Stéphane Grichting (30 ans le 30 mars) ne fait pas de bruit.
C'est dans son caractère. Toujours titulaire à Auxerre, où il
évolue depuis 2002, le Valaisan est l'un des internationaux les
plus alignés à l'étranger, au même titre que les Barnetta, Benaglio
ou Inler.
Grichting, "star" malgré lui du fameux match d'Istanbul, est
pourtant "la moins star des stars" de la Nati, même si son statut
d'éternel remplaçant a viré vers titulaire indiscutable depuis
l'arrivée d'Ottmar Hitzfeld. A quelques jours du double
affrontement décisif face à la Moldavie, Grichting s'est confié à
tsrsport.ch. Interview.
"Footballeur, c'est un beau métier quand on joue"
tsrsport.ch: Auxerre (10e) vient de gagner
2-0 à Lyon, qui semble "fatiguer". Alors, coup de barre ou fin de
cycle lyonnais?
STEPHANE GRICHTING: C'est vrai que cela fait
longtemps que nous n'avions plus été pareillement sur le devant de
la scène! Lyon est moins dominant. Les autres années, à la même
époque, cette équipe avait 5, 6, 7 ou 8 points d'avance. Elle
arrive aussi gentiment en fin de cycle, avec certains éléments qui
prennent de l'âge. En plus, ils n'ont toujours pas réussi à remplir
leur objectif en Ligue des champions...
tsrsport.ch: Et pour vous, tout se passe pour
le mieux. Vous êtes à Auxerre depuis 7 ans et vous êtes toujours
titulaire!
STEPHANE GRICHTING: Cette saison, j'ai joué tous
les matches sauf un, car j'étais suspendu... A mon âge, il est
important de pouvoir jouer. Et footballeur, c'est aussi un beau
métier quand on joue, quand il y a une finalité le week-end.
tsrsport.ch: Vous avez aussi côtoyé un sacré
personnage en la personne de Guy Roux!
STEPHANE GRICHTING: C'était plus qu'un
entraîneur. Il avait les pleins pouvoirs. C'est grâce à lui que je
suis à Auxerre. Il me dit encore souvent qu'il est très content,
qu'il savait que je réussirais. Il adore le Valais et connaissait
notre force de caractère!
"La moins star des stars"
tsrsport.ch:
Parlons de l'équipe de Suisse.
Depuis l'arrivée d'Ottmar Hitzfeld, vous êtes titulaire
indiscutable. Il dit même chercher encore la meilleure solution
pour vous épauler...
STEPHANE GRICHTING:
Il est évident que j'ai du
temps de jeu en plus que sous l'ère de Kuhn. Mais moi je n'ai pas
changé: j'essaie toujours de donner le meilleur de moi-même.
Hitzfeld est plus reconnaissant et il y a moins de passe-droits que
par le passé...
tsrsport.ch:
Vous êtes titulaire, mais vous
restez "la moins star des stars"...
STEPHANE GRICHTING:
Mais y a-t-il des stars dans
la Nati? On ne peut de toute façon pas jouer avec 11 stars... Dans
une équipe, il y a des buteurs, un no10, des latéraux, etc. Moi, je
ne suis pas beaucoup médiatisé mais ça ne me dérange pas du tout.
Je bosse de mon côté et on me laisse tranquille. Depuis mes 17 ans
et mon arrivée dans le foot, cela a toujours été comme ça.
tsrsport.ch:
Reste que depuis qu'Hitzfeld est
là, Grichting ce n'est plus seulement le gars qui a été blessé au
bas-ventre en Turquie, mais un joueur qui compte!
STEPHANE GRICHTING:
C'était le bon moment pour
qu'il arrive. Sinon j'aurais mis un terme à l'aventure, comme je
l'avais annoncé. Il a une expérience extraordinaire. Travailler
avec lui est vraiment impressionnant! J'avais déjà vécu un peu la
même chose à mon arrivée à Auxerre, en faisant la connaissance de
Guy Roux, que j'avais l'habitude de voir à la TV.
"Hitzfeld a amené davantage de rigueur"
tsrsport.ch: Et les méthodes d'Ottmar
Hitzfeld ne sont pas celles de Koebi Kuhn. Le "brassage" est devenu
plus important...
STEPHANE GRICHTING: Il a amené davantage de
rigueur. Il est aussi plus attentif aux petits détails. Et il est
vrai aussi que comme tout nouvel entraîneur, il a fait des tests.
Mais en Suisse, tu ne peux pas changer 20 éléments, mais seulement
trois ou quatre!
tsrsport.ch: Et l'année prochaine, il y a le
Mondial en Afrique du Sud...
STEPHANE GRICHTING: Assurément l'objectif de
chaque joueur. Mais rien n'est encore acquis. Nous avons réparé
notre erreur du Luxembourg et avons désormais notre destin entre
nos mains, mais il faut rester très prudent.
tsrsport.ch: L'arrivée d'Hitzfeld a-t-elle
influencé l'atmosphère dans le groupe?
STEPHANE GRICHTING: L'ambiance a toujours été
extraordinaire entre nous. On a pu lire qu'il y avait un clivage
entre Alémaniques et Romands, mais c'est faux. Nous rêvons tous de
revivre un Mondial magnifique, comme celui de 2006 en
Allemagne.
Propos recueillis par Daniel Burkhalter
"C'est le bon moment d'aller signer un dernier bon contrat"
tsrsport.ch: Vous n'avez connu que 2 clubs, Sion (96-02) et Auxerre (02-...). On peut dire que vous êtes "clubiste"...
STEPHANE GRICHTING: Oui, je le crois. Quand il y a une décision à prendre, je pèse le pour et le contre. Changer pour changer, ça ne sert à pas grand-chose.
tsrsport.ch: Vous vous imaginez donc terminer votre carrière en Bourgogne?
STEPHANE GRICHTING: Pourquoi pas? Il me reste encore un an de contrat et là nous sommes surtout concentrés sur le maintien. Mais je me dis aussi que ce serait le moment de tenter une dernière expérience. Toutefois, je ne vais pas partir pour partir. Pourquoi rejoindre un club plus huppé pour ne jouer que 5 ou 10 matches par saison? Moi, si je change, c'est pour monter d'un palier.
tsrsport.ch: Mais n'est-ce pas "dangereux", à un an de la Coupe du monde 2010?
STEPHANE GRICHTING: Il est clair que c'est un paramètre à ne pas négliger, au même titre que la famille... Il y a toutefois plusieurs signes qui disent que c'est le bon moment d'aller voir ailleurs, de signer un dernier bon contrat...
tsrsport.ch: Avec votre style de jeu, on pense à l'Allemagne, ou à l'Angleterre...
STEPHANE GRICHTING: Oui. La Premier League, c'est le plus grand championnat au monde, le rêve de tout joueur... Mais mon choix se fera avant tout par rapport à la tradition d'un club.
tsrsport.ch: Auxerre a justement beaucoup de tradition, mais reste un club moyen.
STEPHANE GRICHTING: Nous n'avons pas du tout de pression, ni un président qui est toujours collé à nos basques. Il y a quelques années, on jouait régulièrement la Champions League ou la Coupe UEFA. Aujourd'hui, on ne vise "que" le maintien. Auxerre, c'est une ville moyenne de 40'000 habitants. Nous n'avons pas beaucoup d'argent par rapport à d'autres clubs. Chez nous, on ne fait aucune folie.
Stéphane Grichting express
Première chose faite le matin: je vais réveiller mes 2 enfants et je leur prépare les tartines.
Plat préféré: je suis assez gourmand, il y en a donc beaucoup! Mais la simplicité me convient bien, comme une tranche panée avec des pâtes.
Boisson favorite: à côté de l'eau, le vin. Le plus souvent possible, mais en moins grande quantité possible (rires)!
Musique préférée: U2, Coldplay, Police.
Plus grande qualité: j'en ai tellement (rires)! La gentillesse.
Plus grand défaut: la gentillesse! Ou toujours tout remettre à plus tard...
Meilleur souvenir: la naissance de mes enfants. Plus fort qu'un beau succès.
Pire souvenir: Istanbul, bien sûr. J'y pense parfois. C'était un moment noir. Un souvenir néfaste pour tout le monde.
Si pas footballeur: j'ai fait un apprentissage de menuisier.
Votre après-carrière: retour en Valais, mais pas dans le foot. Trop fait de sacrifices durant ma carrière.
Le foot, c'est: beaucoup de sacrifices! Mais vivre de sa passion, c'est incroyable dans le monde actuel. Je ne vais pas au travail, je vais au foot...
Le dopage, c'est: il ne devrait rien avoir à faire dans le sport. Le sport, ça doit rester une passion avant d'être une compétition. Moi, je le côtoie d'assez loin. Le foot me semble assez propre, à moins que je ne sois naïf.
Votre salaire: j'ai vu un chiffre dans un quotidien romand après la défaite face au Luxembourg, mais il était faux. Mais je m'en satisfais volontiers.