Modifié

"Nous étions constamment insultées"

Sarah Marchini et Marine Périchon ont accepté de revenir sur des faits survenus à Macolin.
Sarah Marchini et Marine Périchon ont accepté de revenir sur des faits survenus à Macolin.
La gymnastique rythmique suisse est dans la tourmente depuis quelques jours. Plusieurs athlètes ont décidé de prendre la parole pour dénoncer les méthodes tyranniques de leurs entraîneurs. La Fédération suisse de gymnastique a réagi le 24 juin en se séparant de l’entraîneure principale et de la coach nationale, toutes les deux Bulgares. Une enquête externe a été ouverte. Olivier Dominik a recueilli le témoignage choc de deux anciennes gymnastes: Marine Périchon et Sarah Marchini.

L'affaire a fait grand bruit fin juin et a perturbé la quiétude habituelle du centre national de sport de Macolin. Les Bulgares Iliana Dineva et Aneliya Stancheva, deux cadres de la gymnastique rythmique, ont été licenciées par la Fédération suisse de gymnastique (FSG) à la suite de graves dysfonctionnements en termes de méthodes d'entraînement et de rapports humains.

"Nous étions complètement conditionnées"

"Quand je suis arrivée à Macolin, en 2005, on m’a invitée à ne pas parler de ce qui se passait dans la salle d'entraînement à mes parents. J'ai très vite compris que c'était ce qu'il fallait faire...", indique d'entrée Marine Périchon.

"Nous savions que c'était minimum 8 heures d'entraînement par jour. Il y avait beaucoup de chantage là autour. Par exemple, si on arrive à faire l'exercice sans faute, alors on pourra partir. Si on arrive à faire une performance incroyable, alors on pourra boire, on pourra aller aux toilettes. Nous étions complètement conditionnées", poursuit-elle.

Marine Périchon
Gymnastique rythmique: Marine Périchon à l'interview / RTS Sport / 25 min. / le 5 juillet 2020

"L'entraînement coûte que coûte"

"Au début, c'est l'euphorie. Il y a une salle d'entraînement pour nous, une famille d'accueil à Bienne, on sent qu'il y a une structure pour nous accompagner dans notre sport", souligne Sarah Marchini, qui a également rejoint Macolin en 2005. Mais rapidement, le leitmotiv "entraînement coûte que coûte" prend place dans le quotidien des gymnastes.

"La souffrance fait partie du quotidien d'un sportif. Cependant, avoir un entraîneur bienveillant permet notamment de prévenir les blessures et de les accepter. On évite ainsi de forcer une athlète à s'entraîner alors qu'elle a le pied cassé comme cela a pu être le cas à Macolin", analyse la Genevoise.

Sarahmarchini
Gymnastique rythmique: Sarah Marchini à l'interview / RTS Sport / 30 min. / le 5 juillet 2020

Violences verbales et harcèlement psychologique

"Nous étions constamment insultées et de manière agressive... tu n'es qu'une m..., t'es grosse, tu ne sers à rien, t'es nulle, débile, t'es handicapée mentale... ", ajoute Marine Périchon. Une agressivité qui se manifeste aussi sur le plan physique avec des jets de stylos et de massues sur des athlètes.

"Lorsque j'ai décidé de quitter Macolin, j'ai transmis une lettre à la fédération dans laquelle j'ai évoqué les insultes, les conditions d'entraînement et les demandes folles faites par rapport à notre poids. Sept ans plus tard, je me rends compte que rien n'a changé", ajoute Marine.

Un reportage détaillé sur le sujet sera diffusé dans l'émission de Sport Dimanche du 5 juillet.

Iliana Dineva et Aneliya Stancheva (à droite) ont été remerciées par la fédération le 24 juin. [Urs Lindt/freshfocus - Urs Lindt]
Iliana Dineva et Aneliya Stancheva (à droite) ont été remerciées par la fédération le 24 juin. [Urs Lindt/freshfocus - Urs Lindt]

RTSsport

Publié Modifié

La Fédération suisse de gymnastique mandate une enquête externe

Dans un communiqué adressé à RTSsport, la Fédération suisse de gymnastique dit prendre très au sérieux les témoignages et accusations des gymnastes. Elle a mandaté une enquête externe.

"La Fédération suisse de gymnastique a entrepris et initié de nombreuses mesures ces deux dernières années afin d’améliorer les conditions d'entraînement et l’encadrement des athlètes de gymnastique rythmique. Il est également très important pour notre fédération que les accusations actuelles et les incidents passés soient considérés. La FSG a donc décidé de faire examiner ces accusations ainsi que les structures de la gymnastique rythmique dans le cadre d’une enquête externe".

"Compte tenu de l'enquête à venir, nous espérons que vous comprendrez que nous ne pouvons actuellement répondre favorablement à votre demande d’interview jusqu’à nouvel avis".