Une défaite en finale d’un Championnat du monde est toujours douloureuse, qui plus est sur un score aussi serré (2-0) après avoir tenu le 0-0 jusqu’à la 50e. Mais la déception d’être passé si proche d’un premier sacre mondial ne doit pas faire oublier qu’une médaille d’argent reste un résultat historique pour la Suisse. Elle n’est en effet que la quatrième à venir garnir son armoire à trophées après celles décrochées lors des Mondiaux 1935, 2013 et 2018. Prague 2024 restera donc indéniablement comme l’un des grands moments du hockey helvétique.
De quoi être fier malgré tout
"Pour moi, le bilan est clairement positif", affirme Félicien Du Bois, consultant et co-commentateur de l’équipe de Suisse pour RTS Sport. "J’ai eu quelques échanges avec des joueurs et leur famille, ils sont tous au fond du bac et c’est normal, mais lorsqu’ils regarderont dans le rétroviseur à tête reposée dans quelques semaines, ils auront quand même de quoi être fiers", ajoute l’ancien international (124 sélections).
Il y avait un blocage mental, c’est indéniable
L’équipe de Suisse revient en effet de loin, elle qui restait sur quatre revers consécutifs en quarts de finale. "Il y avait un blocage mental, c’est indéniable, et un pas dans la bonne direction a été fait avec tout le travail effectué en amont pour l’identifier et prendre les choses en mains", se réjouit le Chaux-de-Fonnier de 40 ans. Patrick Fischer et son staff ont notamment engagé l’automne dernier Stefan Schwitter, un préparateur physique capable de travailler également sur l’aspect mental, afin de renforcer la gestion des émotions et d’aider les joueurs à rester dans leur match malgré la pression du moment.
Un état d'esprit irréprochable
Coïncidence ou non, les Helvètes ont fait preuve d’une rigueur défensive à toute épreuve impliquant tous les joueurs présents sur la glace. Elle a parfaitement fonctionné, puisqu’ils n’ont concédé que deux buts en égalité numérique sur leurs huit dernières rencontres. "Pour moi, la grande satisfaction, c’est cette capacité à très bien défendre. Quand on voit le talent qu’ils ont affronté, réussir à tenir ce système sur 90-95% des matches, c’est vraiment positif", apprécie Félicien Du Bois, qui souligne aussi les excellentes performances des gardiens Leonardo Genoni et Akira Schmid.
Il faut tirer un coup de chapeau à Josi, Hischier, Fiala et Genoni, qui ont porté l'équipe
La Suisse a aussi brillé par son état d’esprit et son sens du collectif. Tout le monde a tiré à la même corde et a donné l’impression d’être en mission, comme en témoignent les nombreux tirs bloqués et sauvetages rocambolesques devant les filets tout au long du tournoi. "L’équipe a été emmenée par de grands leaders. Il faut tirer un coup de chapeau à Roman Josi, Nico Hischier, Kevin Fiala et Leonardo Genoni, qui ont porté l’équipe", salue l’ancien défenseur d’Ambri.
Mieux diluer les responsabilités?
Certains de ces leaders ont peut-être aussi été surutilisés en fin de tournoi et leur fatigue s’est ressentie durant la finale. La grosse bataille de samedi soir contre le Canada a laissé des traces. "J’ai l’impression que dimanche, les Suisses auraient voulu attaquer un peu plus, mais ils étaient juste fatigués. L’étape supplémentaire dans le futur serait d’avoir des locomotives, mais de ne pas avoir besoin de les forcer dès la première phase", analyse l’actuel entraîneur des M20 du HC Davos.
Le staff n'a jamais trouvé une place pour Philipp Kurashev dans ce tournoi
Une piste d’amélioration qui concerne notamment un certain Philipp Kurashev, qui sort de sa meilleure saison de NHL avec Chicago (54 points en 75 matches), mais qui s’est retrouvé surnuméraire en fin de tournoi. Ce n’est pourtant pas faute de lui avoir offert sa chance, à la fois sur la deuxième ligne et en power-play, sans que le Bernois de 24 ans ne la saisisse. "Le staff technique n’a jamais trouvé une place pour lui dans ce tournoi et il y a quelques regrets à avoir. La Suisse n’a pas 25 attaquants de NHL à disposition, donc les quelques-uns qui sont là, il faudrait pouvoir en profiter", reconnait Félicien Du Bois.
Le sentiment qui prédomine au moment de refermer le chapitre du Mondial 2024 reste celui d’une belle épopée forte en émotions qui a "réconcilié" la Suisse avec sa sélection nationale. En cela, cette médaille d’argent à deux ans d’accueillir le tournoi planétaire à Zurich et Fribourg constitue à la fois une promesse pour l’avenir et un exemple dont il faudra s’inspirer pour rééditer la performance réussie par la Tchéquie à domicile cette année.
Bastien Trottet - @BastienTrottet
La position de Patrick Fischer renforcée
Le moment-clé pour l’équipe de Suisse s’est déroulé le lundi 13 mai, lorsque Kevin Fiala, tout jeune papa, a annoncé qu’il rejoignait la sélection helvétique. Choix fort s’il en est, sa décision a servi d’électrochoc dans le vestiaire, tout en lui apportant un atout offensif de poids. Le Saint-Gallois de 26 ans a terminé le tournoi avec 13 points en 8 rencontres, étant logiquement désigné MVP de la compétition.
"Ce n’est pas quelque chose d’acquis qu’il saute dans l’avion quelques heures après la naissance de son enfant. C’est une part du travail de Patrick Fischer qu’il ne faut vraiment pas négliger. Il va régulièrement en Amérique du Nord, il prend le temps de parler avec ses gars et de les intégrer au projet. Il faut lui donner du crédit pour cela. Pour moi, il sort renforcé de ce tournoi", conclut Félicien Du Bois.