Olivia Nobs rêve d'or olympique en boardercross

J'adore la piste
olympique. Elle est longue, variée et technique

Olivia Nobs

La Chaux-de-Fonds:
patrie de l'horlogerie, de Le Corbusier mais aussi de la fine fleur
du snowboard... En compagnie de son amie d'enfance Mellie Francon,
Olivia Nobs (27 ans) porte haut les couleurs de la cité
neuchâteloise sur les pistes de boardercross depuis 2001.
Vice-championne du monde,cette férue de voyages doit renoncer à
l'étape américaine de la Coupe du monde (17-20.12) pour ménager un
dos meurtri par une ancienne chute. Et être au top aux JO de
Vancouver... Olivia Nobs a reçu tsrsport.ch dans sa ville "proche
de la nature" qu'elle apprécie. Ses yeux s'illuminent quand elle
évoque la piste olympique et son rêve doré.

tsrsport.ch:

Nous sommes à deux mois de la
cérémonie d'ouverture des JO de Vancouver. Vous ne pensez plus qu'à
ça?

OLIVIA NOBS:

J'essaie de ne pas trop y penser, de
ne pas me mettre une pression inutile. Mais, d'un autre côté, c'est
en y songeant et en faisant déjà la course dans ma tête que je peux
espérer un résultat. Mais c'est vrai que les décisions que je
prends maintenant sont conditionnées par cet événement.

tsrsport.ch:

Avez-vous déjà votre
billet?

OLIVIA NOBS:

Non. Nous sommes six pour quatre
places. Et, cette semaine, j'ai dû me résoudre à renoncer à la
prochaine étape de Coupe du monde aux Etats-Unis à cause de mon
dos.

tsrsport.ch:

Vous êtes inquiète?

OLIVIA NOBS:

Non. Je me suis retrouvée bloquée il
y a quelques jours et mon médecin m'a juste conseillé de renoncer à
ces nombreuses heures d'avion pour me reposer. J'ai été victime
d'une grosse chute au mois de mars et je pensais que je n'avais
plus de séquelles... Mais mon dos va déjà mieux et je vais me
concentrer sur les trois étapes de CDM en janvier pour décrocher ma
sélection.

"Parfois, j'envie le calendrier des skieurs"

tsrsport.ch:

Cinq épreuves avant les JO et huit au total dans la saison.
C'est mince...

OLIVIA NOBS:

C'est vrai. C'est beaucoup de
préparation estivale et d'entraînement quotidien pour peu de
courses. Mais ça a toujours été ainsi et il faut faire avec.
Parfois, j'envie le calendrier des skieurs, qui disputent jusqu'à
trois épreuves par week-end.

tsrsport.ch:

Vous avez terminé 11e à Turin à
l'occasion de vos premiers JO. Vous irez à Vancouver avec quels
objectifs?

OLIVIA NOBS:

Si je me qualifie, je partirai avec
de grosses ambitions, c'est clair. Je vise une médaille.

tsrsport.ch:

Au moins du même métal que celle
d'argent des derniers Mondiaux?

OLIVIA NOBS:

Euh... oui. Et même un tout petit
peu mieux (sourire).

tsrsport.ch:

Vous avez décroché la 2e place
en Coupe du monde en début d'année sur la piste olympique de
Cypress. De bon augure...

OLIVIA NOBS:

J'adore cette piste! Elle est
longue, variée et technique. Les courses ne sont pas jouées dès le
départ car il y a plein de possibilités de dépassement. En plus, le
cadre est idyllique avec la vue sur l'océan! Et l'ambiance va être
incomparable par rapport à Turin, où les snowboardeurs étaient
éloignés des autres athlètes. Au Canada, les sites sont plus
condensés et presque tout le monde logera dans le village
olympique, à 20 minutes de route de la piste de boardercross.

La magie des Jeux olympiques

Beaucoup de coaches
des autres nations aimeraient bien entraîner les Suisses

Olivia Nobs

tsrsport.ch:

Qu'y a-t-il de si particulier aux
JO par rapport aux autres compétitions?

OLIVIA NOBS:

C'est incomparable. Cela commence en
faisant sa valise. On emporte les habits de Swiss Olympic et on
réalise que l'on va davantage représenter notre nation que
d'habitude. Toute la population suisse suit nos courses, même ceux
qui ne sont pas spécialistes, grâce à la grosse couverture
médiatique. Tout y est plus grand. Et il y a la magie de la
cérémonie d'ouverture...

tsrsport.ch:

Quelle est l'ambiance qui règne
au sein de l'équipe de Suisse?

OLIVIA NOBS:

On a toujours eu une super ambiance
dans l'équipe. Que ce soit chez les filles ou chez les garçons. Il
y a plein de nations qui nous envient et beaucoup de coaches
aimeraient bien entraîner les Suisses.

tsrsport.ch:

Vous avez fêté 3 succès en CDM
en 02 et 03. Depuis, vous n'êtes plus montée sur la plus haute
marche du podium. Comment l'expliquez-vous

OLIVIA NOBS:

J'ai eu mon bac en 2001 et j'ai pris
deux ans sabbatiques pour ne faire que du snowboard. Ca a bien
marché et j'ai ensuite repris des études en parallèle. Ca m'a fait
du bien de penser à autre chose au point que je ne savais plus si
j'avais envie de continuer la compétition. Puis le boardercross est
devenu olympique et ça m'a motivée à me qualifier pour Turin. Mais,
après les JO, j'ai décidé de tout plaquer et je suis partie 15 mois
en Australie. Ensuite, mon entraîneur Jonathan Bruchez m'a
convaincue de revenir pour viser les JO de 2010. J'en ai bavé pour
retrouver mon meilleur niveau. Puis les résultats sont
revenus.

tsrsport.ch:

A 27 ans, vous imaginez
continuer jusqu'aux Jeux de Sotchi, en 2014?

OLIVIA NOBS:

Non. J'ai d'autres objectifs dans la
vie. C'est ma 8e saison et ça occupe tout mon temps. On termine la
saison fin mars et on entame la suivante en juillet, sur le
glacier. C'est difficile d'organiser une vie à côté. Je dois
souvent renoncer à des loisirs, à des vacances avec mes
proches.

Financièrement difficile

tsrsport.ch:

Peut-on vivre du
snowboard?

OLIVIA NOBS:

C'est possible mais pas évident en
Suisse. Je suis pro et je n'arrive pas à m'en sortir seule.
Aujourd'hui, j'arrive juste à couvrir mes frais personnels pour
toute la saison grâce à mes sponsors. Mais je n'arrive pas à avoir
une vie normale à côté. Je vis chez mes parents car je n'ai pas les
moyens de louer un appartement. Le boardercross commence à être
mieux médiatisé et plaît au public, mais les retombées financières
sont encore très faibles. Aux Etats-Unis, c'est différent, les gens
vous accostent et vous considèrent comme une véritable star.

tsrsport.ch:

En boardercross, tout peut
basculer en une seconde. Une faute de carre ou l'erreur d'une
adversaire et c'est terminé. C'est une sorte de loterie?

OLIVIA NOBS:

Je n'aime pas trop qu'on parle de
loterie parce que c'est quand même toujours les mêmes qui sont
devant. On s'attire la chance ou la malchance. Si on est solide et
qu'on a envie de gagner, rien ne peut nous arrêter (rires)! Bien
sûr, on peut être en super forme et commettre une faute qui nous
envoie dans les filets. Il y a une part de chance, c'est clair, car
outre la piste et vous-même, il y a un 3e élément à gérer: vos
adversaires sur le tracé.Ce qui n'est pas le cas en ski.

tsrsport.ch:

Faut-il être "méchante" et jouer
des coudes pour gagner?

OLIVIA NOBS:

J'ai l'air méchante? (ndlr: non.
vraiment pas!) Je pense qu'il faut faire preuve d'intelligence
plutôt que de méchanceté. Prendre les bonnes décisions en une
fraction de seconde et au bon moment. Doubler cette adversaire sur
la droite plutôt que sur la gauche, choisir une trajectoire plutôt
qu'une autre... Beaucoup de scénarios sont aussi étudiés à l'avance
mais il est bien sûr impossible d'imaginer toutes les situations de
course. L'expérience aide à prendre les meilleures décisions. Mais
il est évident que l'on n'est jamais à l'abri d'une faute ou d'une
kamikaze.

tsrsport.ch:

Avez-vous encore le trac dans le
portillon de départ?

OLIVIA NOBS:

Quand le travail mental est fini et
qu'on sait exactement ce qu'on va faire, il n'y a pas de raison
d'avoir peur. Une petite tension est nécessaire mais il faut
trouver la juste balance. Avant le départ, j'aime bien m'isoler,
écouter de la musique, me concentrer. Puis me mêler aux
autres.

tsrsport.ch:

C'est au tour du skicross
d'entrer aux JO. Vous avez déjà essayé?

OLIVIA NOBS:

Non, mais j'aime bien regarder.
C'est plus rapide et moins technique qu'en snowboard. Ils jouent
moins avec le terrain que nous et c'est bien moins spectaculaire à
mon goût.



Propos recueillis par Gérald Golay