Volet 3 / La quête de la sécurité

Grand Format - L'évolution du matériel en ski alpin

AFP - STAFF

Introduction

Le ski, sport national en Suisse, a connu moultes évolutions au fil des années. Dans ce reportage, nous remontons le temps, de la moitié du 19e siècle à nos jours, afin de vous faire découvrir le ski alpin de hier à aujourd'hui. A travers quatre volets, nous vous proposons de revenir sur l'évolution du matériel de ski alpin. Pour ce faire, nous sommes partis à la rencontre des acteurs du Cirque blanc. Des anciens skieurs à la nouvelle génération en passant par les hommes de l'ombre qui gravitent autour des athlètes ou encore un passionné, fondateur du Musée du ski, tous évoquent le matériel et son évolution. Pour ce troisième volet, honneur aux protections comme le casque, l'airbag et les sous-vêtements anti-coupure.

Chapitre 1
Une protection pas si ancienne

KEYSTONE - STR

L'histoire du casque de ski n'est pas aussi lointaine que l'on pourrait croire. En effet, il faut attendre la multiplication des blessures liées à une vitesse sur les skis qui ne cesse de s'accroître au fil des ans pour que le monde du ski se pose la question suivante: comment réduire le risque de blessures graves en cas de chute?

Ainsi, ce n'est que dans les années 1940 qu'un premier casque voit le jour. Fait de cuir et de boudins verticaux, il n'a cependant qu'une efficacité toute relative. Novices en la matière, les acteurs du monde du ski avaient en effet repris pratiquement, si ce n'est entièrement, le modèle que les cyclistes ou même les motards portaient.

Sur l'aspect sécurité, les premiers casques étaient plus que rudimentaires. [Musée du ski]
Sur l'aspect sécurité, les premiers casques étaient plus que rudimentaires. [Musée du ski]

Le casque de ski devient rigide

Durant la Seconde Guerre mondiale, les choses s'accélèrent. Des casques en fibre de verre mêlée à des mousses plastiques déformables avec un rembourrage à l'intérieur naissent. Cependant, il faut attendre l'année 1958 pour voir des skieurs porter ce nouveau casque en compétition.

C'est, en effet, l'année où l'équipe des Etats-Unis débarque en Europe avec ses nouveaux casques. Les Européens leur réservent un accueil moqueur en raison de leur poids et de leur taille. Mais, à force de voir les accidents se multiplier et réaliser qu'un skieur a eu la vie sauve grâce à son casque, fissuré après l'impact, la protection convainc et se démocratise.

Ce n'est qu'à la fin des années 1950 que les casques deviennent rigides. [Musée du ski]
Ce n'est qu'à la fin des années 1950 que les casques deviennent rigides. [Musée du ski]

Des accidents, parfois mortels, pour prendre conscience

Une bonne nouvelle, mais au prix d'accidents parfois mortels en compétition, comme le décès de John Semmelink en 1959. Lors d'une descente, le Canadien s'écrase contre des rochers et meurt d'une grave blessure à la tête. Il n'avait que 20 ans. C'est à la suite de ce tragique événement que le port du casque devient obligatoire en descente.

Mais, malheureusement, ce casque a ses limites. En témoigne le décès lors d'un entraînement en vue de la descente des Jeux olympiques d'Innsbruck en 1964 de Ross Milne, 19 ans. L'Australien percute à plus de 96 km/h un arbre et succombe à ses blessures, notamment à la tête.

L'endroit où Ross Milne a perdu la vie lors des Jeux olympiques d'Innsbruck en 1964. [Imago]
L'endroit où Ross Milne a perdu la vie lors des Jeux olympiques d'Innsbruck en 1964. [Imago]

Des casques spécifiquement conçus pour le ski

Dans les années 1970, enfin, les fabricants décident de créer des casques non plus copiés sur ce qui se fait en moto ou en cyclisme, mais propres au ski. C'est le passage de la fibre de verre au plastique et l'introduction de l'ABS (un caoutchouc synthétique qui résiste aux changements de températures). Ces changements majeurs permettent une protection accrue, mais également une légèreté nouvelle qui amène à un casque plus stable. En effet, l'ancien modèle, plus lourd, avait tendance à tomber vers l'avant et à obstruer la vision du skieur.

Viennent ensuite, au début des années 1990, les casques actuels, composés de matériaux bien plus performants que leur ancienne version, tels que le polycarbonate, l'EPS (une mousse qui permet l'absorption et la dissipation de l'énergie sur une plus grande surface et non pas sur le seul point d'impact) ou encore d'autres composants absorbants. De plus, les casques sont aujourd'hui moulés afin de correspondre exactement à la forme du crâne du skieur.

Toutefois, malgré toutes ces améliorations, le casque reste sujet à débat quant à son degré de protection. En effet, les skieurs, qui vont de plus en plus vite, semblent avoir un temps d'avance sur la technologie protectrice du casque. Pour en savoir plus, nous nous sommes rendus en France voisine près d'Annecy chez Salomon. La marque française a accepté d'évoquer les matériaux qui le composent, entre autres, mais n'a pas souhaité s'exprimé sur la sécurité et l'efficacité des casques actuels.

>> Interview de Benjamin Raffort :

Interview de Benjamin Raffort
Ski alpin - Publié lundi à 17:36

Chapitre 2
Sous l'oeil de Laurent Donzé: l'histoire du casque

Fondateur et conservateur du Musée du ski situé au Boéchet, Laurent Donzé a amassé au fil des années une impressionnante collection d'objets retraçant l'histoire du ski alpin. Avec la passion qui le caractérise, le Jurassien retrace pour nous l'évolution du casque et évoque des pistes pour le futur.

>> Sous l'oeil de Laurent Donzé: l'évolution du casque :

Sous l'oeil de Laurent Donzé: l'évolution du casque
Ski alpin - Publié lundi à 20:10

Chapitre 3
Le casque? Peut mieux faire

A Dübendorf, lors de la remise du matériel aux skieurs suisses le 1er octobre, nous avons eu l'occasion d'interroger Arnaud Boisset, Camille Rast, Alexis Monney et Amélie Klopfenstein sur le casque. Et tous, sans exception, partagent l'avis que des améliorations pourraient être faites.

Arnaud Boisset voit, certes, des "évolution positives", mais des améliorations sont encore à faire et il attend d'être encore "un peu plus protégé", car "les blessures à la tête sont les plus graves."

Camille Rast abonde, en parlant "d'un casque qu'il faut améliorer", d'autant plus "qu'il n'a pas beaucoup évolué ces dernières années."

>> Les athlètes suisses évoquent le casque :

Les athlètes suisses évoquent le confort de la chaussure
Ski alpin - Publié lundi à 17:37

Chapitre 4
On a testé les casques

RTS

Des tests spécifiques sont menés dans les laboratoires de différentes entreprises produisant des casques de ski pour s'assurer de leur efficacité (jusqu'à les tester à différentes températures afin de s'assurer qu'ils restent optimaux en tous temps). Lors de notre visite chez Salomon, nous avons pu visiter la Tour de choc, lieu où les casques subissent divers désagréments afin d'en tester leur efficacité.

>> On a testé les casques avec Mathilde Lamaud :

On a testé les casques avec Mathilde Lamaud
Ski alpin - Publié lundi à 20:48

Chapitre 5
L'ère des airbags

Pendant plus d'un demi-siècle, la seule protection était le casque pour les athlètes. Mais, le 21e siècle voit l'apparition de l'airbag. Equipement qui ressemble à un gilet et qui sert à protéger la colonne vertébrale, le dos, le ventre, la nuque, le thorax, les pectoraux, les côtes et toutes les zones vitales de ces régions.

>> Interview de Pef Tissot co-fondateur des airbags In&Motion :

Interview de Pef Tissot co-fondateur des airbags In&Motion
Ski alpin - Publié lundi à 21:53

Rendu obligatoire au début de la saison 2024/2025 par la Fédération internationale de ski (FIS) pour les disciplines de vitesse (descente et super-G), il traduit la volonté d'améliorer les conditions de sécurité des skieurs.

Cette technologie intelligente, qui se développe depuis environ 10 ans, a la capacité de détecter les mouvements des skieurs grâce à des capteurs et ainsi s'enclencher lorsque la chute ou une perte d'équilibre survient afin de limiter l'impact du choc sur le corps.

>> L'airbag comporte un boîtier qui transmet de précieuses informations. : L'airbag comporte un boîtier qui transmet de précieuses informations. [RTS]
L'airbag comporte un boîtier qui transmet de précieuses informations. [RTS]

Sans cesse en évolution, les airbags, à l'origine bien plus lourds, se constituent de tissus très fins et nerveux dont la caractéristique est une élasticité accrue. Loin d'avoir exprimé tout son potentiel, l'airbag fait encore l'objet de recherches afin d'améliorer son efficacité, son confort et diminuer son poids.

A l'heure actuelle, le bilan des airbags n'est pas entièrement satisfaisant. Certes, il a sauvé certains athlètes de blessures lorsqu'ils ont chuté, mais, il est arrivé, comme avec Marco Odermatt lors de la descente de Bormio le 28 décembre 2024, qu'il se gonfle accidentellement car oui, mouvement fort et inhabituel il y a eu, mais celui-ci n'a pas entraîné la chute, le skieur réussissant à se rattraper.

Bormio (ITA), descente messieurs: Marco Odermatt (SUI) évite la chute in extremis
Ski alpin - Publié le 28 décembre 2024

Chapitre 6
On a testé l'airbag

RTS

>> On a testé l'airbag et ça décoiffe! :

On a testé l'airbag
Ski alpin - Publié lundi à 17:39

Chapitre 7
Les avis diffèrent parmi les athlètes

RTS

Concernant l'oeil des athlètes sur l'airbag, les avis divergent. Certains, comme les athlètes suisses rencontrés à Dübendorf, sont tout à fait satisfaits de ce nouvel équipement de sécurité, mais d'autres se montrent plus réticents. Au point d'avoir demandé une dérogation à la Fédération internationale de ski (FIS).

Dans le camp suisse, Arnaud Boisset et Alexis Monney ne voient aucun problème à cet ajout sous leur combinaison. Arnaud Boisset, qui le porte depuis la saison dernière, trouve l'airbag "important" car ça peut lui "sauver la vie". Et bien que peu séduit par l'ancien modèle, qui "était contraignant et empêchait d'être libre de ces mouvements", le Valaisan est "très content" de l'actuel. De son côté, Alexis Monney le revêt déjà depuis trois saisons, "pour la sécurité" qu'il apporte. Et, le Fribourgeois avoue même que "quand il n'a plus l'airbag sur lui en course, il sent que quelque chose lui manque".

Et, l'un de leurs entraîneurs en descente, Valentin Crettaz, trouve également que l'airbag est "une très bonne solution, car on cherche vraiment la sécurité des athlètes." D'autant plus quand on sait qu'en cas de chute c'est "une enveloppe supplémentaire" face à la neige verglacée.

Certains athlètes continuent à y être réticents

Alors que de nombreux athlètes portent l'airbag depuis des années, certains continuent à tourner le dos à cette technologie qui a prouvé son efficacité en terme de protection. Au-delà de cette peur que l'airbag s'enclenche alors qu'ils n'ont pas chuté - cas rarissimes mais existants -, il y a une défiance sur deux points: la perte de confort et une perte aérodynamique.

Alors que l'airbag s'amincit, devient de plus en plus léger et est au plus proche du corps pour éviter les frottements de l'air à chaque nouveau modèle qui sort, certains skieurs continuent de ressentir une gêne en le portant. Et, concernant l'aérodynamisme, les tests effectués en soufflerie montrent que porter l'airbag n'engendre pas une perte de vitesse sur les parties planes... mais la croyance populaire est forte.

D'autant plus que... plusieurs athlètes qui portent l'airbag se montrent toujours aussi performants, gagnent des courses et même des globes de cristaux. Mais, décidemment... les habitudes sont tenaces.

Lara Gut-Behrami réfractaire à l'idée

Mais, déjà quarante athlètes ont demandé une dérogation afin de ne pas porter l'airbag, dont seize Autrichiens. Les motifs de ces passe-droits sont nombreux. Certains trouvent qu'ils ne sont pas adaptés aux skieurs car ils ont été conçus pour les pilotes de moto, bien plus petits en taille et fins, d'autres qu'ils doivent encore être améliorés. Et parmi les réfractaires à cette nouvelle technologie on retrouve Lara Gut-Behrami. Sur le site "SkiActu.ch", la Tessinoise confie s'en passer pour le moment malgré un nouveau modèle reçu de son fournisseur Dainese. "Le souci est qu’il possède une capsule de gaz et une batterie sur le dos. Je ne me sens pas en confiance d’avoir un élément aussi dur à proximité de ma colonne vertébrale".

Quoi qu'il en soit, dès la saison 2025/2026, l'airbag sera obligatoire et les dérogations impossibles. Il reste donc un an aux athlètes qui n'en portent pas pour s'y habituer et aux développeurs de l'airbag de l'améliorer pour faire taire tout mécontentement.

>> Les athlètes suisses évoquent l'airbag :

Les athlètes suisses évoquent l'airbag
Ski alpin - Publié hier à 09:41

Chapitre 8
Ne pas revivre le drame Kilde

RTS

12 janvier 2024: Aleksander Kilde chute lors de la descente de Wengen et se blesse grièvement à un mollet que les carres de ses skis sont venus lacérer. Cet accident a poussé certains athlètes a adopter les sous-vêtements anti-coupure, capables de résister aux skis les plus affutés. Cette nouveauté sur le Cirque blanc sera rendue obligatoire dès la saison prochaine. On en parle avec Arnaud Boisset, Camille Rast, Amélie Klopfenstein, Alexis Monney et Valentin Crettaz, entraîneur des Suisses en vitesse.

>> Les athlètes suisses évoquent les sous-vêtements anti-coupure :

Les athlètes suisses évoquent les sous-vêtements anti-coupure
Ski alpin - Publié lundi à 17:38

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