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Bezina: "Je suis revenu aux bases du hockey"

Goran Bezina renaît à 36 ans dans un environnement qui lui rappelle son enfance à Split. [Sylvain Bolt]
Goran Bezina renaît à 36 ans dans un environnement qui lui rappelle son enfance à Split. - [Sylvain Bolt]
Dans le quatrième épisode de notre websérie en Croatie, nous vous proposons le premier volet de l'entretien que RTSsport.ch a eu avec Goran Bezina à Zagreb. Parmi de nombreux bonus en vidéo, le défenseur montheysan du Medvescak nous décrypte notamment l'énigmatique championnat russe (KHL).

Avant Goran Bezina (36 ans), quatre Helvètes seulement ont eu le courage de tenter leur chance dans l'exigeant championnat russe, la KHL.

Les gardiens Paolo Della Bella, Pauli Jaks et Martin Gerber, ou encore l'attaquant et actuel sélectionneur national Patrick Fischer ont connu des fortunes diverses, mais toutes assez brèves, dans la deuxième meilleure ligue du monde après la toute-puissante NHL.

La démarche du défenseur valaisan né à Split, qui a quitté cet été le confort de la LNA après 12 saisons à GE-Servette pour rejoindre le Medvescak, est donc audacieuse. A Zagreb, nous avons rencontré un ex-capitaine des Grenat heureux de son retour aux sources.

"Je suis fier d'affronter les meilleurs joueurs du monde"

RTSsport.ch:L'envie de jouer à Zagreb vous titillait-elle depuis longtemps?

GORAN BEZINA: Oui. Avant, j'avais déjà eu des opportunités de signer en KHL, mais j'étais sous contrat avec GE-Servette. Je m'imaginais alors mal en Russie, au milieu de nulle part. En Croatie, je suis chez moi. C'est différent. Je suivais Zagreb depuis ses débuts en KHL. Pour moi, c'était le dernier -et le bon aussi- moment d'essayer cette aventure dans la deuxième meilleure ligue du monde. Je veux prouver, à moi-même et à tous ceux qui disaient que j'étais fini, que je suis encore capable de bien jouer.

RTSsport.ch:Jusqu'ici, on peut dire que votre pari est gagné! C'est une fierté?

GORAN BEZINA: Bien sûr, je suis fier d'affronter les meilleurs joueurs du monde, et d'avoir le 6e temps de jeu le plus important de toute la KHL (réd: 24'07" en moyenne par match). Mon élection comme défenseur de la semaine le 11 septembre, je la vois comme une reconnaissance de mon travail et de ma volonté de toujours bien faire. Je ne triche jamais. J'ai travaillé fort cet été pour être au niveau. Je ne peux d'ailleurs pas me permettre de me relâcher. Car plus on vieillit, plus on a besoin de travailler pour se maintenir en forme.

Il nous manque des cannes et il n'y a pas 6 paires de patins par joueur

Goran Bezina

RTSsport.ch:En revanche, votre équipe, 11e de la Conférence Ouest, s'éloigne toujours plus des playoff...

GORAN BEZINA: Si nous pensons que nous n'avons plus aucune chance de nous qualifier, alors ça ne sert à rien de jouer la fin de la saison. Il faut que nous gardions cet objectif-là!

RTSsport.ch:Certes. Mais Zagreb, endetté, a vendu plusieurs joueurs cette saison.

GORAN BEZINA: Certains coéquipiers peinent à se motiver pour cette raison: tu te donnes à fond chaque soir, mais après le club vend les meilleurs, pour survivre. Ce n'est pas évident. Mais les problèmes d'argent font partie de la KHL. On essaie de s'isoler, de se concentrer seulement sur le hockey.

Bezina KHL Equipe
Websérie Croatie - La KHL pour les nuls par Bezina / RTS Sport Bonus / 1 min. / le 12 décembre 2016

"Je mentirais si je disais que tout est parfait"

RTSsport.ch:Vous semblez avoir embarqué sur un bateau victime d'avaries...

GORAN BEZINA: Je mentirais si je disais que tout est parfait. Ce n'est pas l'équipe la plus professionnelle dans laquelle j'ai joué. Il nous manque des cannes, chaque joueur n'a pas 6 paires de patins à disposition, et nos voyages sont moins confortables que ceux des autres équipes. Faute d'argent, on prend des vols commerciaux. Le contraste avec la Suisse, où j'ai été dans la ouate durant ces 12 dernières années, est important, c'est sûr. Mais ça ne me dérange pas. Je suis revenu aux bases du hockey, où tu te contentes de peu et où tu te concentres sur le plus important: le jeu.

RTSsport.ch:Certains de vos coéquipiers canadiens -Francis Paré et Alexandre Giroux- avec lesquels nous avons discuté ne semblent pas aussi sereins que vous.

GORAN BEZINA: J'ai besoin de peu de choses pour être comblé. Donc pour moi, cette situation est moins difficile à vivre. En plus, je suis à la maison. Les plaintes de Paré, de Giroux et de tous les autres sont légitimes. Mais moi, ça me touche moins. Bien sûr, je vois moi aussi tout ce qui ne va pas ici. Les dirigeants du club pourraient s'impliquer davantage. Mais ils font avec les moyens du bord. Ils se battent, ils veulent faire quelque chose de cette équipe. 

"Dwyer? Une relation plus ouverte qu'avec McSorley"

RTSsport.ch:Parlons de votre coach actuel, Gordie Dwyer (38 ans), avec qui vous avez joué à Springfield en AHL en 2001/2002. Vos rapports sont bien différents de ceux avec Chris McSorley à Genève.

GORAN BEZINA: Oui, c'est une relation plus simple, plus ouverte qu'avec Chris, sans conflits. On a plus ou moins le même âge, ce qui facilite les choses. Dwyer m'accorde beaucoup de confiance, il sait que je me donne toujours à fond. Quand je fais une erreur, il sait que j'en prends conscience moi-même. Il ne m'engueule donc pas. C'est cool. Si je devais revenir à Genève, je ne sais pas comment je réagirais, si je serais aussi compréhensif qu'avant et si j'arriverais à encaisser autant.

RTSsport.ch:On sent bien que Zagreb est un club qui vous tient très à coeur, malgré tous les problèmes.

GORAN BEZINA: Oui. Il y a du potentiel ici, mais beaucoup de choses restent à faire. Ce club a besoin de quelqu'un qui donnerait son temps et son expérience. Pourquoi ne pas y rester après ma carrière de joueur pour essayer de le développer? Pour coacher des jeunes, oui. Ou plutôt pour travailler dans le secteur administratif, structurel.

Je ne ferme pas la porte à un retour à GenèveGoran Bezina

RTSsport.ch:Vous seriez donc prêts à rester au Medvescak? Même s'il se fait éjecter de la KHL, comme on peut s'y attendre?

GORAN BEZINA:Il est trop tôt pour en parler. Tout dépend de l'avenir du club. Mon contrat court jusqu'en 2018. J'ai donc quatre options pour la saison prochaine: soit je reste à Zagreb en KHL, soit l'équipe reste en KHL mais déménage à Londres, soit je reste à Zagreb qui retourne dans la ligue autrichienne (réd: le Medvescak l'a quittée en 2013), soit je reviens en Suisse. Je ne ferme pas la porte à un retour à Genève, c'est certain. 

Bezina KHL Avenir
Websérie Croatie - Quel avenir pour Zagreb en KHL? / RTS Sport Bonus / 1 min. / le 12 décembre 2016

RTSsport.ch:Pour conclure ce premier volet de votre interview, évoquons à présent l'équipe de Suisse. Vous espérez encore y honorer une 178e sélection?

GORAN BEZINA: Ca n'a rien à voir avec l'espoir! L'envie est encore là. Certains ont pris leur retraite internationale à 28 ans. Pas moi. Je renoncerai à l'équipe nationale le jour où je raccrocherai. Quand tu as la chance de représenter ton pays, que ce soit à 15 ans, à 30 ans ou à 40 ans, tu saisis cette opportunité-là. Avec Patrick Fischer, on s'entendait bien quand on jouait ensemble en sélection. Mais il est maintenant à un poste où il devrait se justifier s'il me convoque et que je joue mal.

Bezina évoque son souvenir des JO de Turin 2006

Bezina JO
Websérie Croatie - Bezina et les JO de Turin 2006 / RTS Sport Bonus / 1 min. / le 12 décembre 2016

Propos recueillis à Zagreb par Michaël Taillard (@MichaelTaillard)

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Vendredi 16 décembre: épisode 5, interview de Goran Bezina (2e partie).

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