"La Suisse m'impressionne, j'aime son style de jeu", affirme le Finlandais Sami Kapanen
Avant la fin des années 70, la Finlande n'était pas la superpuissance hockeyistique que l'on connaît aujourd'hui. Loin s'en faut. La route vers le succès fut d'abord semée d'embûches pour l'actuelle nation no1 du classement mondial. Il faudrait un livre entier pour raconter le chemin qui a mené cette contrée de 5,5 millions d'habitants au succès. Mais pour faire court, on dira que l'un des premiers joueurs de classe mondiale produits par le pays nordique fut sans doute Matti Hagman, engagé en 1976 par Boston en NHL.
Jari Kurri, un modèle pour tous les Finlandais
Puis, en 1980, ce dernier signa à Edmonton, en même temps qu'un certain Jari Kurri. Si Hagman, l'un des pionniers finlandais en Amérique du Nord, rentra définitivement au pays 2 ans plus tard, son disciple, lui, marqua l'histoire de la NHL à tout jamais. Et ce en remportant 5 Coupes Stanley avec les Oilers et en inscrivant 707 buts au total dans la meilleure ligue du monde.
Les éclosions à répétition de joueurs de premier plan s'enchaînèrent ensuite en Finlande, comme par miracle. Les Reijo Ruotsalainen (ex-Berne), Esa Tikkanen et autre Teemu Selänne, pour ne citer qu'eux, laissant en effet une trace indélébile dans l'histoire du hockey. Et contribuant à hisser leur équipe nationale vers les sommets.
Sami Kapanen (49 ans) fut, justement, l'un des glorieux émules de Kurri. L'ex-attaquant de Carolina a d'ailleurs été membre de la sélection qui a décroché le 1er titre mondial de la Finlande, en 1995 en Suède (au passage, son fils Kasperi, attaquant de St-Louis et des "Leijonat" (Lions), espère marcher sur ses traces cette année à Tampere).
L'ex-entraîneur du HC Lugano, qui travaille actuellement en tant que scout pour son ancienne équipe des Philadelphia Flyers, occupe également le rôle de consultant pour la chaîne de TV finlandaise "C More" pendant ce Championnat du monde.
Siegenthaler, Niederreiter et Hischier sont venus car ils ont senti que l'équipe est prête à remporter ce 1er titre
RTSsport.ch: Vous étiez, notamment aux côtés d'Antti Törmänen et de Petteri Nummelin, dans la sélection qui a ramené le 1er titre mondial en Finlande, en 1995. Un souvenir qui vous marquera assurément à jamais.
SAMI KAPANEN: C'était une première pour notre pays. C'était donc super de faire partie de cette équipe. On m'en parle encore souvent, même si la Finlande a gagné 3 titres mondiaux et une médaille d'or olympique par la suite. En Suisse, je pense d'ailleurs que les gens sont en droit de se demander si c'est l'année ou jamais pour un 1er sacre. L'équipe de Patrick Fischer m'a impressionné face au Canada. J'aime son style de jeu, celui-ci est vraiment similaire au système que j'avais l'habitude de pratiquer dans mon pays. C'est l'une de mes équipes préférées dans ce tournoi.
RTSsport.ch: Peut-on justement affirmer que l'équipe de Suisse actuelle est comparable à la Finlande de 1995?
SAMI KAPANEN: En 1994 en Italie, nous avions perdu en finale du Mondial face au Canada (réd: 2-1 aux penalties). Cet échec nous avait donc poussés à faire encore mieux l'année d'après. La Suisse, elle, n'est pas allée en finale en 2022. Mais elle a très bien joué durant la phase de poules, avant de perdre ses moyens en quarts de finale face aux Etats-Unis. L'équipe est donc restée sur sa faim et continue sur la même lancée cette année. Ce n'est pas pour rien qu'autant de Suisses de NHL comme Jonas Siegenthaler, Nino Niederreiter ou Nico Hischier sont venus à Riga: ils sentent que l'équipe est prête à remporter ce 1er titre. S'ils résistent à la pression et passent l'écueil des quarts de finale, ils seront alors très en confiance pour la suite.
Au milieu des années 90, la Suisse ne formait pas vraiment une équipe
RTSsport.ch: Vous n'avez jamais affronté la Suisse dans un grand tournoi en tant que joueur, mais uniquement lors de matches amicaux. Quelle est la différence entre la Suisse d'alors et celle de 2023?
SAMI KAPANEN: Au milieu des années 90, la Suisse possédait déjà de bonnes individualités, douées techniquement. Ces joueurs étaient capables de marquer au plus haut niveau. Mais ils ne formaient pas vraiment une équipe. On sent aujourd'hui qu'il y a vraiment eu une prise de conscience à ce niveau-là. Le but est de gagner collectivement, les statistiques personnelles passent au second plan. C'est la principale différence, à mon avis.
RTSsport.ch: Quelle est votre opinion sur le jeu proposé par Andres Ambühl et Cie?
SAMI KAPANEN: Ils gardent le contrôle du jeu la majorité du temps, en ne balançant jamais le puck au fond. Les défenseurs s'impliquent à 100% dans leur rôle. En revanche, certains joueurs ont parfois tendance à trop vouloir en faire, à l'instar de Nico Hischier face au Canada. Il a voulu épater la galerie en mettant un but entre les jambes du gardien en fin de partie. Mais il y avait mieux à faire, et cela aurait pu coûter cher, puisque les Nord-Américains sont revenus à 3-2 juste après. A voir aussi si les Suisses pourront pratiquer leur jeu de manière aussi détendue en quarts. Car dans un match à élimination directe, le contexte sera évidemment différent...
Mon meilleur souvenir en NHL? La finale perdue en 2002 avec Carolina contre Detroit
RTSsport.ch: Evoquons, pour terminer, votre carrière de joueur. Quel est votre meilleur souvenir en NHL, où vous avez patiné de 1995 à 2008?
SAMI KAPANEN: Je dirais la finale en 2002 avec Carolina contre Detroit, même si au final si nous avions perdu (réd: 4-1). Avec le recul, c'est quand même une sensation spéciale d'arriver en finale de la Coupe Stanley. L'ambiance créée par les supporters était incroyable. Les Red Wings s'appuyaient sur de nombreuses vedettes, devenues de véritables légendes du hockey. Pour moi, c'était beau à vivre. Triste aussi, car tu veux évidemment toujours gagner. Mais l'amertume fait partie du jeu. On ne peut pas remporter tous les trophées chaque année non plus...
De Riga, Michaël Taillard
"Je n'ai que du positif à dire sur le HC Lugano"
RTSsport.ch: Votre limogeage à Lugano en décembre 2019, quelques mois après votre arrivée sur le banc des Bianconeri, vous reste-t-il encore en travers de la gorge?
SAMI KAPANEN: Non, pas du tout! Mon temps passé là-bas reste un beau souvenir. C'est une grande organisation, et je n'ai que du positif à dire sur le HC Lugano. C'était un bel environnement où travailler. Bien sûr, j'aurais espéré y vivre un différent scénario. Mais est arrivé ce qui devait arriver... J'adore la ville. Je compte d'ailleurs y retourner un de ces jours pour y passer des vacances.
Sami Kapanen en bref
Né le: 14.06.1973 à Helsinki (Finlande).
Carrière de joueur: KalPa Kuopio/FIN (1990-1994), IFK Helsinki/FIN (1994-1995), Hartford/NHL (1995-1997), Carolina/NHL (1997-2003), Philadelphia/NHL (2003-2008), KalPa Kuopio/FIN (2008-2014).
Draft NHL: choix no87 au total, en 1995.
Statistiques en NHL, saison régulière: 831 matches, 189 buts, 269 assists, 458 points, 175 minutes de pénalité.
Statistiques en NHL, playoffs: 87 matches, 13 buts, 22 assists, 35 points, 22 minutes de pénalité.
Palmarès de joueur: champion du monde en 1995 avec la Finlande.
Vice-champion du monde en 1994, 1998, 2001 avec la Finlande.
Médaillé de bronze aux JO en 1994, 1998 avec la Finlande.
Finaliste en NHL en 2002 avec Carolina.
A disputé le All-Star Game de la saison 1999/2000 en NHL.
Carrière d'entraîneur: KalPa Kuopio/FIN (2017-2019), HC Lugano (2019).
Palmarès d'entraîneur: Finaliste de la Liiga en 2017 avec KalPa Kuopio.
Vainqueur de la Coupe Spengler en 2018 avec KalPa Kuopio.
Mondial à Riga (Lettonie), le programme de la Suisse
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La sélection de Patrick Fischer pour le Mondial à Riga (12-28.05)
Gardiens (3): Leonardo Genoni (Zoug), Robert Mayer (Genève), Joren Van Pottelberghe (Bienne).
Défenseurs (8): Michael Fora (Davos), Tobias Geisser (Zoug), Andrea Glauser (Lausanne), Dean Kukan (Zurich), Romain Loeffel (Berne), Christian Marti (Zurich), Janis Moser (Arizona/NHL), Jonas Siegenthaler (New Jersey/NHL)
Attaquants (14): Andres Ambühl (Davos), Christoph Bertschy (Fribourg), Enzo Corvi (Davos), Kevin Fiala (Los Angeles/NHL), Gaëtan Haas (Bienne), Fabrice Herzog (Zoug), Nico Hischier (New Jersey/NHL), Denis Malgin (Colorado/NHL), Marco Miranda (Genève), Nino Niederreiter (Winnipeg/NHL), Damien Riat (Lausanne), Tanner Richard (Genève), Sven Senteler (Zoug), Dario Simion (Zoug).