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Andreas Küttel en mal de consécration

"Andi" Küttel, un sauteur au talent et au rire énormes
"Andi" Küttel, un sauteur au talent et au rire énormes
Andreas Küttel veut frapper un grand coup lors des Mondiaux de vol à skis le week-end prochain. Pour enfin s'adjuger un titre majeur et sortir de l'ombre de Simon Ammann.

A l'évocation du saut à skis suisse, peu de gens citeraient le
nom d'Andreas Küttel en premier. Le Schwytzois de 29 ans évolue
souvent dans l'ombre de Simon Ammann et ses 3 titres (deux
médailles d'or aux Jeux Olympiques, une en Championnat du monde).
Pourtant, le natif d'Einsiedeln, actuel 7e du général de la Coupe
du monde, est le meilleur sauteur helvétique cette saison. Le doyen
de l'équipe nationale est même le seul de nos représentants à avoir
gagné un concours en 2007/2008, qui plus est "sur ses terres", à
Engelberg. "Andi" (5 victoires, 14 podiums en Coupe du monde) a
peut-être besoin d'une médaille dans une compétition majeure pour
obtenir la reconnaissance qu'il mérite. Interview.



TXT: - Votre saison a mal commencé. Comment
expliquer votre déclic aux concours d'Engelberg ? (ndlr: 7e
rang/victoire)




ANDREAS KÜTTEL: J'ai fait beaucoup de retouches
pendant l'été au niveau du matériel et de la technique. J'ai changé
de chaussures et j'ai aussi modifié ma position au décollage. Ces
améliorations ont pris du temps à porter leurs fruits. En décembre,
j'ai enfin trouvé les bons réglages et j'étais prêt pour mon
premier "highlight". C'est important pour un vétéran de la Coupe du
monde comme moi (ndlr: débuts en 93/94) d'être toujours ouvert au
progrès. Si je n'étais pas prêt à évoluer, je ferais mieux de
prendre ma retraite.

"J'ai été le premier à battre Morgenstern cette saison"

- En décrochant le premier succès suisse à Engelberg en 34
concours, vous avez dû ressentir une immense fierté?




ANDREAS KÜTTEL: A chaud, j'ai déclaré que mon
plus grand succès restait celui de Lillehammer en 2005, où j'avais
battu le record du tremplin. Mais cette victoire historique à
Obwald, avec un peu de recul, est superbe. J'ai été le premier à
battre Thomas Morgenstern cette saison. L'engouement des
spectateurs sur place et devant leur TV était incroyable. Il y a
quelques années, quand j'affirmais que j'étais sauteur à skis, les
gens me regardaient de travers. A présent, je suis fier de dire que
je pratique ce sport dans l'équipe nationale.



- Vous avez été dans l'ombre de Simon Ammann jusqu'en
2003/2004, où vous avez décroché votre premier podium. Comment sont
vos relations avec lui?




ANDREAS KÜTTEL: Elles sont très intensives. On
est presque toujours côte à côte. Nous nous entraînons ensemble à
Einsiedeln, on sort même ensemble. En voyage à l'étranger, on
partage la même chambre. Il y a un immense respect entre nous. Nous
sommes de bons amis. Bien sûr, lors d'un concours, j'ai envie de
battre non seulement les autres, mais aussi Simon. On discute aussi
beaucoup pour faire des progrès à tous les niveaux. Je pense que
nous avons largement contribué à rendre le saut à skis plus
professionnel en Suisse.

"Il me reste encore 2 à 3 ans de carrière"

- Les Mondiaux de vol à skis
d'Oberstdorf (22-24.02) approchent. Votre objectif
?



ANDREAS KÜTTEL:

Le titre! A la fin de la saison
dernière, à Planica, j'ai regardé le tremplin un jour après la fin
du concours, et j'ai réalisé que je pratiquais le plus beau sport
du monde, le vol à skis. Il me reste encore 2 à 3 ans de carrière,
et il me tient à coeur de prouver que je suis un bon sauteur.



- Vous n'êtes pourtant pas encore monté sur le podium en vol à
skis. (ndlr: 4e en Coupe du monde à Planica en 2006 et 6e aux
Mondiaux de Kulm en 2006 comme hauts faits
)



ANDREAS KÜTTEL:

Personne ne peut me dicter mes
rêves. Et je rêve du titre.

"Celui qui décroche le titre en vol à skis est le roi"

- Le prestige d'un titre en vol à skis (ndlr: sauts au-delà
de 200m) vaut-il celui d'un titre en saut?




ANDREAS KÜTTEL: Pour le public et pour les
journalistes, le titre en saut est plus important (rires). Surtout
après le sacre obtenu par Simon Ammann aux Mondiaux 2007 à Sapporo.
Mais pour nous les sauteurs, c'est l'inverse. Celui qui décroche le
titre mondial en vol à skis est le roi. Pour gagner, il faut être
le meilleur sur 4 sauts, pas seulement sur 2. Le facteur chance est
absent. Le respect gagné auprès des autres concurrents est plus
conséquent. C'est pour ça que je veux gagner en Allemagne.



- Songez-vous déjà aux JO de Vancouver 2010 (ndlr: 6e en 2002,
5e en 2006)?




ANDREAS KÜTTEL: Je commence gentiment à y penser.
Ma préparation débutera déjà ce printemps. Avec l'équipe, on
projette de visiter la ville et le tremplin cet été, afin de
préparer le terrain. J'ai le potentiel pour une médaille.



- Vous est-il possible de décrire votre sensation lors d'un
saut?




ANDREAS KÜTTEL: Oui, mais je ne vous dirai rien.
C'est exclusivement réservé aux sauteurs (rires)!



- Que ferez-vous après le saut?



ANDREAS KÜTTEL: Je resterai dans le sport, mais
pas forcément comme coach. Je me vois mal quitter ce milieu, c'est
ma vie.



TXT/Propos recueillis par Michaël Taillard

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"Il faudrait 10 fois plus de juniors!"

- Il y a 2 ans, vous avez dit que le futur du saut suisse ne serait pas rose. Etes-vous toujours de cet avis?

ANDREAS KÜTTEL: Oui. Il n'y a pas beaucoup de juniors, il en faudrait 10 fois plus! Au printemps et durant l'été, je participe à des actions afin de promouvoir le saut. J'espère que mes résultats vont susciter des vocations.

- Les tremplins ne sont pas nombreux dans le pays, ce qui n'arrange rien...

ANDREAS KÜTTEL: C'est important qu'il y ait des petits tremplins dans toutes les régions, afin de pousser les gens à s'essayer au saut. Mais aux endroits où il n'y a pas de tradition dans ce sport, c'est difficile de l'implanter.

Andreas Küttel express

La première chose que vous faites le matin: je mange un petit déjeuner à base de "muesli".

Votre meilleur souvenir: les deux JO auxquels j'ai participé (ndlr: Salt Lake City en 2002/Turin en 2006). Ce sont à chaque fois deux semaines qui te marquent.

Votre pire souvenir: en 1993, j'ai songé à arrêter le saut après deux chutes consécutives. Je me suis cassé le nez.

Votre musique préférée: le hip hop joué avec de vrais instruments, genre "The Roots", et le jazz. J'assiste régulièrement à des concerts.

Si vous n'étiez pas sauteur: j'ai une licence de prof de sport de l'EPFZ. J'ai aussi de l'expérience dans le marketing sportif.

Le saut à skis: c'est un mélange de gym, d'athlétisme et de sport extrême.

Le dopage: dans notre sport, il ne sert pas à grand-chose. La pilule miracle pour acquérir la coordination et la technique du saut n'existe pas.

Votre salaire: il est plus élevé maintenant qu'il y a deux ans, grâce aux primes que j'ai gagnées et à mes sponsors.