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Alain Sutter, le "Beckham suisse", évoque l'équipe nationale

Alain Sutter et son épouse Melanie.
Alain Sutter et son épouse Melanie.
International à 62 reprises, Alain Sutter a marqué de son empreinte le football helvétique des années 90. Figure de proue de la sélection lors de la Coupe du monde 1994, le Bernois de 42 ans revient sur sa carrière, qui l'a mené en Allemagne et aux Etats-Unis, et porte un regard sur l'équipe de Suisse actuelle.

Personne n'a oublié Alain Sutter, ce milieu offensif à la chevelure blonde, véritable artisan de la qualification de l'équipe de Suisse pour les huitièmes de finale de la World Cup 1994 aux USA. De Young Boys à Dallas, en passant par Grasshopper, Nuremberg, le Bayern Munich ou Freiburg, ce Bernois au no7 fétiche et aux centres réputés, "à la Beckham", a affolé bien des défenses. Par son style sur et en dehors des terrains, Sutter ressemblait beaucoup au "Spice Boy"...

Aujourd'hui à nouveau établi en Suisse après avoir habité à Miami et Majorque, Sutter (42 ans) est devenu conseiller du président du FC Winterthour. Mais c'est avant tout comme consultant de SF (ndlr: la télévision suisse alémanique) qu'il délivre ses précieuses analyses. A quelques jours du premier match de la Suisse au Mondial 2010, tsrsport.ch a rencontré Alain Sutter et refait sa carrière.

tsrsport.ch: Alain Sutter, si on vous dit juillet 1994, que nous répondez-vous?

ALAIN SUTTER: La Coupe du monde, évidemment. C'était un immense exploit d'y être car la Suisse n'avait plus participé à un gros tournoi depuis 28 ans! C'était donc un événement exceptionnel pour tous les Suisses, et pouvoir y prendre part en tant qu'acteur, c'était vraiment quelque chose de spécial.

"Roy Hodgson a beaucoup apporté à la Suisse"

tsrsport.ch: Depuis là, l'équipe de Suisse s'est presque toujours qualifiée pour un Mondial ou un Euro. Peut-on donc dire que 1994 a agi comme un déclic?

22 juin 94: Sutter brille de 1000 feux contre la Roumanie.
22 juin 94: Sutter brille de 1000 feux contre la Roumanie.

ALAIN SUTTER:

Oui, cela a certainement provoqué quelque chose. En fait, c'est Roy Hodgson qui avait provoqué ça. Il a beaucoup apporté à la Suisse au niveau tactique, au niveau du travail à l'entraînement, etc. A l'Association suisse de football, on a beaucoup appris de lui.

C'est même au travers de Hodgson qu'on a conçu la nouvelle philosophie de formation. C'est dès ce moment-là qu'on a commencé à travailler de manière très concentrée sur les aspects tactiques. C'est donc lui qui a donné le coup d'envoi aux succès que la Suisse du football vit aujourd'hui. Beaucoup de joueurs ont profité durant leur jeunesse de la philosophie de formation apportée par Roy Hodgson.

tsrsport.ch: Peut-on donc dire que Roy Hodgson a décomplexé le football suisse?

ALAIN SUTTER: Non, je ne pense pas. Il a fourni d'autres aspects du jeu, une qualité supplémentaire et simplement des choses auxquelles on n'aurait jamais pensé. Cela a pu développer du potentiel supplémentaire et la capacité est ainsi devenue beaucoup plus grande.

tsrsport.ch: Finalement, quel est le plus beau souvenir de la World Cup'94? Le match d'ouverture et le 1-1 contre les USA, le large succès 4-1 contre la Roumanie et le but que vous avez marqué,...?

ALAIN SUTTER: En fait, il n'y a pas de moment précis. C'est l'événement dans son ensemble, avec sa préparation, la joie d'y aller, etc. C'est depuis là qu'on s'intéresse à l'équipe suisse. Le public est toujours venu plus nombreux et l'équipe de Suisse est devenue un vrai sujet de discussion. C'était quelque chose de nouveau pour nous tous et c'est ça qui a fait de cet événement un truc spécial.

Premier Suisse à rejoindre le Bayern

tsrsport.ch: Vous veniez en plus tout juste de signer au Bayern Munich. C'était donc une période particulière pour vous...

ALAIN SUTTER: Il est vrai que tout est un peu venu ensemble. Je suis parti à l'étranger en 1993, à Nuremberg. J'ai ensuite réussi d'excellentes performances au printemps, ce qui m'a permis de signer au Bayern, point fort de ma carrière. J'étais le premier Suisse à rejoindre ce club mythique. Et tout ça juste avant la Coupe du monde aux USA!

7 décembre 94: sous les couleurs du Bayern de Munich.
7 décembre 94: sous les couleurs du Bayern de Munich.

tsrsport.ch:

Mais au Bayern, ça n'a pas très bien marché, vous avez assez peu joué. Aujourd'hui, éprouvez-vous des regrets?

ALAIN SUTTER: Non, je ne suis pas du tout déçu, même si d'aucuns ont pensé que cela n'avait pas marché sportivement. Pour moi qui était là-bas, c'était une période fantastique, j'ai pu beaucoup apprendre. J'ai quand même pu jouer dans un club réputé. Après, il y a sûrement plusieurs raisons pour expliquer que cela n'a pas marché, mais le plus important pour moi est que je me sentais parfaitement bien au Bayern à cette époque et ai beaucoup appris.

tsrsport.ch: Après le Bayern, vous êtes parti à Freiburg puis au Dallas Burn. On a l'impression que votre carrière aurait pu être plus belle encore, non?

ALAIN SUTTER: Je pense avoir eu une belle carrière et ai pu vivre beaucoup de belles choses dans des clubs et des pays différents. J'ai aussi pris part à une Coupe du monde. Pour un joueur suisse, à l'époque, c'était quand même assez exceptionnel. Après, j'ai toujours pris comme compliment qu'on me dise que j'aurais pu faire encore mieux. Mais pour y parvenir, il n'y a pas forcément que les qualités footballistiques qui comptent.

Pour moi, c'était avant tout une belle école de vie. J'ai d'ailleurs toujours envisagé ma carrière sous cet aspect-là: que puis-je apprendre de nouveau, qu'est-ce qui pourrait changer ma vie? J'ai ainsi pu remplir un gros sac avec plein de belles expériences de vie. Et c'est pour cela que je suis heureux. Dans ma carrière, j'aurai toujours suivi mon propre chemin. Mes décisions, je les ai prises moi-mêmes et ai toujours été convaincu à 100%.

J'ai toujours eu besoin de sentir le soutien des supporters

tsrsport.ch: Donc vous ne changeriez rien?

ALAIN SUTTER: Si, bien sûr. Avec l'expérience d'aujourd'hui, ce serait grave si je ne changeais pas tout! Mais je ne serais pas honnête avec moi-même si je pensais de la sorte. L'expérience que j'ai aujourd'hui, je l'ai grâce à ce que j'ai fait dans le passé.

tsrsport.ch: Le fait d'avoir été écarté de l'Euro 1996 en Angleterre par Arthur Jorge, c'est un gros regret?

Alain Sutter était vraiment apprécié par les supporters.
Alain Sutter était vraiment apprécié par les supporters.

ALAIN SUTTER:

Non, pas du tout. De l'extérieur, beaucoup avaient pensé que c'était la fin du monde pour moi, mais pas du tout. J'étais dans une phase où j'étais presque heureux de ne pas y être. J'étais mieux en vacances 3 semaines avec mon épouse que 3 semaines sur le banc à l'Euro.

L'entraîneur recherchait un autre type de footballeur, et selon moi, ne misait pas beaucoup sur le beau jeu. Il était d'avis que je ne pouvais pas l'aider. C'était donc mieux pour moi, sous ces conditions, de ne pas être de l'aventure. A l'époque, je n'étais plus non plus un jeune qui se réjouissait de prendre part à une grosse compétition. Pour moi, y être, aurait impliqué que je joue. Le coach doit prendre des décisions. Celle-ci n'était pas dirigée contre moi, mais contre le style de joueur que j'étais. Je n'entrais pas dans sa philosophie de jeu, c'est tout. Moi j'ai accepté ça dès le début.

tsrsport.ch: On a l'impression qu'en 1994, l'équipe de Suisse, c'était une grande famille. Et depuis, plus vraiment...

ALAIN SUTTER: Il faut dire que tout l'entourage a bien évolué. A l'époque, la collaboration avec les médias était tout autre. Les entraînements étaient tous ouverts au public. On avait un contact étroit avec tout le monde. Pour nous, c'était normal à l'époque. Puis le football a évolué et c'est de nos jours normal que l'équipe ait besoin de tranquillité, de se préparer au calme. Après, il est clair qu'il manque une certaine proximité, vu de l'extérieur. Mais parfois pour les joueurs aussi, en fait.

Moi j'ai toujours eu besoin de sentir ce soutien des supporters. C'était motivant et ça contribuait à rester détendu. On avait l'impression de vivre une vie normale. Aujourd'hui, quand ils descendent du bus, tout est barricadé, il n'y a personne. Mais c'est comme ça, l'évolution du foot l'a voulu ainsi. Le foot a simplement pris une autre dimension.

Pas de Messi, Ribéry ou Ibrahimovic en Suisse

tsrsport.ch: En tant que consultant pour SF, que pensez-vous de l'équipe nationale actuelle?

Alain Sutter occupe désormais la fonction de consultant auprès de la télévision alémanique SF.
Alain Sutter occupe désormais la fonction de consultant auprès de la télévision alémanique SF.

ALAIN SUTTER:

Il ne faut pas oublier que la Suisse a participé aux 4 derniers grands tournois, ce qui ne s'était jamais fait. Ce que ces gars font et ont fait pour le foot suisse est génial. Notre meilleure réputation sur la scène internationale, c'est grâce à eux.

Se qualifier pour un grand tournoi, c'est un exploit pour l'équipe de Suisse, il ne faut pas l'oublier. Maintenant, au travers de ces succès, l'attente a aussi grandi. On attend qu'elle passe au moins le premier tour en Afrique du Sud. Il faut rester réaliste. On n'appartient pas aux grandes nations présentes au Mondial 2010.

Au niveau de la qualité, on a les possibilités pour passer le 1er tour. Mais les autres équipes du groupe aussi. Les Espagnols nous sont clairement supérieurs, mais le Chili et le Honduras bataillent dans la même catégorie que nous. Nous pouvons les battre, et pouvons être battus. Tout dépendra de la forme du jour.

tsrsport.ch: Nos joueurs évoluent presque tous à l'étranger. Pourquoi ne pourrions-nous pas être un peu plus ambitieux?

ALAIN SUTTER: Il manque de la qualité. Nous n'avons pas de Messi, de Robben, de Ribéry ou d'Ibrahimovic! Tous sont à l'étranger, oui, mais peu sont des top stars ou des leaders dans leurs clubs. Ils ne sont "que" membres d'une équipe. Pas moins bons ni plus forts.

Les autres nations ont des top stars, c'est là la différence! Ce n'est pas non plus un problème de génération. Nous n'en avons jamais eus! Nous sommes un petit pays, et même pas une nation du football. Le ballon rond n'a pas la même portée chez nous qu'en Afrique ou en Amérique du Sud. Peut-être qu'un jour la Suisse ne se qualifiera pas, et ce ne sera pas la fin du monde. Ce n'est pas forcément normal que notre équipe nationale se qualifie toujours pour les gros événements.

Propos recueillis par Daniel Burkhalter

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Alain Sutter express

PREMIERE CHOSE FAITE AU REVEIL:
je fais quelques étirements.

BOISSON PREFEREE:
De l'eau.

PERSONNE LA PLUS CONNUE DE VOTRE REPERTOIRE DU TELEPHONE:
Ma femme!

MEILLEUR SOUVENIR:
Ce serait tragique s'il n'y en avait qu'un, non?

PIRE SOUVENIR:
Chaque chose qui est arrivée dans ma vie appartient à celle-ci

ALAIN SUTTER, NOTRE BECKHAM A NOUS?
Pas mal comme comparaison, non?