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Beat Forster: "J'ai la chance d'avoir mon destin entre mes mains"

Beat Forster est l'un des joueurs les plus âgés en National League. [Michaël Taillard]
Beat Forster est l'un des joueurs les plus âgés en National League. - [Michaël Taillard]
Six titres de champion de Suisse, 2 Coupes Spengler, 109 sélections en équipe nationale et plus de 1000 matches en National League. Beat Forster (39 ans) en impose non seulement sur la glace, mais aussi sur son CV. RTSsport.ch s'est entretenu avec le sympathique défenseur appenzellois du HC Bienne.

Alors que son contrat avec le club seelandais a récemment été prolongé d'une saison supplémentaire, jusqu'en 2023, Beat Forster aimerait naturellement quitter le monde du hockey professionnel sur un 7e titre. Avant de devenir entraîneur? "Peut-être, mais les places sont chères au plus haut niveau. En tout cas, cela me plairait de transmettre mon expérience", concède celui qui est déjà actif dans le mouvement juniors du HCB, en tant que coach défensif.

Le rôle de gardien n'était pas fait pour moi

Beat Forster

RTSsport.ch: En juniors à Herisau, vous avez commencé par occuper le poste de gardien. Pourquoi, par la suite, êtes-vous devenu défenseur?

BEAT FORSTER: J'ai toujours été un fervent supporter du CP Berne, et j'avais donc voulu imiter Renato Tosio. Mais après 1-2 ans, j'ai vite compris que ce rôle de portier, un peu difficile, n'était pas fait pour moi (rires). Ensuite, j'ai aussi essayé de jouer en attaque. Mais peu à peu, il m'est clairement apparu qu'évoluer en défense était ce qui me convenait le mieux.

RTSsport.ch: Dans vos jeunes années, vous étiez la "terreur" de National League. Avec le temps, vous vous êtes cependant assagi: vous écopez de moins de pénalités.

BEAT FORSTER: Cela est dû, d'une part, au fait que le jeu a énormément évolué. Certaines fautes, qui étaient auparavant sanctionnées par 2+10 minutes de pénalité, ne vous coûtent désormais plus que 2 minutes. D'autre part, je contrôle désormais mieux mon tempérament. C'est le privilège de l'âge.

RTSsport.ch: Comment vous sentez-vous physiquement? Espérez-vous jouer au-delà de 2023?

BEAT FORSTER: Je me sens en bonne forme. Mon corps n'est évidemment plus tout à fait le même qu'à mes 20 ans, mais aussi longtemps que j'aurai le niveau, je continuerai. J'ai la chance d'avoir mon destin entre mes mains.

Indrasis est un passeur de génie

Beat Forster

RTSsport.ch: Quel jugement portez-vous sur la saison 2021/22 du HC Bienne?

BEAT FORSTER: Nous ne montrons pas toujours notre meilleur visage. Nous avons connu un bon début de saison, et nous jouons grosso modo notre jeu. Mais nous devons désormais franchir un palier et nous comporter comme il se doit durant la phase décisive du championnat.

RTSsport.ch: Justement, si quelqu'un sait comment on gagne un titre, c'est vous. Votre expérience est précieuse en ce sens, dans le vestiaire.

BEAT FORSTER: Oui, mais à mon sens, parler ne sert à rien. Je préfère montrer l'exemple sur la glace. Et ce en effectuant, par exemple, des tâches ingrates.

RTSsport.ch: Le HCB a récemment engagé 2 joueurs de KHL, l'attaquant letton Miks Indrasis et le gardien russe Dmitri Shikin. Qu'apportent-ils à l'équipe?

BEAT FORSTER: Shikin est là pour soulager Joren Van Pottelberghe. Il nous a démontré son bon niveau. Quand les matches s'enchaînent, en playoffs, il est important de pouvoir compter sur un gardien remplaçant capable de gagner des matches. Quant à Indrasis, c'est un passeur de génie, qui sait organiser le jeu.

Il y a trop d'égoïsme dans le hockey professionnel

Beat Forster

RTSsport.ch: Vous conseillez et aidez volontiers les défenseurs plus jeunes que vous au sein de l'équipe. Les vétérans font-ils cette démarche dans tous les clubs?

BEAT FORSTER: Non. Vu de l'extérieur, il semble parfois que oui. Mais en réalité - et je me base sur ma propre expérience -, ce n'est pas le cas. Il y a trop d'égoïsme. Et cela pour une seule et unique raison: la peur de la concurrence. Personnellement, je n'ai jamais craint de perdre ma place en agissant de la sorte. Car en aidant les plus jeunes, je m'aide aussi moi-même. En pointant leurs erreurs du doigt, j'analyse aussi les miennes. Et cela me permet, en cherchant des solutions avec eux, d'améliorer mon propre jeu.

RTSsport.ch: Donc idéalement, les plus anciens devraient toujours épauler les plus jeunes.

BEAT FORSTER: Oui. Mon credo est que si mon partenaire défensif joue mieux parce que nous nous aidons mutuellement à progresser, cela va ensuite rejaillir sur les attaquants de notre bloc, puis sur l'équipe entière.

A Davos, Joe Thornton se mettait toujours au service de l'équipe

Beat Forster

RTSsport.ch: Quelqu'un a-t-il d'ailleurs joué ce rôle de "grand frère" dans votre carrière?

BEAT FORSTER: Kevin Miller, Patrick Fischer et Reto von Arx m'ont beaucoup entouré pendant mes premières années à Davos. Oui je sais, ce sont pourtant tous des attaquants (rires). Toujours au HCD, j'ai également beaucoup appris de Joe Thornton. Avec son statut de star en NHL, il aurait pu se la "ramener". Mais ce n'était pas le cas. C'est quelqu'un d'humain. Certes, il n'hésitait pas à être franc avec toi si tu jouais mal. Mais il se mettait toujours au service de l'équipe.

RTSsport.ch: Outre vos 6 titres de champion, on peut retenir aussi votre joli parcours en équipe nationale, qui s'est cependant déjà stoppé en 2008/09. Pourquoi si tôt?

BEAT FORSTER: Je suis très reconnaissant envers Ralph Krueger, l'ex-sélectionneur. Il avait vu mon potentiel, contrairement à d'autres personnes. Il m'avait sélectionné alors que j'étais encore très jeune, lors de ma 2e saison complète en National League. En 2009, pour le Mondial à domicile, j'étais malheureusement blessé. Puis, juste avant les JO de Vancouver 2010, alors que ma femme était enceinte de mon 2e enfant, j'ai décidé de donner la priorité à ma famille. C'est encore le cas aujourd'hui.

RTSsport.ch: Vous avez pris part à la victoire historique face au Canada lors des JO 2006. Votre meilleur souvenir international?

BEAT FORSTER: C'était grandiose, oui. D'autant plus quand on se souvient des joueurs présents. Mais la victoire contre la République tchèque était tout aussi énorme. A Turin, il y avait vraiment "la crème de la crème". Ces gros efforts étaient hélas arrivés trop tôt dans le tournoi, ce qui fait que nous avions abordé le quart de finale contre la Suède (réd: défaite 6-2) avec les batteries à plat. Alors que les grandes équipes, elles, en avaient encore sous la pédale.

Propos recueillis à Bienne par Michaël Taillard

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"En 2008, les New York Rangers se sont manifestés"

RTSsport.ch: Vous avez été repêché par Phoenix en 2001. La NHL n'a-t-elle jamais été un objectif pour vous?

BEAT FORSTER: En 2003, je suis allé au "Rookie Camp" de Phoenix. Mais on m'avait alors conseillé de retourner en Suisse, afin d'amasser davantage d'expérience, avec l'équipe nationale notamment. J'aurais ensuite voulu jouer en AHL en 2004/05, mais il n'était alors pas vraiment possible de discuter avec les clubs, en raison du "lock-out". En 2008, après ma 3e saison à Zurich, les New York Rangers avaient manifesté leur intérêt. Mais je n'ai jamais reçu d'offre concrète. Ma fille avait un an, j'ai du coup préféré la sécurité. Je ne regrette rien.

"A Berne, Ruotsalainen était incroyable"

Film préféré: Le Parrain.

Musique préférée: des chansons en suisse allemand.

Plat préféré: Tous les petits plats de ma femme.

Boisson préférée: Du vin rouge avec un bon repas, une bière avec des grillades. Ou du sirop de sureau.

Hobby: Le golf.

Lieu de vacances favori: J'ai un appartement à Grüsch, dans les Grisons. J'aime aussi Ascona, au Tessin.

Meilleur souvenir: La naissance de mes 3 enfants (2 filles et un garçon). Et quand ma femme m'a dit "oui".
Sur un un plan sportif, le titre de 2009 avec Davos. Je ne pense pas qu'une équipe s'imposera à nouveau en 21 parties de playoffs au total, comme nous l'avions fait.

Pire souvenir: Quand ma fille a dû passer 3 semaines à l'hôpital.

Si vous n'étiez pas hockeyeur: J'avais fait un apprentissage de dessinateur.

Idole d'enfance: Steve Yzerman. C'était l'un des rares joueurs de NHL que je connaissais. Avant, on ne pouvait pas suivre ce championnat aussi bien que maintenant. Sinon, comme j'étais un gros fan du CP Berne, j'admirais le défenseur finlandais Reijo Ruotsalainen. Il était incroyable.

Meilleure qualité: Ma volonté de collaborer avec les plus jeunes. D'être toujours disponible pour eux s'ils le souhaitent.

Pire défaut: Avant, c'était mon caractère. Mais pas toujours (rires). Ca ne m'inquiète plus désormais. J'essaie de me montrer sous mon meilleur jour.

Joueur le plus difficile à contrer: Jaromir Jagr. C'est dur de lui enlever le puck, car il est grand et fort. C'était le meilleur de son époque. J'ai pu m'en rendre compte aux JO 2006 et aux Mondiaux. Oui, il joue toujours, mais c'est plus facile quand tu possèdes ton propre club (réd: Kladno, en Tchéquie).

Votre départ de Zurich pour Davos en janvier 2009: Je n'étais pas content de ma situation à Zurich. Quitter le club a donc été la bonne solution. Aujourd'hui, ce type de transfert est plus courant, mais à l'époque, ce n'était pas encore entré dans les moeurs. Peu après, Zurich a gagné la Ligue des champions, sans moi. Mais je ne regrette rien, là encore.

Beat Forster en bref

Palmarès: champion de Suisse avec Davos en 2002, 2005, 2009, 2011, 2015. Champion de Suisse avec Zurich en 2008.
Vainqueur de la Coupe Spengler avec Davos en 2005 et 2012.

Six participations aux Mondiaux; quart de finaliste des JO 2006 avec l'équipe de Suisse.

Parcours pro: HC Davos (2000-2005), ZSC Lions (2005-2009), HC Davos (2009-2017), HC Bienne (2017-?).

Equipe de Suisse : 109 sélections, 17 buts et 15 assists (selon sihf.ch).

Classement Matches Diff. Buts Points
1. Zoug 52 177 : 127 100
2. Fribourg 50 159 : 124 94
3. Zurich 52 169 : 130 96
4. Rapperswil 52 164 : 135 94
5. Davos 51 148 : 125 88
6. Bienne 51 154 : 128 87
7. Lausanne 51 155 : 143 87
8. Genève 52 151 : 130 88
9. Lugano 52 160 : 158 76
10. Ambri 52 131 : 145 66
11. Berne 52 136 : 148 65
12. Langnau 50 129 : 205 35
13. Ajoie 51 89 : 224 26