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Où sont les Romands en vitesse?

Reto Nydegger (au centre) est l'entraîneur des descendeurs suisses. [Anthony Anex]
Reto Nydegger (au centre) est l'entraîneur des descendeurs suisses. - [Anthony Anex]
L’équipe de Suisse masculine brille dans les disciplines de vitesse en ce début de saison avec pas moins de cinq podiums en sept courses disputées. Mais au-delà des bons résultats, c’est l’absence d’athlètes romands dans les disciplines de vitesse qui interpelle.

Car pour retrouver trace d'un Romand sur un podium de Coupe du monde, il faut remonter à 2015. Cette année-là, Didier Défago prenait la 2e place de la descente de Meribel. Mais depuis le départ à la retraite du Valaisan cette même année, aucun Romand n'a pris part à une descente en Coupe du monde. Mais où sont-ils?

"C'est une bonne question, rigole Didier Défago. Actuellement, on a quelques jeunes qui sortent, je pense à Arnaud Boisset ou à Christophe Torrent, qui reviennent de blessure. La vitesse demande des kilomètres et une plus grande patience par rapport à la technique. Aujourd'hui, il y a des gars qui tirent jusque vers 38, 39 ans. Il faut continuer à travailler et le but c'est avant tout d'avoir une équipe de Suisse".

En vitesse, il n’y a pas de Romand contrairement à la technique

Arnaud Boisset

L'année dernière, il s'en est fallu de peu pour qu'un jeune Romand ne parvienne à briser le signe indien. C'était à Wengen, à l'occasion de la descente de Lauberhorn. A 22 ans, Arnaud Boisset avait été recalé malgré de bons entraînements lors de la sélection interne. Une décision qu'il avait alors eu de la peine à digérer.

"J'avais rempli tous les critères demandés donc c'est difficile pour moi de dire ce qu'il m'a manqué pour prendre mon premier départ en Coupe du monde, regrette le jeune descendeur. J'avais battu mes concurrents au temps, mais cela n'avait pas été suffisant."

"Si l'on regarde la proportion de Romands et de Suisses allemands au sein de Swiss-Ski, elle est plus ou moins égale, mais dans les disciplines de vitesse, il n'y a pas de Romand contrairement aux disciplines techniques", poursuit Arnaud Boisset.

"D'ailleurs, on peut aussi se poser la question inverse, à savoir, pourquoi il y a davantage de Romands en slalom et c'est plus facile d’y répondre, reprend Boisset. Je pense que c'était une volonté des entraîneurs de l'époque, Steve Locher et Didier Plaschy, de créer un groupe en slalom. Les athlètes ont grandi ensemble, ont des liens très forts entre eux et se sont tirés la bourre. Je suis certain que cela aide. Il y a deux ans, j'étais encore le seul Romand en Coupe d’Europe. Quand on se retrouve ensemble à l'entraînement, on passe de bons moments et on se tire vers le haut."

Certains favorisent la technique, d’autres la vitesse

Valentin Crettaz

Valentin Crettaz, responsable du groupe masculin au CNP de Brigues abonde: "Si un entraîneur vient d'une région et connaît les athlètes depuis longtemps, il y aura une plus grande confiance qui s'installe et la possibilité derrière de faire de meilleurs résultats. Peut-être que si Patrice Morisod (ndlr: ancien entraîneur du groupe de vitesse de l'équipe de France) avait été à la place de Steve Locher, il aurait créé un groupe de descendeurs. Cela dépend aussi de la sensibilité des entraîneurs. Certains favorisent la technique, d'autres la vitesse."

La technique, justement. Pendant des années, c'est dans cette discipline que les Romands manquaient. Aujourd'hui, l'équipe est plus forte que jamais avec ses Daniel Yule, Loïc Meillard, Justin Murisier, Luca Aerni et Tanguy Nef. "A une époque, on a essayé de pallier le manque de slalomeurs, lâche Valentin Crettaz. Quand on regarde l'équipe de slalom chez les espoirs, il n'y a quasiment que des Romands. Derrière, on repart un peu sur la vitesse, on a maintenant des pistes de descente en Suisse romande (à Zinal) qu'on n'avait pas avant. C'est très intéressant."

Les Cuche, les Défago, c’étaient les arbres qui cachaient la foret

Valentin Crettaz

Car depuis les départs à la retraite de Didier Cuche et Didier Défago, la relève se fait attendre. "Les Cuche, les Défago, c'étaient les arbres qui cachaient la foret, explique l'entraîneur valaisan. On est resté avec ces deux stars romandes sur le devant de la scène. Mais le problème aussi, c'est le nombre de places limitées par nation. Et tant qu'il y aura des gars comme Feuz, Caviezel et Janka tout devant, qui bloquent l'accès aux jeunes, ce sera difficile pour eux de prendre des départs en Coupe du monde".

Un avis partagé par Arnaud Boisset: "Il y a une grande densité en Suisse. C'est un problème de riche mais il ne faudrait pas avoir une génération sacrifiée".

Et Valentin Crettaz de conclure sur une note positive: "Les Romands sont en train d'éclore. Il y a typiquement Arnaud Boisset, un des premiers espoirs qui vont arriver. Et aussi Alexis Monney, champion du monde junior de descente l'année dernière. Ils font leurs armes en Coupe d’Europe et je pense qu'on va les retrouver prochainement au plus haut niveau".

Floriane Galaud - @FlorianeGalaud

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