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Uli Stielike-FC Sion: "laissez-moi travailler!"

Uli Stielike cherche désormais un avocat.
Uli Stielike n'accepte pas la critique de C.Constantin
Uli Stielike, entraîneur du FC Sion depuis cet été, réagit aux critiques de Christian Constantin. L'Allemand n'a pas trop apprécié les propos du président du FC Sion.

En juin dernier, Christian Constantin avait réussi un gros coup
en engageant Uli Stielike (54 ans) comme entraîneur du FC Sion. De
même qu'un joli pied de nez aux Neuchâtelois, pour qui l'Allemand,
ex-star du Real Madrid et ancien sélectionneur national, rappelle
les titres de 1987/1988.



Remis de la disparition de son fils Michael, trop tôt enlevé par
une maladie début 2008 - ce qui l'a privé de la Coupe d'Afrique des
Nations (CAN) à la tête des "Elephants" de Côte d'Ivoire - Stielike
a retrouvé de la chaleur. Celle de Valaisans passionnés.



Ce retour en Suisse, Uli Stielike l'imaginait toutefois moins...
tendu. Il nous l'a expliqué à Martigny, sur la terrasse de l'hôtel
de son président. Sans détour. Avec humilité.

"Je peine à l'accepter"

tsrsport.ch: Votre président, Christian
Constantin, ne vous a pas épargné dans une certaine presse romande,
en disant qu'il avait "une équipe de touristes, de l'entraîneur aux
joueurs"...



ULI STIELIKE: C'est la première fois en 19 ans
que quelqu'un me dit que je ne connais rien au foot! Et ça, je
peine à l'accepter. On est tous conscient qu'on est un peu en
retrait par rapport aux exigences avec notre 5e place. Mais ces
exigences, quelles sont-elles? On doit finir champion, ou dans le
top-4? Des équipes comme Bâle, GC ou Zurich ont un meilleur
contingent. Ca se voit à la qualité du jeu. Pour la 4e place, ça se
jouera entre YB, Xamax et Sion. Et pour le moment, on est
5e...



tsrsport.ch: Alors, que manque-t-il actuellement
au FC Sion?



ULI STIELIKE: Il faut mettre la qualité de notre
contingent en relation avec les exigences! Pour améliorer les
performances de l'équipe, il faut pouvoir travailler dans la
sérénité, dans une ambiance positive. Actuellement, les gars sont
extrêmement crispés, très préoccupés. Il est impossible de
s'exprimer avec joie quand on a un couteau planté dans le
dos...



tsrsport.ch: Mais vous saviez avant de venir qu'à
Sion, c'est toujours particulier...



ULI STIELIKE: Oui, bien sûr. Je connaissais les
"statistiques". Mais je suis dans le foot depuis mes 18 ans et
jamais je n'avais vécu une telle situation... A l'époque où je
jouais à Xamax, il y régnait une ambiance familiale, avec un
président "papa". On allait d'ailleurs manger chez lui avant les
matches. C'est cette unité, cette solidarité qu'il faut créer. Pour
atteindre une certaine qualité, il faut compenser par d'autres
facteurs.

"Nos supporters sont incroyables"

tsrsport.ch: Christian Constantin, seulement
président, ou alors un peu... entraîneur?



ULI STIELIKE: Jusqu'à aujourd'hui, c'est Stielike
qui a fait l'équipe. Mais l'entraîneur est là aussi des fois pour
suivre la politique du club...



tsrsport.ch: Sion va disputer un derby important
à Neuchâtel le 13 septembre. Vous le craignez, ce match?



ULI STIELIKE: Si j'avais peur, je serais un
mauvais entraîneur. C'est à moi maintenant d'entraîner avec
sérénité, de calmer les joueurs et de trouver une formule pour que
l'on joue en équipe. En plus, je n'ai jamais cassé un contrat dans
ma carrière, alors je suis tranquille (ndlr: contrat de 3 ans à
Tourbillon).



tsrsport.ch: Mais finalement, pourquoi avoir
signé à Sion alors que vous connaissiez la réputation du club avec
les coaches?



ULI STIELIKE: La force des supporters,
l'importance du club pour le Valais. Il y a des supporters qui
descendent de Saas-Fee ou de Zermatt pour venir voir le FC Sion.
Ces gens-là méritent d'être fiers de leur équipe. Ca, ça m'a
motivé. Et quand on voit que Sion, qui a fini 7e la saison passée,
avait une moyenne de 12'000 spectateurs, c'est fantastique. Nos
supporters sont incroyables, passent la semaine à confectionner des
affiches et des drapeaux. C'est juste dommage qu'on ait perdu deux
fois à domicile...

"Schällibaum m'a dit 'vas-y, fais-le!'"

tsrsport.ch:


Mais vous étiez sur le point de signer en Espagne cet été,
non?



ULI STIELIKE:

Cela n'a pas joué avec le club de
D1. J'aurais pu spéculer sur la D2, mais elle finissait le 15
juillet, soit assez tard. Entre-temps, l'offre du FC Sion est
arrivée. Marco Schällibaum, malgré son court passage à Tourbillon,
m'en a parlé positivement. "Si tu as l'occasion d'entraîner Sion,
fais-le", m'a-t il dit. Cette expérience avec le fameux public
valaisan l'avait marqué.



tsrsport.ch:

Mais à Tourbillon, le travail est
toujours un peu... risqué!



ULI STIELIKE:

Evidemment, quand tu as un
président qui est un ancien joueur, il aime parler de foot. Mais il
devrait parfois faire attention. Jusque-là, tout allait bien,
malgré certains mauvais résultats. C'est vrai qu'à Lucerne nous
avons mal joué. Mais on a quand même pris un point! Maintenant,
certains joueurs qui sont au club depuis 2-3 ans se disent: "ça y
est, c'est reparti avec ces histoires".



tsrsport.ch:

Vous regrettez d'avoir signé?



ULI STIELIKE:

Non, pas du tout. Avec la tête
froide, une planification claire et nette, et une politique tournée
vers l'avenir, il y a de belles choses à faire avec le FC Sion.

"Je ne veux pas finir avec un infarctus comme Bigon"

tsrsport.ch: Vous avez joué au Real Madrid de
1977 à 1985. A quand le retour en Espagne?



ULI STIELIKE: Pour ma famille et moi, il est déjà
établi que nous y retournerons au plus tard à la retraite. J'ai de
toute façon en tête de ne pas être au premier plan comme coach
jusqu'à 65 ans. A 60 ans, j'aimerais bien trouver un travail un peu
plus calme. Je ne veux pas finir avec un infarctus comme Bigon
maintenant! Je me donne encore 5-6 ans avant de "reculer" un peu,
comme directeur sportif ou manager peut-être. Ou pourquoi pas
simplement profiter de la vie en Espagne après mon mandat à
Sion...



tsrsport.ch: Un poste d'entraîneur au Real, qui
engage souvent ses ex-joueurs, ne vous intéresserait donc pas
forcément?



ULI STIELIKE: Je comprends qu'on puisse rêver
faire partie un jour d'une équipe comme le Real, Barça, Arsenal ou
Chelsea. Moi, j'ai déjà passé huit ans au top à Madrid, je connais.
Aujourd'hui, je n'ai plus de rêves de grandeur. Un projet comme
celui de Sion, où on se donne trois ans pour monter une équipe avec
des jeunes, c'est cela qui me fait plaisir. Ca me plaît de
construire quelque chose. Mon rêve, ce serait que les gens en
tribune ne connaissent pas l'entraîneur, mais cherchent à le
connaître parce que leur équipe pratique un bon football. Cela,
nous ne l'avons pas encore atteint à Sion, les performances n'étant
pas bonnes...



tsrsport.ch: Le 13 septembre, vous retournez à
Neuchâtel comme entraîneur, mais cette fois sur le banc
adverse...



ULI STIELIKE: Ce sera bizarre. Mais le fait que
ce n'est plus la même Maladière, ça change un peu les choses. Dans
la vieille, j'aurais pu me tromper de vestiaires. Maintenant je ne
connais plus rien du tout... Mais je garde d'excellents souvenirs
de mes neuf ans passés à Neuchâtel, de même que beaucoup de très
bons amis.

"Le gazon synthétique, c'est la mort du foot"

tsrsport.ch: Revenir un jour à NE Xamax, cela
vous semble-t-il possible?



ULI STIELIKE: Pas tant qu'on y jouera du foot en
salle en plein air! Le gazon synthétique, c'est la mort du
football. J'y suis totalement opposé. En Suisse, Young Boys et
Xamax sont avantagés par cela. Si je suis bien renseigné, YB a
gagné 17 de ses 18 matches à domicile l'an passé. Le seul perdu l'a
été sur la pelouse naturelle installée juste avant l'Euro 2008. Le
ballon et les joueurs ont un autre comportement sur synthétique. Le
risque de blessure y est aussi plus grand. Ceux qui disent que le
jeu sur synthétique se rapproche maintenant beaucoup de celui sur
herbe sont sûrement des vendeurs de synthétique! J'ai même eu des
échos de joueurs de Xamax qui voulaient quitter le club à cause de
cet élément-là...



Propos recueillis par Daniel Burkhalter

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Uli Stielike express

Votre plat favori: la goulasch.

Votre boisson préférée: depuis que je suis en Valais, je suis devenu un grand fan du vin blanc, excellent ici.

Votre lieu de vacances préféré: l'Andalousie. Mon fils aîné y habite.

Votre meilleur souvenir: la naissance de mes enfants et la finale de la Coupe du monde 1982, malgré la défaite.

Votre pire souvenir: le décès de mon fils (ndlr: en début de cette année).

Votre devise: traite ton voisin comme tu souhaiterais qu'il te traite.

Le foot, c'est: l'unité entre des gens de différentes cultures et races. La liberté d'expression sur un terrain.

Le dopage? les gens qui l'utilisent n'ont pas conscience de ce que ça peut signifier dans 10-20 ans. Tricherie vis-à-vis de ton adversaire.

Votre idole: quand j'étais gamin, c'était Uwe Seeler, capitaine de Hambourg et de la RFA dans les années 60. Comme coach, j'ai toujours admiré le travail d'Arrigo Sacchi à Milan. Il a fait jouer en équipe des individualités comme Gullit, Rijkaard ou van Basten.

Votre salaire: si ce n'était que ça, je n'aurais jamais accepté l'offre de Sion. Je gagnais bien plus en Côte d'Ivoire. Mais un travail, c'est une ambition et un défi avant l'argent.

Votre prochain rêve: finir la saison avec Sion avec le sentiment du devoir accompli, et que les gens qui critiquent aujourd'hui "ferment leur g...".

Avec la Côte d'Ivoire, c'était "fabuleux"

tsrsport.ch: Ne pas avoir pu prolonger l'aventure à la tête de la Côte d'Ivoire, c'est un regret pour vous?
ULI STIELIKE: Oh oui. Etre présent à la Coupe du monde 2010 en Afrique avec une équipe africaine, cela aurait été génial. Mais à la fin de mon contrat, j'ai parlé avec le président de la Fédération ivoirienne. Je lui ai dit qu'à mon avis, il y avait deux membres du staff qui travaillaient contre l'intérêt de l'équipe. Mais comme il s'agissait de deux amis du président, il a voulu les garder, et donc changer de coach...

tsrsport.ch: Au vu des images qu'on a pu voir, il devait régner une sacrée ambiance dans cette équipe ivoirienne...
ULI STIELIKE: C'était fabuleux. Jamais je n'avais vu une équipe avec une telle joie de vivre, qui s'exprimait sur le terrain avec un tel plaisir. En dehors du terrain, c'étaient des gars très simples et sympas, même s'ils jouent dans les plus grands clubs européens.

tsrsport.ch: Entraîner des vedettes, c'est facile?
ULI STIELIKE: Oh oui, grâce aux qualités techniques incroyables des gars. Pour l'entraîneur, c'est plus facile de faire passer son message. La qualité technique facilite le travail tactique. Si un joueur a un problème avec le contrôle du ballon, il devra d'abord se concentrer sur cela avant de penser à la tactique. Avec un joueur de qualité, il n'y a pas ce souci...

tsrsport.ch: Revenir au foot après le décès de votre fils en début d'année a-t-il été difficile? Vous êtes revenu vite...
ULI STIELIKE: Non, pas difficile du tout. J'en avais surtout besoin!