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Daniel Vukovic: "Même aujourd'hui, mon coeur reste grenat"

Daniel Vukovic a redécouvert nos images d'archives avec grand plaisir. [Raphaël Fol]
Daniel Vukovic a redécouvert nos images d'archives avec grand plaisir. - [Raphaël Fol]
Qu'est devenu Daniel Vukovic, l'ex-défenseur de GE-Servette et de Rapperswil? RTSsport.ch est allé prendre des nouvelles du Canado-Suisse à Gland (VD), sur son lieu de travail au sein d'une banque en ligne proche de l'autoroute. Retour sur la carrière du sympathique colosse de 1m90, qui co-détient le record de Coupes Spengler gagnées consécutivement (4).

Deux ans ont passé, déjà, depuis que Daniel Vukovic (37 ans) a pris sa retraite sous les couleurs de Rapperswil. Chouchou du public de GE-Servette durant ses 11 saisons en grenat de 2008 à 2019, l'ex-arrière défensif parfois rugueux, mais toujours correct, avait fait son nid dans le hockey suisse. La plupart de ses anciens adversaires, et même les arbitres, ne vous diront que du bien d'un homme qui, fait assez rare pour un Canadien anglophone (n'est-ce pas, Chris McSorley?), a fait l'effort d'apprendre la langue de Molière.

Débarqué incognito en 2008 en provenance d'une formation de NCAA, ce petit-fils, du côté maternel, d'une Genevoise, a naturellement également ravi les supporters des Vernets. Personne, parmi eux, n'a ainsi oublié sa bagarre mythique à Berne contre Caryl Neuenschwander, lors de l'acte III de la finale 2010. "Vuko", c'était un vrai guerrier.

Actuellement employé d'une banque en ligne à Gland, et accessoirement scout pour les Washington Capitals (NHL) à ses heures perdues, ce père de 3 enfants installé à Morges coule désormais des jours paisibles. Loin des projecteurs.

Les premiers mois de ma reconversion ont été un peu difficiles

Daniel Vukovic

RTSsport.ch: Comment se passe votre reconversion professionnelle?

DANIEL VUKOVIC: Les premiers mois ont été un peu difficiles. Parce que quand tu as vécu des moments où tu joues devant 15'000 spectateurs, ce n'est pas évident d'effectuer soudainement un travail de bureau, assis devant un ordinateur. Mais l'ambiance au sein de mon nouveau job est vraiment chouette. Cela a facilité la transition.

RTSsport.ch: Les hockeyeurs gagnent plutôt bien leur vie en National League. Est-il vraiment nécessaire de travailler après avoir pris sa retraite sportive?

DANIEL VUKOVIC: Oui, absolument. Ok, en 10-15 ans de carrière, tu gagnes un bon salaire. Mais ça ne te suffit pas non plus pour aller vivre à Cannes et rester à la plage le restant de tes jours (rires)! C'est clair que nous avons davantage d'épargne que les autres personnes de notre âge. Mais quand tu as toujours été un compétiteur, tu ne peux pas te contenter de rester à la maison pour jouer à des jeux vidéo. Ce n'est pas dans mon ADN...

RTSsport.ch: Vous avez raccroché en 2021, après une demi-finale avec Rapperswil et 7 buts inscrits en une saison, votre record personnel. N'était-ce pas un départ trop prématuré du monde professionnel?

DANIEL VUKOVIC: Non, je n'ai aucun regret. Cela s'est fini exactement comme je le voulais. Beaucoup de joueurs arrêtent à cause d'une blessure, ou parce que leur niveau est devenu insuffisant. Au contraire, j'ai pour ma part eu la chance d'aller en demies avec les Lakers, et de marquer 7 buts. Je n'étais pourtant pas vraiment connu pour mes talents offensifs (rires). Je sentais simplement que c'était le bon moment de quitter le hockey. D'une part car mon corps était usé, et d'autre part car je voulais passer plus de temps en famille.

Même 13 ans après, tout le monde me connaît à Genève grâce à cette bagarre en finale contre Berne

Daniel Vukovic

RTSsport.ch: Quand on vous voit, on pense immédiatement à cette bagarre mythique en 2010 à Berne contre Caryl Neuenschwander, où vous faites mine de vous laver les mains après avoir mis celui-ci à terre.

DANIEL VUKOVIC: Je n'avais rien contre lui. Mais comme le score était de 6-2 en notre défaveur lors de ce 3e acte, nous avions besoin d'émotions positives. Je n'avais jamais vu une telle ambiance dans ma vie avant ce jour-là, devant 18'000 spectateurs à Berne. Même aux Etats-Unis ou au Canada! Ma célébration après cette bagarre? J'en suis content. Aujourd'hui, même 13 après, tout le monde me connaît à Genève grâce à ça. Ce n'était pourtant pas vraiment dans mon caractère de faire ce genre de choses. Si vous regardez mes statistiques, je n'ai pas eu tellement de pénalités que ça dans ma carrière (réd: 20' en 59 matches en 2020/21, par exemple).

RTSsport.ch: Cette occasion manquée de devenir champion de Suisse vous reste-t-elle en travers de la gorge?

DANIEL VUKOVIC: Oui, dans le sens où on avait une équipe pour aller au bout. Et non, car on a tout donné. Berne avait fini la saison régulière avec 102 points, Genève avec 101. Ce n'était pas comme si Berne était une mauvaise équipe cette année-là! Les milliers de gens qui nous avaient attendu aux Vernets après le 7e match pour nous féliciter, ça reste un souvenir magnifique. C'était un moment historique pour le club, un de ceux qui l'ont fait grandir. Ce printemps, j'ai d'ailleurs célébré ce 1er titre de Genève, heureusement enfin arrivé, en tant que fan.

RTSsport.ch: Entre vous et les supporters genevois justement, l'histoire d'amour fut belle...

DANIEL VUKOVIC: Avant mon 1er match aux Vernets avec Rapperswil (réd: en 2019), je n'avais pas dormi de la nuit! C'était spécial pour moi, j'étais nerveux. Alors, quand j'ai vu le "tifo" que les supporters de GE-Servette avaient préparé pour moi, j'ai eu les larmes aux yeux. Je n'ai jamais été le joueur le plus spectaculaire, mais j'ai toujours tout donné pour ce club. Même aujourd'hui, mon coeur reste grenat.

La Coupe Spengler? Vraiment de bons souvenirs

Daniel Vukovic

RTSsport.ch: Jamais titré en National League, vous avez toutefois remporté 4 Coupes Spengler d'affilée, de 2013 à 2016. Deux avec GE-Servette d'abord, puis 2 avec le Team Canada. Un bel exploit!

DANIEL VUKOVIC: Oui, c'est super d'avoir le record du nombre de titres consécutifs (réd: selon Fredy Pargätzi, le patron de la Coupe Spengler, ce record est en fait co-détenu, notamment, par les légendaires Davosiens Bibi Torriani, Hans Cattini et Pic Cattini, vainqueurs 4 fois de rang entre 1938 et 1943). C'étaient des moments spéciaux, qui figurent parmi les plus importants de ma carrière. Car ce tournoi est connu mondialement. D'ailleurs, quand j'étais enfant, je suivais les matches au Canada. Affronter d'abord l'équipe de mon pays d'origine, puis porter ses couleurs, c'était vraiment de bons souvenirs.

Hockey: Daniel Vukovic évoque sa carrière en National League
Hockey: Daniel Vukovic évoque sa carrière en National League / RTS Sport / 6 min. / le 12 octobre 2023

Propos recueillis par Michaël Taillard, vidéo réalisée par Lionel Küng

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"J'ai le plus grand respect pour Julien Sprunger"

Votre adversaire le plus fort: Julien Sprunger. J'ai le plus grand respect pour lui, en tant que joueur et en tant qu'être humain. Il jouait dur, mais correct. Il m'a d'ailleurs tiré sur le visage lors du 1er match de ma dernière saison à Rapperswil (rires). Ce n'était pas fait exprès. C'était juste un nouvel épisode d'une longue série de batailles, après celles vécues contre Fribourg-Gottéron avec GE-Servette.

"Avant un match, je buvais minimum 8 cafés!"

Chris McSorley: Je lui dois ma venue à Genève (réd: en 2008), ainsi qu'à Hugh Quennec. Je leur en suis reconnaissant, et je suis d'ailleurs resté en contact avec eux. Chris était un coach à l'ancienne, mais j'ai beaucoup appris de lui. J'ai également énormément progressé aux côtés de défenseurs comme Goran Bezina ou Marek Malik, avec qui j'ai eu la chance d'évoluer.

Votre rituel d'avant-match: Je buvais minimum 8 cafés! C'était mon habitude, que je partageais souvent avec Samuel Friedli et Roland Gerber, d'anciens coéquipiers à GE-Servette.

"Jacquemet est un gars gentil, que tout le monde respecte"

Vos coéquipiers les plus fous: Alexandre Picard est clairement dans mon top-3. Je n'étais pas le seul à penser ça à Genève! Tanner Richard, aussi au GSHC, et Danny Kristo, à Rapperswil, complètent mon podium. Ces 3 gars ont le même caractère. Ils sont très spéciaux, mais c'est important d'avoir ce type de personnages dans un vestiaire. Ils mettent l'ambiance.

Vos coéquipiers les plus marquants: Je citerais Arnaud Jacquemet, un gars très gentil que tout le monde respecte. Sans oublier Eliot Antonietti, Jonathan Mercier ou encore Matt Lombardi (réd: tous des "ex" du GE-Servette), une belle personne. Mais je dois dire que les hockeyeurs professionnels sont en général tous de braves types.

La carrière de Daniel Vukovic en bref

Né le: 19 février 1986 à North York (Canada).

Taille / poids: 190 cm / 100 kg.

Ex-poste: défenseur.

Clubs pros: GE-Servette (2008-2019), Rapperswil Lakers (2019-2021).

Palmarès: Finaliste en National League avec GE-Servette en 2010.

Vainqueur de la Coupe Spengler en 2013, 2014 avec GE-Servette; et en 2015, 2016 avec le Team Canada.

Champion en NCAA avec Michigan State en 2007 (notamment aux côtés de l'ex-attaquant de Zoug Justin Abdelkader).