La F1 est un sport qui dépend beaucoup du matériel. Il n'y a donc pas de temps à perdre pour les pilotes. Il s'agit de tester les éventuelles nouvelles pièces arrivées entre deux Grands Prix et d'assimiler un maximum d'éléments pour être prêt samedi et surtout dimanche. Comme pour le Grand Prix d'Australie, d'où il a ramené 4 points très encourageants, Sébastien Buemi est arrivé en Malaisie une semaine avant l'épreuve.
Entre le briefing du jeudi - durant lequel le Vaudois et son coéquipier Jaime Alguersuari ont évoqué avec le chef d'équipe Toro leur accrochage en Australie - et les différents essais, chaque minute est précieuse. "Ceci implique que chaque fois que l’on est installé dans la voiture, il faut réussir à comprendre au maximum la réaction de la voiture, des pneus, du moteur…", explique l'Aiglon de 22 ans
Avant le coup d'envoi de la saison, Sébastien Buemi avait notamment évoqué à tsrsport.ch les notions de gestion du temps et de l'effort.
"Sur le circuit, c'est chacun pour soi"
tsrsport.ch: Est-il possible d’avoir des amis en F1?
SEBASTIEN BUEMI: C’est comme dans la vraie vie, en fin de compte. Avec certains ça croche naturellement, avec d’autres pas du tout. J’ai, par exemple, des super contacts avec David Coulthard et Sebastian Vettel.
C’est plus facile d’avoir de bons contacts avec un pilote qui n’est pas votre coéquipier. Votre coéquipier est en somme votre premier concurrent. Donc, à moins de jouer la carte de l’hypocrisie, ce n’est pas possible.
tsrsport.ch:
Donc vous ne partiriez pas en vacances avec votre coéquipier Jaime Alguersari? (ndlr: interview réalisée avant le GP d'Australie et donc avant l'accrochage entre le Vaudois et l'Espagnol)
SEBASTIEN BUEMI: Je n’ai rien contre lui mais c’est un concurrent. Je me concentre sur mon travail et lui sur le sien.
tsrsport.ch: On a l’impression, vu de l'extérieur, que les pilotes F1 jouent à fond la carte "solo"?
SEBASTIEN BUEMI: C’est vrai que sur les circuits c’est chacun pour soi, mais avec toujours à l'esprit l’objectif de faire progresser l’équipe.
"Vettel, quelqu'un de très sympa et un grand travailleur"
tsrsport.ch: Vous avez suivi la même filière que Sebastian Vettel au sein de Red Bull. Que pouvez-vous nous dire concernant le plus jeune champion du monde de l’histoire de la F1?
SEBASTIEN BUEMI:
Je le connais depuis plus de 10 ans. Sebastian est quelqu’un de très sympathique, une personne qui a gardé les pieds sur terre. En tant que pilote, c’est un grand travailleur. Il mérite tout ce qui lui arrive actuellement.
tsrsport.ch: Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans le monde de la Formule 1?
SEBASTIEN BUEMI: C’est de piloter la voiture. C’est un plaisir de pouvoir rouler avec une F1, de la pousser à la limite. C’est une voiture très légère, extrêmement réactive, qui a énormément de puissance. Freiner à 60m d’un virage, par exemple, procure des sensations incroyables… On ne peut pas reproduire cette sensation avec n’importe quelle autre voiture.
"Il y a aussi le revers de la médaille"
tsrsport.ch: Y-a-t-il d’autres éléments qui vous font aimer le métier de pilote?
SEBASTIEN BUEMI: Il y en a beaucoup. On voyage à travers le monde, on visite des pays… On roule devant des centaines de milliers de spectateurs, on fait vivre un rêve à de nombreuses personnes… Mais il y a aussi le revers de la médaille, comme dans chaque profession.
tsrsport.ch: Quel est-il justement ce revers de la médaille?
SEBASTIEN BUEMI: On n’est pratiquement jamais à la maison. Il n’y a pas de « stabilité ». Et puis, lorsque les résultats ne sont pas très positifs, il faut sans cesse devoir expliquer aux journalistes le pourquoi du comment… Ce n’est pas toujours facile mais cela fait partie intégrante de notre métier.
tsrsport.ch: La saison de F1 commence en mars et se termine en novembre. Que faites-vous une fois l’année bouclée?
SEBASTIEN BUEMI: Pour les pilotes, la saison commence en fait aux alentours du 15 janvier lorsque la nouvelle voiture arrive. On effectue déjà une grosse préparation avec l’écurie. Puis début février se déroulent les premiers essais. La saison se termine fin novembre mais on doit souvent encore participer à des événements marketing obligatoires. Donc, souvent on n’arrive au bout de la saison qu’à la mi-décembre.
tsrsport.ch: Et ensuite?
SEBASTIEN BUEMI: A partir de là, nous en profitons pour récupérer et nous reposer. Puis en janvier et février, nous effectuons la préparation physique. C’est à cette période que nous avons la vie la plus stable et que nous pouvons donc nous préparer le mieux physiquement. Une saison c’est 19 courses, cela représente 19 week-ends. Il faut être au top.
"La F1 consomme beaucoup d'énergie mentale et physique"
tsrsport.ch: Qu’en est-il de la récupération?
SEBASTIEN BUEMI: La F1 consomme beaucoup d’énergie mentale et physique. Dans le milieu, on parle de "niveau d’énergie". En général, on commence la saison à bloc et au fil des Grand Prix, l’énergie ne fait que diminuer. Une fois la saison commencée, on ne parvient plus à remettre son niveau d’énergie au niveau initial du mois de janvier.
tsrsport.ch:
Il y a donc un énorme travail de gestion de l’effort…
SEBASTIEN BUEMI: On essaie de ne pas descendre sous un certain seuil de "niveau d'énergie". Pour ce faire, il faut s’aménager des jours de récupération, d’entraînements pour ne pas perdre de la force physique. Sans oublier de manger le plus sainement possible.
tsrsport.ch: Quel est le planning de Sébastien Buemi lors d’un Grand Prix?
SEBASTIEN BUEMI: Pour les Grands Prix d’Australie et de Malaisie, par exemple, on arrive une semaine avant la course, histoire de s’acclimater et de digérer le décalage horaire. Après un long voyage, on bénéficie de 2 à 3 jours assez tranquilles, avec peu d'activités physiques. Ce n’est qu’ensuite que l’on fait 2 entraînements « cardio » et musculaires assez intensifs pour bien réveiller l’organisme et être prêt pour le week-end.
"Notre temps est minuté du jeudi au dimanche soir"
tsrsport.ch: Et une fois que les essais commencent le vendredi?
SEBASTIEN BUEMI: En F1, il y a beaucoup d’éléments à tester et à assimiler en très peu de temps. On ne peut pas se permettre de perdre ne serait-ce qu’une minute. Ceci implique que chaque fois que l’on est installé dans la voiture, il faut réussir à comprendre au maximum la réaction de la voiture, des pneus, du moteur… Si l’on ne procède pas ainsi, on ne peut pas être prêt pour la séance qualificative de samedi.
Jeudi, il y a généralement un gros briefing avec toute l’équipe Toro Rosso. Vingt-cinq ingénieurs passent en revue différents points pour être le plus prêts possible le samedi. On est véritablement dans une bulle. Notre temps est minuté. C’est un agenda de ministre du jeudi après-midi au dimanche soir.
tsrsport.ch: A combien s’élèvent vos pulsations lors d’une course?
SEBASTIEN BUEMI: Lors d’un tour de qualification, on peut atteindre 185-190 pulsations par minute. C’est quasiment le maximum. En course, la moyenne est de 160-170 pulsations pendant deux heures.
"Deux à trois jours de repos après un GP"
tsrsport.ch: Y-a-t-il des périodes d’apnée?
SEBASTIEN BUEMI: Il y a des virages où l’on prend 5 « g ». Dans ces situations, on a de la peine à respirer. On ne s’en rend pas vraiment compte, mais il y a des virages où l’on prend de l’air. On ne respire qu’en sortant de la courbe. En fin de compte, plus vous êtes entraînés, moins d’apnée vous ferez, et moins vous vous fatiguerez.
tsrsport.ch: Que faites-vous après un Grand Prix ?
SEBASTIEN BUEMI: On se repose souvent 2 à 3 jours, avant de recommencer l’entraînement physique.
Propos recueillis par Miguel Bao
Calendrier 2011/Podiums
Australie 1.Vettel 2.Hamilton 3.Petrov 8.Buemi
Malaisie 1.Vettel. 2.Button 3.Heidfeld 13.Buemi
15-17.04 Chine Shanghai
06-08.05 Turquie Istanbul
20-22.05 Espagne Catalogne
26-29.05 Monaco
10-12.06 Canada Gilles Villeneuve
24-26-06 Europe Valence
08-10.07 Grande-Bretagne Silverstone
22-24.07 Allemagne Nürburgring
29-31.07 Hongrie Hungaroring
26.28.08 Belgique Spa
09-11.09 Italie Monza
23-25.09 Singapour Singapour
07.09.10 Japon Suzuka
14-16.10 Corée du Sud
28.30.10 Inde
11-13.11 Abu Dabi Yas Marina
25-27.11 Brésil Interlagos 25-27 novembre