par Jakub Blaszczykowski, lui a filé entre les jambes. Il est également parti quatre fois du bon côté lors de la séance de penalty et en a même touché un, sans pouvoir le stopper.
GELSON FERNANDES: le Valaisan du Stade Rennais a réussi une très belle entrée en jeu à la place de Valon Behrami (77e minute). Le milieu défensif a beaucoup couru, n'a laissé aucun répit à ses adversaires aux basques desquels il a collé sans relâche. Agressif, il a imposé sa puissance physique dans les duels et a aussi assuré ses relances. Toujours irréprochable dans son attitude malgré son statut de doublure, il a prouvé que la Suisse pouvait également compter sur ses remplaçants.
Suisse-Pologne, les flops helvétiques
EREN DERDIYOK: la première entrée en jeu (70e pour Admir Mehmedi) de l'attaquant de Kasimpasa dans le tournoi n'a pas été couronnée de succès. Le buteur a bénéficié de deux balles de match durant la deuxième période des prolongations. Mais il lui a manqué un brin de précision et/ou de puissance pour offrir une qualification historique à la Suisse.
STEPHAN LICHTSTEINER: le latéral de la Juventus n'a pas livré son plus mauvais match. Il s'est beaucoup battu. Mais il a souvent souffert sur son côté en première mi-temps, puis a semblé manquer de souffle au moment de centrer après ses débordements. Il a souvent apporté beaucoup de percussion offensive par le passé à l'équipe de Suisse. Toutefois, son apport n'a une fois encore pas été à la mesure ni de ses qualités, ni de ses performances en club, quand bien même les circonstances en Serie A sont bien sûr différentes.
JOHAN DJOUROU: le défenseur central genevois est monté en puissance au fil de la partie, mais son premier quart d'heure, truffé d'imprécisions dans les passes, aurait pu permettre à la Pologne d'enterrer rapidement les espoirs suisses. Le joueur d'Hambourg a montré par le passé beaucoup plus de sérénité à la relance. Ce tournoi ne lui a pas beaucoup souri, mais il a été malade en début d'année et a sans doute manqué un peu de rythme. Il reviendra très certainement plus fort pour les qualifications du Mondial 2018.