La Suisse connaît enfin le successeur de Paul Accola. Son nom:
Carlo Janka. Son exploit: gagner à 23 ans le globe du classement
général, 18 ans après son aîné grison. Le phénomène d'Obersaxen
s'est offert le trophée en enlevant le géant des finales de la
Coupe du monde à Garmisch (GER).
Les spécialistes le lui prédisait, lui ne voulait pas y croire. En
remportant le dernier géant de l'hiver, "Iceman" a relégué son
dernier rival Benjamin Raich à 106 points, une avance décisive
avant le slalom de clôture de samedi.
En tête après la première manche, Janka se trouvait dans la même
situation que lors des Mondiaux 2009 et des JO 2010. Et tout comme
à Val d'Isère et à Vancouver, le Grison a tenu le choc. Avec, au
final, non plus des médailles d'or mais un globe de cristal.
"Iceman" pris par l'émotion
Habituellement très réservé dans sa façon de célébrer ses
triomphes, "Iceman" s'est montré plus démonstratif dans l'aire
d'arrivée de Garmisch, levant les bras au ciel (une chose rare chez
lui), puis se couchant dans la neige. "Il y avait beaucoup
d'attente à mon encontre avec le grand globe de cristal, a
reconnu le Grison. Et toute la pression est ressortie d'un
coup, comme une tempête".
C'est dans le crâne de Benjamin Raich que la tempête doit faire
rage. L'Autrichien reste, pour la quatrième année consécutive, le
numéro deux du ski alpin mondial. A 32 ans, le Tyrolien court
toujours après son deuxième grand globe après son sacre de 2006.
Beau joueur, il a fait remarquer que la constance avait été la clé
du succès de Janka. "Il a su aller chercher les points quand il
le fallait", a expliqué l'Autrichien.
Dix-huit ans après Accola
Cet ultime géant a aussi permis à
l'Américain Ted Ligety de rafler le globe de la spécialité.
Détenteur de ce trophée, Didier Cuche a également terminé sa saison
sur une note positive en se classant au 5e rang.
A Garmisch, Janka a rejoint au panthéon du ski alpin suisse trois
anciens vainqueurs du grand globe. Peter Lüscher l'avait remporté
en 1979 et Paul Accola l'avait décroché en 1992. Le troisième
larron, comme Janka, était également un skieur hors du commun. Le
Haut-Valaisan Pirmin Zurbriggen, avec ses quatres globes au
général, pourrait bien inspirer le Grison pour la suite d'une
carrière qu'il a commencé à écrire en lettres d'or dans le grand
livre du Cirque blanc.
LA PAROLE A CARLO JANKA
Je suis très fier de
tout ce que j'ai déjà gagné, à 23 ans.
Carlo
Janka
- Dans quel état d'esprit avez-vous
vécu l'attente entre les deux manches?
CARLO JANKA:
J'étais un peu tendu mais dans une
juste mesure. J'avais aussi des sensations positives, car je savais
que je pouvais gagner. Dix secondes avant de m'élancer, on m'a fait
comprendre que si j'arrivais premier en bas, c'était fait pour le
grand Globe. Sur cette manche, je n'ai pas poussé à fond. Il y
avait certains passages compliqués à négocier, où il fallait lever
un peu le pied. A la fin, j'ai pu mener à bien la mission.
- De quoi êtes-vous le plus fier et quelles sont vos
références du passé?
CARLO JANKA:
Je suis très fier à 23 ans d'avoir
déjà pas mal gagné: le grand Globe, une médaille d'or aux Mondiaux
il y a un an, une autre aux jeux Olympiques il y a deux semaines
(en slalom géant chaque fois). Mais, dans la compétition, il y a
toujours des choses à faire pour s'améliorer. Adolescent, mon
modèle était Hermann Maier, qui dominait alors le circuit. Avant il
y avait eu Michael von Grünigen en slalom géant. Si on me parle de
Suisses, il y a bien sûr le grand Pirmin Zurbriggen, mais je n'ai
pas connu son époque.
- Comptez-vous progresser en slalom?
CARLO JANKA:
C'est difficile pour moi car ce
n'est pas ma discipline. J'ai déjà trois spécialités fortes. Mais,
en m'accordant un délai de deux à trois ans, je vais essayer de
progresser entre les piquets serrés.
D'AUTRES DECLARATIONS EN VRAC
Didier Cuche
: C'est
incroyable ce que Carlo a réalisé. Surtout qu'aujourd'hui on a
l'impression qu'il a géré son bonus en deuxième manche et est tout
de même arrivé à aller très vite. En plus, il fête le globe avec
une victoire et la manière, c'est grandiose. C'est un grand
champion qui a des nerfs solides.
Martin Rufener
(entraîneur en chef de l'équipe de
Suisse messieurs): Ce n'est que sa deuxième saison en Coupe du
monde et Carlo Janka a encore du potentiel pour s'améliorer,
notamment dans les disciplines de vitesse. Durant ma carrière
d'entraîneur, depuis 6 ans avec l'équipe de Suisse, mais également
avant au Canada et aux Etats-Unis, je n'ai jamais rencontré un
skieur pareil, il est incroyable. Pratiquement le talent du
siècle.
Urs Lehmann
(Président de Swiss Ski): Carlo a
vraiment réalisé quelque chose de grand en gagnant ces deux courses
à Garmisch. Ce globe est aussi important pour toute l'équipe. Un
jour c'est Didier Défago qui gagne, un jour c'est encore un autre.
Le mérite revient à tout le monde, tant aux entraîneurs qu'aux
préparateurs ou aux employés administratifs de Swiss-Ski qui
oeuvrent ensemble pour que de tels exploits deviennent
possibles.
ALBRECHT RETROUVE LA LUMIERE
Daniel Albrecht (26 ans) a pris
le départ des deux manches du géant de ces finales en tant
qu'ouvreur, 414 jours après sa terrible chute à Kitzbühel. Son
retour a coïncidé, clin d'oeil du destin, avec le sacre de Carlo
Janka, son ami sur le circuit.
"J'ai vraiment eu un excellent feeling, a expliqué le
skieur de Fiesch. Retrouver la Coupe du monde et l'ambiance de
la course m'a vraiment fait plaisir".
"Janka est désormais mon modèle"
Albrecht s'est évidemment montré très content du sacre de Janka,
en ajoutant tout de même qu'il voulait aussi réussir ce que son ami
avait réalisé. "Un jour, Carlo m'avait dit que j'étais son
modèle, a rappelé le Valaisan. Aujourd'hui je peux sans
autre affirmer que les rôles sont inversés".
Janka a également reconnu que de revoir son copain sur les skis et
dans un portillon de Coupe du monde avait illuminé sa journée.
"J'ai été impressionné par le fait qu'il ait pris des risques
et par sa capacité à mettre les gaz", a commenté le nouveau
détenteur du globe du général.
agences/mor
Garmisch, finales de la Coupe du monde
Géant Messieurs
1. Carlo Janka SUI 2'20"87
2. Davide Simoncelli ITA + 0"31
3. Ted Ligety USA 0"57
. Philipp Schoerghofer AUT 0"57
5. Didier Cuche SUI 0"62
6. Kjetil Jansrud NOR 0"76
7. Alexander Ploner ITA 1"02
8. Benjamin Raich AUT 1"03
9. Ivica Kostelic CRO 1"33
10. Romed Baumann AUT 1"52
11. Michael Gufler ITA 1"59
12. Steve Missillier FRA 1"71
13. Sandro Viletta SUI 1"77
14. Manfred Moelgg ITA 2"07
15. Mathieu Faivre FRA 2"45
16. Alberto Schieppati ITA 2"66
17. Silvan Zurbriggen SUI 3"76
18. Julien Lizeroux FRA 4"78
19. Massimiliano Blardone ITA 8"32
Général de la Coupe du monde
1. CARLO JANKA SUI 1197
2. Benjamin Raich AUT 1091
3. Didier Cuche SUI 952
4. Aksel Svindal NOR 883
5. Ivica Kostelic CRO 779
6. Marcel Hirscher AUT 675
7. Ted Ligety USA 667
8. Michael Walchhofer AUT 594
9. Silvan Zurbriggen SUI 583
10. Julien Lizeroux FRA 564
11. Didier Défago SUI 527
27. Tobias Gruenenfelder SUI 247
39. Patrick Kueng SUI 196
49. Sandro Viletta SUI 153
Classement final géant (7/7)
1.Ligety 412
2.Janka 341
3.Raich 331
4.Simoncelli 311
5.Blardone 309
9.CUCHE 207
16.Viletta 84
CARLO JANKA
Né le 15 octobre 1986.
Domicile: Obersaxen (GR).
Taille/poids: 185 cm/79 kg.
Coupe du monde: 14 podiums, dont 8 victoires: 1er en géant à Garmisch (mars 2010), 1er en descente à Garmisch (mars 2010), 1er en descente à Wengen (janvier 2010), 1er en géant à Beaver Creek (décembre 2009), 1er en descente à Beaver Creek (décembre 2009), 1er en super-combiné à Beaver Creek (décembre 2009), 1er en super-combiné à Wengen (janvier 2009), 1er en géant à Val d'Isère (décembre 2008).
Globes du général en 2009/2010 et du super-combiné en 2008/2009.
JO: 1er en géant à Vancouver en 2010.
Mondiaux: 1er en géant et 3e en descente à Val d'Isère en 2009.
Mondiaux juniors: 3e en géant à St-Anne en 2006.
Les Suisses vainqueurs de la Coupe du monde
1979: Peter Lüscher
1984: Pirmin Zurbriggen
1987: Pirmin Zurbriggen
1988: Pirmin Zurbriggen
1990: Pirmin Zurbriggen
1992: Paul Accola
2010: Carlo Janka