Inéluctablement, la fin de carrière de Roger Federer ne cessait d’approcher. En dehors même du temps qui passe, les genoux qui grincent nous avaient fait comprendre que le clap se rapprochait. Il est intervenu aujourd'hui 15 septembre et même si nous avons eu le temps de nous y préparer, la nouvelle ne laisse personne insensible. Il s’agit en effet ici de l’adieu d’un géant, de l’un des plus grands sportifs de tous les temps, d’un personnage extraordinaire – dans le plus pur sens du terme –, sur les courts comme en dehors. Il est celui qui a jusqu'ici le plus marqué l'histoire du tennis. De par son style, son jeu, par ce qu'il était. Il a été le tennis.
Avec son départ à la retraite s’achève en quelque sorte une histoire de couple. Celle que chacun d’entre nous avait construite avec le Bâlois, qui avait pris l’habitude de s’inviter dans nos foyers plusieurs fois par an et en compagnie duquel nous avons partagé nos joies, nos peines et peut-être même plus encore. A partir d’aujourd’hui, plus rien ne sera jamais comme avant. Durant plus de 20 ans en effet, le Roger boutonneux au catogan, devenu l’élégant «RF», légendaire et «bankable», 2e joueur le plus titré de l’ère open, a été l’un des fils de nos vies. Revenir sur son parcours est ainsi également se rappeler une partie de notre propre chemin.
Impossible en effet de ne pas se souvenir où nous étions lors de son 1er titre majeur, en juillet 2003 à Wimbledon. Ou, moins agréable, ce que nous faisions le 14 juillet 2019 lorsqu’il lui a manqué un seul tout petit point pour enlever une 21e couronne du Grand Chelem qui aurait eu un immense retentissement. Hommage.
- Par Arnaud Cerutti -
Chapitre 1
FIN DES ANNÉES NONANTE, LA DÉCOUVERTE
Keystone - STR
Roger Federer, gamin bâlois né le 8 août 1981 à Münchenstein, les vrais passionnés suisses de tennis le découvrent en 1997/1998, par quelques échos d'abord dans la presse, à travers des articles concrets, quelques reportages, puis petit à petit en vrai, en chair et en os, depuis le bord des courts. Cette année-là, entre ses 16 et 17 ans, marque l'avènement national du futur héros mondial. Sans toutefois que quiconque ne puisse alors mesurer ce que l'ado va devenir. Oui, d'aucuns nous alertent en évoquant un potentiel hors-norme, peut-être même un futur no 1 mondial. Mais que valent ces paroles, à un âge où tout est à construire, où tout est à faire, même? Les promesses rendent les fous joyeux mais n'aboutissent pas souvent, encore moins dans ce registre.
Sauf que dans ce bras droit là se niche de l'or. Et derrière cette caboche encore un peu têtue se cache un vrai mental de champion, conforté aussi par une attitude relax, parfois passée pour désinvolte, qui participe néanmoins grandement à l’évolution du jeune homme, qui n'était pourtant pas celui-ci quelques années plus tôt à son arrivée au Centre national à Ecublens. Timoré par cette nouvelle vie dans le canton de Vaud et ses difficultés à aller vers les autres, notamment en raison de son français alors plus qu'hésitant, le jeune Bâlois, ancien ramasseur de balles aux Swiss Indoors, a versé des larmes, douté souvent de la pertinence de vivre cette vie-là, également songé à rentrer chez lui plus tôt que prévu, vers son papa Robert et sa maman Lynette, mais il n’a finalement jamais fait demi-tour. Pour mieux s’en aller (presque tout droit) vers les sommets.
Bien encadré par des personnes comme Christophe Freyss et, déjà, Pierre Paganini - plus qu’un entraîneur, un mentor, un guide -, le petit Federer a fait son chemin. Il a cassé des raquettes oui, explosé une bâche aussi, mais ces colères-là ont, elles aussi, participé à la construction du bonhomme. Sans doute fallait-il en passer par là pour évoluer. Son corps, comme son palmarès, s’est étoffé. Chez les juniors, l’année 1998 est pour l'enfant de Münchenstein celle des plus belles réussites: demi-finaliste de l’Open d’Australie, il remporte ensuite Wimbledon, déjà le tournoi de son cœur, sans égarer la moindre manche. Puis il dispute son premier match ATP à Gstaad, sur invitation (une défaite contre Lukas Arnold Ker), et gagne ses premiers points à Toulouse. Également finaliste de l’US Open junior et lauréat de l’Orange Bowl, il boucle l’exercice au 1er rang mondial junior.
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La Suisse entière commence alors à suivre de près son évolution, de sa défaite au 1er tour des Swiss Indoors 1997 contre un certain Andre Agassi à sa finale à Marseille en février 2000 contre un autre guide, Marc Rosset (2-6 6-3 7-6), au terme de laquelle le Bâlois fond en larmes, croyant avoir alors laissé passer son unique chance de remporter un tournoi ATP. L’anecdote fait bien sûr rire, aujourd’hui. Mais sur le moment, le principal intéressé est vraiment touché, triste.
Chapitre 2
L'ENTRÉE DANS LA LUMIÈRE
EPA - Gerry Penny
Pour la planète tennis, l’acte fondateur, la véritable sortie de l’ombre, est à dater du 2 juillet 2001. Hormis en dehors de la Suisse, tout ce que Roger Federer avait accompli avant cette date n’est presque qu’anecdotique aux yeux de l’amateur de la petite balle jaune; son 1er titre ATP à Milan cinq mois auparavant (en finale contre Julien Boutter), sa 4e place olympique l’année précédente ou encore ses premiers gros combats en Coupe Davis n’étaient rien à côté de cela.
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Cela? C’est ce 8e de finale magique et épique de Wimbledon, qui le voit terrasser le Maître Pete Sampras, en 5 manches, au bout d’un combat fabuleux, ponctué d’un passing de coup droit dans le brouhaha du Centre Court (7-6 5-7 6-4 6-7 7-5).
Les genoux à terre, les larmes au bord des yeux, le gamin au catogan compose là son premier morceau de bravoure, sa première symphonie. Inachevée certes, puisqu’une élimination en quarts de finale contre Tim Henman l’attend 48 heures plus tard au coin de Church Road, mais le poussin bâlois a ici fendu sa coquille. "C'est la plus grande victoire de ma vie", souffle-t-il alors.
En cette fin de journée-là, il est né aux yeux du monde et c’est le début de quelque chose. De quelque chose de grand.
Chapitre 3
LE DRAME, PUIS LE REBOND
Keystone - Arno Balzarini
Il lui faut toutefois attendre deux ans de plus et surtout traverser bien des moments difficiles, sur le court comme en dehors, pour que la passation de pouvoir évoquée au moment du renversement de Pete Sampras ait bel et bien lieu. Entre juillet 2001 et juillet 2003, rien n’est en effet évident pour Roger Federer. Oui, il enrichit son palmarès de 7 nouveaux titres pour le porter à un total de 8, enlevant notamment son premier Masters 1000 en mai 2002 à Hambourg (sur terre battue et avec la manière), mais son chemin n'est pas un long fleuve tranquille. Parce que des défaites navrantes en Grand Chelem – Ancic au 1er tour de Wimbledon 2002, Arazi et Horna d’emblée à Roland-Garros 2002 et 2003 - le jalonnent. Mais surtout parce qu'il perd son véritable mentor, l’homme qui avait vu en lui un champion hors du commun: Peter Carter, décédé le 1er août 2002 lors de son voyage de noce en Afrique du Sud, lieu que lui avait conseillé… Roger.
C’est de la bouche de Peter Lundgren, son entraîneur d'alors, que Federer apprend la nouvelle à Toronto, où il s'est rendu pour l’Open du Canada. Dévasté, il quitte son hôtel et s’en va errer dans la rue, des larmes plein les yeux. Abattu. Triste comme il ne l’a jamais été de toute sa vie. A la veille de ses 21 ans, il se voit confronté à la mort d’un homme jeune et en pleine santé. Ce moment-là l’a changé à tout jamais, relèvent ses proches. "Aucune défaite en tennis n’est comparable à un moment pareil, dira plus tard le Bâlois. C’était la première fois que j’assistais à un enterrement. Je ne peux pas dire que cela m’a fait du bien, mais dans une certaine mesure, cela m’a aidé à être une nouvelle fois proche de Peter."
Cela le pousse surtout à remettre l’ouvrage sur le métier, pour ne pas dilapider les espoirs que celui qui lui avait montré la voie avait placés en lui. "Je crois que Peter n’aurait pas aimé que je devienne un talent gâché. J’imagine donc que son décès a été en quelque sorte un signal d’alarme pour moi. Lorsqu’il est parti, je me suis vraiment mis à m’entraîner dur." Encore une fois finaliste à Bâle, puis demi-finaliste de son premier Masters de fin de saison, celui qui n’est pas encore "RF" entame une partie de son rebond.
Chapitre 4
DÉBUT ET CONSTRUCTION DE LA LÉGENDE
Keystone - Anja Niedringhaus
L’exercice 2003 marque un premier tournant chez le "nouveau Federer". S’il cale à Melbourne et Roland-Garros, il "performe" comme jamais auparavant dans les autres tournois. Marseille, Dubaï, Munich et Halle viennent garnir son escarcelle. Il se présente à Wimbledon en gros outsider, même si certains l’ont estimé incapable de s’offrir un tournoi majeur après sa déroute du mois précédent à Paris contre Horna. Sauf que celle-ci a provoqué un déclic chez le Bâlois, qui a de son propre aveu eu honte de lui-même sur la terre battue de la Porte d’Auteuil. Il s’est alors juré de ne plus jamais afficher un tel visage en Grand Chelem. Et ce qu’il démontre très vite à Wimbledon s’inscrit en ce sens. Une seule alerte se pointe en 8es de finale, lorsqu’il se bloque le dos devant Feliciano Lopez. Mais un massage et son mental lui permettent de ne rien laisser transparaître, l’Espagnol se voyant estourbi en 3 manches.
La suite, un récital, appartient à l’Histoire. Roger Federer déroule devant Sjeng Schalken, martyrise Andy Roddick dans ce qui reste l’une de ses plus grosses performances, puis maîtrise Mark Philippoussis et ses propres nerfs dans une finale menée de mains de maître (7-6 6-2 7-6). Déjà! Un premier titre du Grand Chelem – et qui plus est celui de ses rêves – lui tombe sur le nez. A 21 ans et 11 mois, il entre déjà au Panthéon du sport suisse. La suite le verra toucher d’autres sommets, malgré une déception en demi-finales de Coupe Davis en septembre 2003 à Melbourne contre les Australiens.
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L’Helvète s’offre ensuite l’Open d’Australie 2004 et devient officiellement no 1 mondial le 2 février 2004. Malgré un raté aux JO d'Athènes, il entame son règne de folie sur le tennis et dévoile un appétit d’ogre en Grand Chelem. Il décroche ainsi Wimbledon 2004, 2005, 2006 et 2007, l’US Open en 2004, 2005, 2006, 2007 et 2008, mais aussi les Open d’Australie 2006 et 2007. Il remporte aussi l’or olympique du double, en 2008 à Pékin avec un certain Stan Wawrinka. Et une question surgit: a-t-on déjà joué aussi bien au tennis dans l’histoire?
Seule l’arrivée en trombe d’un gamin à liquette et pantacourt, un peu insolent mais diablement talentueux, le prive de Roland-Garros. Rafael Nadal – puisque c’est de lui qu’il s’agit – devient l’ogre de l’ocre, y battant le Suisse en 2005 (demi-finale), 2006, 2007 et 2008 (finales). Il s’impose comme son meilleur ennemi, comme celui qui fera la route à ses côtés (ou devant lui) durant les 15 années qui suivent. Il lui fera vivre un cauchemar en finale de Wimbledon 2008 dans un autre match de légende (lire chapitre 12).
Chapitre 5
UN "OUBLI" RÉPARÉ
EPA - Christophe Ena
A l’entame de la saison 2009, il ne lui manque que le tournoi parisien pour que Roger Federer complète sa collection en Grand Chelem et entre pour de bon dans l’Histoire, celle avec un grand H. Il en fait forcément sa priorité, sans toutefois négliger tout le reste. Il prend d’ailleurs un gros coup sur la tête en s’inclinant en finale de l’Open d’Australie devant... Rafael Nadal. Battu en 5 sets, il craque lors de la cérémonie protocolaire et offre des larmes au monde entier. Ce ne sont pas celles de juillet 2003, lorsqu’il avait conquis son premier "Wimb", mais bien celles d’un jeune adulte (27 ans) dépassé par sa déception et sa frustration de ne pas trouver la clé contre un joueur qui lui a déjà donné une leçon 6 mois auparavant à Roland-Garros puis dans la fameuse finale de Wimbledon 2008 épique, terminée au bout de la nuit et restée dans les annales.
Federer doit rebondir. Même si, dans sa vie privée, tout prend de belles teintes, grâce à son mariage avec Mirka, sa compagne depuis 9 ans, et au fait que le couple attend des jumelles. Privé de titre depuis les Swiss Indoors 2008, le Bâlois marque donc les esprits en s’imposant sur la terre battue de Madrid en battant un certain "Rafa" en finale. Quoi de mieux à l’approche de Roland-Garros? Même si personne n’a oublié la dérouillée reçue des mains de l’Espagnol un an auparavant, "RF" retrouve la Porte d’Auteuil avec le statut de sérieux outsider derrière son plus grand rival. Il sait qu’une possibilité peut s’ouvrir si ce dernier cale. L’entame de tournoi du Suisse n’est pourtant pas très encourageante. Il souffre notamment au 2e tour contre Jose Acasuso, puis lâche encore une manche en 16es de finale devant Paul-Henri Mathieu.
Mais dans le même temps, ce que personne ne voyait arriver… arrive. Le 31 mai 2009, Nadal, qui n’a jamais perdu plus d’un set dans un même match à la Porte d’Auteuil, se fait marcher dessus par un Robin Söderling en état de grâce. Pas maladroit certes, mais pas franchement attendu sur cette terre battue, le Suédois envoie des pains aux 4 coins du terrain et l’Espagnol dans les cordes. En 4 sets, il provoque un séisme à Paris. Ce qui, entre guillemets, ouvre la porte du titre à Federer. Encore faut-il pouvoir passer 4 autres tours et gérer les choses, tant tennistiquement, que physiquement et surtout nerveusement. C’est d’ailleurs là toute la difficulté de la chose.
Car s’il ne laisse rien transparaître au lendemain de la sortie de route du Majorquin, Roger Federer sait bien qu’il est dorénavant considéré comme le seul et unique favori pour le titre. Il est conscient que les jours qui viennent peuvent bousculer son destin et sa carrière, pour le transformer en vainqueur des 4 tournois majeurs. Il y a donc de quoi avoir le bras qui tremble. C’est ce qui se passe le 1er juin 2009 devant son ami Tommy Haas. Alors qu’il n’a plus perdu contre l’Allemand depuis 7 ans, le Bâlois se retrouve dépassé - plus par l’enjeu que par l’enjeu - et mené 2 manches à rien avec balle de break contre lui à 3-4 dans le 3e set. C’est alors qu’il prend tous les risques sur un coup droit qui touche la ligne et lui permet d’écarter le danger. "Il s’agit sans conteste du coup le plus important de toute ma carrière, dira l’intéressé 12 ans plus tard. Si la balle avait manqué la ligne, j’aurais certainement perdu le match." Car après ce petit miracle, Haas ne reverra plus son pote, finalement vainqueur 6-7 5-7 6-4 6-0 6-2.
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Federer plie ensuite Gaël Monfils, remporte une demi-finale folle contre Juan Martin Del Potro – match dont peu de gens se souviennent, mais qui fut énorme – et touche le Graal le 7 juin après avoir dominé Söderling au bout d’une finale sans anicroche (6-1 7-6 6-4). Sous le crachin de Paris, le Suisse devient ce jour-là un homme vainqueur des 4 tournois majeurs et égale le record de titres du Grand Chelem jusqu’ici détenu par un certain Pete Sampras (14), 8 ans seulement après l’avoir battu à Wimbledon, alors que lui-même n’en avait encore enlevé aucun.
Il ne lui faut patienter qu’un mois de plus, juste avant la naissance de ses jumelles, pour devenir le seul détenteur du record. A Wimbledon, Federer distille en effet un tennis de rêve, atteignant la finale en n’ayant perdu qu’une seule manche et battu notamment Kohlschreiber, Karlovic, Söderling et Haas. L’ultime dimanche, il livre un combat homérique avec Andy Roddick. L’Américain manque une montagne qui lui aurait permis de mener 2 manches à 0. Le Bâlois en profite pour faire jeu égal avec son adversaire. Tous deux se trouvent embarqués dans un 5e set interminable, qui s’achève au moment du souper, par l’unique break de tout le match signé par Federer, finalement vainqueur 5-7 7-6 7-6 3-6 16-14 et assuré de retrouver du même coup sa place de no 1 mondial.
En pleine fine, Federer est à 2 doigts d’enchaîner avec un succès à l’US Open, mais il s’emmêle les pinceaux en finale contre l’étoile montante Juan Martin Del Potro. Incapable de saisir ses occasions et pas franchement lucide dans les moments-clés, il gâche une véritable opportunité de garnir encore davantage sa hotte en Grand Chelem, s’inclinant en 5 manches face à celui qui - tristesse d’une carrière émaillée par les blessures - remporte là son unique tournoi majeur (3-6 7-6 4-6 7-6 6-2).
Aujourd’hui encore, on peut considérer cette défaite comme l’une des 5 plus frustrantes de "RF" dans l’un des 4 grands rendez-vous. Le Bâlois s’adjuge néanmoins une 16e couronne 4 mois plus tard en survolant l’Open d’Australie 2010, y matant notamment Hewitt, Davydenko, Tsonga et Murray. On ne le sait pas encore, mais s’ouvre alors sa plus longue période de disette en Grand Chelem depuis son 1er triomphe à Wimbledon.
Chapitre 6
DEUX ANS ET DEMI D'ATTENTE
AP - Kirsty Wigglesworth
Après Melbourne 2010, Roger Federer ne joue pas forcément moins bien au tennis, mais les petits détails qui parlaient pour lui ne jouent désormais plus en sa faveur. Ceci, couplé à la montée en puissance d’un autre immense joueur (Novak Djokovic, pour ne pas le nommer), à la régularité de Rafael Nadal et à quelques hésitations çà et là, l’éloigne des titres majeurs. Il vit ainsi quelques affronts sur le front des épreuves du Grand Chelem, notamment des défaites successives en quarts de finale de Roland-Garros (Söderling) et Wimbledon (Berdych). Deux années de suite, Djokovic l’écarte en demies de l’US Open en sauvant à chaque fois des balles de match, dans un scénario qui l’accompagnera encore plus tard, hélas. Là se niche la petite différence entre un Serbe qui ne se rend jamais et un Suisse qui a parfois manqué d’un peu de méchanceté pour tuer des matches.
Federer a beau composer un morceau d’histoire, un match dantesque, contre ce même "Nole" en demi-finales de Roland 2011, les titres lui échappent encore. Le plus frustrant reste certainement son revers en quarts de finale du Wimbledon suivant devant un Jo-Wilfried Tsonga pourtant mené 2 manches à 0. Toujours présent mais plus gagnant - malgré les 12 titres hors GC cueillis dans ce laps de temps, dont 2 Masters, Bercy, Indian Wells et Madrid -, "RF" revit à l’été 2012, lorsqu’il plane sur son jardin extraordinaire de Church Road.
Oui, il connaît une grosse alerte au 3e tour contre Julien Benneteau, mais s’en sort en champion avant de dérouler pour le reste du tournoi. Malisse, Youzhny, Djokovic et Murray sont impuissants. Ils le voient porter sa marque à 17 sacres en "Majeurs". Fou!
Quelques jours plus tard, il décroche la médaille d'argent olympique en simple, après avoir de nouveau battu Juan Martin Del Potro en demies dans une confrontation littéralement exceptionnelle. Mais les efforts fournis contre l'Argentin lui coûtent cher en finale devant un Andy Murray impérial sur le gazon de... Wimbledon.
Chapitre 7
LE "TROU D'AIR", MAIS AVEC LE SALADIER D'ARGENT
EPA - Justin Lane
Parler d’un trou d’air est sévère, car Roger Federer ne disparaît jamais des radars, se montrant même toujours dans la course aux gros titres. Si près certes, mais parfois si loin aussi, en réalité. Il est toutefois vrai qu’entre juillet 2012 et janvier 2017 il n’en embrasse aucun. Reste que dans ce laps de temps, seul un été 2013 cataclysmique - durant lequel on le trouve même au bord des larmes à Gstaad en raison de soucis récurrents de dos, 3 semaines après avoir été battu par... Sergei Stakhovsky à Wimbledon – le voit concrètement passer à côté de son sujet.
Sinon, le Bâlois reste de toutes les batailles. Il remporte d’ailleurs la Coupe Davis au bout d’une semaine au scénario incroyable.
Mais oui, sur le plan personnel, Roland-Garros n’est plus vraiment sa première préoccupation. Il flirte toujours avec le Graal à Wimbledon, en distillant souvent une déroutante magie, et est tout proche aussi à Flushing Meadows. Sauf qu’à chaque fois se dresse devant lui l’incroyable et insubmersible Novak Djokovic. De ces instants, on retient son parcours merveilleux de 2015 à Church Road, durant lequel il livre une demi-finale exceptionnelle contre Andy Murray, un jour où il décide de marcher sur l’eau. "Je joue le meilleur tennis de ma vie et je perds en trois sets, que pouvais-je faire de mieux?", s’interroge l’Ecossais au sortir du court.
Douze mois plus tard, c’est la stupeur qui s’empare du gazon londonien, lorsque 48 heures après être revenu de nulle part en quarts de finale contre Marin Cilic, Federer s’encouble dans tous les sens du terme devant Milos Raonic. Lâché par son genou, il quitte Church Road les larmes au bord des yeux, actant son forfait pour les JO de Rio et son absence du circuit pour 5 mois, le temps de se soigner. L’idée d’une retraite revient dans les médias. A tort. Heureusement.
Chapitre 8
LE RETOUR AU SOMMET
AP - Ben Curtis
Doublement à tort que le plus beau est à venir, en réalité. Après avoir soigné ses bobos et arpenté la Suisse en famille (ses réseaux sociaux en témoignent), le Bâlois revient sur le circuit en Australie à Nouvel An 2017. Pour écrire le plus beau chapitre de sa carrière et entamer ses 6 mois les plus solides depuis une décennie. Il gagne d’abord la Hopman Cup avec Belinda Bencic, puis marche sur l’Open d’Australie de la plus belle des manières. Alors à peine remis de son genou et tête de série no 17, il monte en puissance au fil de la quinzaine. C’est surtout avec la rouste qu’il colle à Tomas Berdych au 3e tour que le monde prend conscience que "RF" n’est pas là que pour rejouer au tennis. Son niveau est affolant. Goran Ivanisevic, alors coach du Tchèque, se trouve bouche bée devant la maestria du Bâlois, qui entre dans la balle comme jamais et donne l’impression de jouer au ping-pong tellement il va vite. C'est juste une merveille!
Kei Nishikori et Mischa Zverev le comprennent aux tours suivants. Puis malgré toute son envie, Stan Wawrinka plie en 5 manches en demie. Et le 29 janvier 2017, Roger Federer renforce sa légende en dégainant un match plus que parfait contre son rival Rafael Nadal. Mené 3-0 dans le dernier set, il semble parti pour vivre un scénario classique face à l’Espagnol. Mais cette fois-ci, non, il ne veut pas perdre. Il ne veut plus perdre. Alors il se rebiffe. Son revers fait des merveilles. Son coup droit aussi. L’insubmersible "Rafa" finit roué de coups, saoulé, et le Bâlois embrasse le 18e titre du Grand Chelem de sa carrière, record battu, dans un brouhaha indescriptible. Le monde du tennis est à nouveau à ses pieds. "On va aller fêter comme des rock stars", s’emballe-t-il en conférence de presse.
Suivent plusieurs récitals. A Indian Wells (sans perdre de set et en battant Wawrinka en finale), puis à Miami, où il sauve des balles de match contre Tomas Berdych, signe un match énorme face à un Nick Kyrgios des grands jours et finit par estourbir Rafael Nadal en finale. A cette occasion, 11 ans après le 2e, Federer réalise le 3e "Sunshine Double" de sa carrière, à savoir gagner coup sur coup Indian Wells et Miami. Il remporte ensuite Halle puis un nouveau Wimbledon, le 8e, sans égarer la moindre manche et quasiment sans transpirer non plus, tellement il apparaît au-dessus de la mêlée.
Il le reste pour s’imposer ensuite à Shanghai, Bâle et à nouveau à l’Open d’Australie 2018, pour remporter la 20e couronne "majeure" de son immense carrière (la dernière, mais on l'ignore encore). Les qualificatifs n’existent plus le concernant. Il y en a encore moins le 19 février 2018 lorsqu’au sortir d’un nouveau sacre à Rotterdam, "RF" retrouve la place de no 1 ATP, le trône, "son" trône. Complètement fou! Il dépose ainsi la cerise sur l’un des retours les plus fracassants de l’histoire du sport.
Chapitre 9
L'ULTIME DOULEUR
AP - Ben Curtis
Après avoir remporté 5 autres titres dans la foulée de son retour sur le trône mondial (Stuttgart et Bâle 2018, Dubaï, Miami et Halle 2019), Roger Federer n’est pas loin de composer un énième morceau d’anthologie à Wimbledon 2019. Au bout de 2 semaines d’enchantement, il passe si près du plus beau coup de sa carrière, qui lui aurait permis de remporter son seul titre du Grand Chelem en ayant battu ses deux plus grands ennemis (Rafael Nadal et Novak Djokovic) dans la même quinzaine. Il ne lui manque qu’un point, un tout petit point…
Aujourd’hui encore, en parler constitue une douleur pour ses fans. Même s’il dit le contraire, comment pourrait-il en aller autrement pour lui? Pratiquant de l’excellent tennis, le Bâlois franchit les tours sans trembler, donne une leçon à Matteo Berrettini en 8es de finale, domine ensuite Kei Nishikori et se montre impérial en demie contre Nadal, qu’il mate en 4 sets avec la maîtrise de ses plus grands jours.
S’ouvre alors le 14 juillet 2019 une finale restée dans les mémoires face à Novak Djokovic. Meilleur homme sur le court, "RF" fait les coups gagnants, mais aussi les erreurs. Il offre ainsi le 1er tie-break au Serbe, corrige le tir au 2e set, offre le 2e tie-break à son rival, revient encore au 4e set, puis s’embarque dans un 5e set écrit par Hitchcock.
A 8-7, 40-15, il possède deux balles de match sur sa mise en jeu. L’Histoire – avec un grand H, à nouveau – est censée s’écrire ici. Mais il y a une panne d’impression. Djokovic sauve les deux occasions sur de mauvais choix de son adversaire et finit par l’anéantir au super tie-break (13-12). Une horreur. Son compteur reste bloqué à 20 titres majeurs, désormais dépassés par Nadal et Djokovic. Un sale coup derrière la tête. 14 juillet, date maudite.
Chapitre 10
LE COUP DE SIFFLET FINAL
AP - Kirsty Wigglesworth
La dernière fois que les fans de Roger Federer tremblent véritablement, c'est lors de l'Open d'Australie 2020, juste avant le choc Covid. Inspirée, leur idole sort tout sourire d'incroyable thrillers contre John Millman et Tennys Sandgren, mais elle ne reverra jamais une opportunité de remporter un titre du Grand Chelem se glisser devant son bras droit.
Et pour cause, opéré des genoux en plein confinement, Roger Federer doit patienter jusqu'en mars 2021 pour retrouver la compétition, à Doha. Malgré une sorte de baroud d’honneur contre Daniel Koepfer à Roland-Garros, puis un quart de finale à Wimbledon soldé par une roue de vélo face à Hubert Hurkacz, plus rien n’est comme avant.
La flamme ne s’est pas éteinte, mais le temps, l’âge et les réalités du tennis ont fini par rattraper l’immense joueur. La légende a beau être éternelle, le champion vieillit, lui aussi.
Inutile donc de dire que depuis son échec de l’été 2021 sur le gazon britannique et l’annonce d’un autre passage sur le billard dans la foulée, tout le monde avait bien compris que cela sentait la fin. C’est acté, désormais. Sa carrière, immense, s’écrit au passé. Mais dans les cœurs, Roger Federer se conjuguera sans doute toujours au présent.
Chapitre 11
LA FEMME DE SA VIE
EPA - Michael Dodge
Derrière chaque grand homme se cache une grande dame. Vu l’ampleur de Roger Federer, la grande dame, chez lui, doit être une géante; Miroslava "Mirka" Vavrinec, née en 1978, est celle-ci. Bien que souvent calée dans l’ombre de son mari, celle-ci a pris un poids considérable dans l’évolution du "Maître" et de sa carrière. "Elle a toujours été ma première supportrice", n’a cessé d’indiquer le Bâlois, qui l’a rencontrée aux JO de Sydney, en 2000, avant de l’épouser en 2009 et de faire 4 enfants avec elle, des jumelles en 2009 (Charlene et Myla), des jumeaux en 2014 (Leo et Lennart).
Le mérite de cette ancienne joueuse pro - WTA 76 à son meilleur en 2001 avant que des blessures ne la mettent sur le flanc – est énorme. Certes, il peut paraître aisé de vivre cette vie de millionnaire, mais cela n’est pas évident sur tous les plans. Rien qu’en la voyant souffrir à chaque grand match de l’homme de sa vie, ses fans – qui ont l’habitude de se faire un sang d’encre en voyant jouer "RF" - peuvent comprendre que rien n’est facile. Elle aussi s’est parfois pris la tête entre les mains, rongé les ongles, cachée derrière un linge…
"Mirka" (pour les intimes) a aussi essuyé les plâtres et les critiques. Les aigris et les jaloux l’ont dépeinte en personne tordue, vénale. En privé, ceux qui la connaissent dessinent un tout autre portrait. Celui d’une femme forte, parfaitement organisée, pas innocente dans le fait que la carrière de son homme se soit pareillement étirée. Pour le plus grand public, elle reste énigmatique, secrète. C’est peut-être aussi un avantage, dans le monde d’aujourd’hui, que de ne pas en dire trop, que de ne pas tout dévoiler. Reste qu’elle a contribué à faire évoluer son partenaire. Elle a aussi géré ses contrats, poli son image. "Elle m’a aidé de façon considérable en tant que personne, a une fois témoigné "RF". J’ai grandi à ses côtés. Mirka a toujours été un véritable soutien. Je suis devenu plus calme grâce à elle. je lui dois énormément."
Oui, elle s’est une fois pris de bec en plein Masters (2014) avec Stan Wawrinka ("Cry baby cry"). Mais l’affaire n’a pas eu de suite. Devait-on mettre cela sur le compte de la tension d’un moment, une demi-finale haletante, à une semaine de la finale de la Coupe Davis? On l’ignore, mais l’implication et la passion de cette quadragénaire d’origine tchécoslovaque arrivée en Suisse à l’âge de 2 ans ne se sont jamais démenties. Mieux que quiconque, en tant qu’ex-joueuse pro, elle a pu cerner les besoins de M. Federer ainsi que les sacrifices consentis pour en arriver là. La rumeur veut qu'elle lui aurait passé une "branlée" mémorable lorsqu'il s'était retrouvé mené deux manches à rien en finale de Wimbledon 2008...
"Mirka est aux côtés de Roger depuis le premier jour, ou presque, et elle sait très bien comment il fonctionne et comment le soutenir", avait un jour relevé Paul Annacone, ancien entraîneur de l’ex-No 1 ATP. "Je n’avais aucun titre ATP lorsque je l’ai rencontrée et j’en ai désormais plus de 100, je sais ce que je lui dois", a pour sa part tenu à marteler le Bâlois.
Chapitre 12
L'ÉVOLUTION DE L'HOMME
Keystone - Martial Trezzini
En dehors des courts, l’évolution de Roger Federer a elle aussi été fascinante. L’ancien gamin au catogan est devenu une icône de la mode, que les publicitaires – quels qu’ils soient – s’arrachent. Ses gains se sont aussi multipliés hors du terrain de jeu. Il faut dire que son image, réelle, d’un mec sympa ne s’est jamais démentie. Oui, "RF" - c’est devenu l’un de ses surnoms, mais c’est avant tout son propre logo – fait vendre. Il est surtout le joueur de tennis le plus aimé de la planète, et de loin!
Ce n’est pas pour rien si en 2018, profitant de la fin de 24 ans de partenariat avec Nike, la firme japonaise Uniqlo a décidé de miser un paquet sur lui – 30 millions par an sur 10 ans! Et ce alors même qu’il se trouvait déjà dans la dernière ligne droite de sa carrière de joueur. Niveau raquette, il a certes fini par passer à un petit tamis, mais il est demeuré fidèle à Wilson. Lui qui avait un jour dit que "Quand je serai no 1 ATP, on oubliera mon gros nez" a clairement réussi.
Sur le court, il remplit les stades à lui tout seul. Un tournoi qui se dispute sans lui est une semaine perdue pour les fans de tennis. Ses tournées en Amérique du Sud et en Amérique Centrale sont de la folie! Jamais la petite balle jaune n'a vu l'un de ses dompteurs atteindre de tels sommets de notoriété, d'amour. La création de la Laver Cup, exhibition décriée mais qui draine un public et des millions, est une autre corde à son arc de joueur et de businessman.
En dehors du terrain, c’est en grande partie grâce à l’appui de son épouse, aux conseils avisés d’Anna Wintour, la papesse de la mode, et au "nez" de son agent Tony Godsick que Federer s’est construit une image d’icône. A côté d’une attitude idéale, ses tenues ont été savamment étudiées et dessinées. Avant cela, le Bâlois avait déjà conquis Rolex, la marque de l’élégance. On l’avait aussi vu chez Gilette, Jura, Mercedes ou Emmi. Puis il s’est même reconverti en chef de cuisine pour Barilla. Fin 2019, ses revenus étaient de plus de 100 millions, ce qui le place au sommet des sportifs les mieux rémunérés de la planète. Des fonds qu’il met aussi à profit pour les autres, notamment avec sa Fondation qui vient en aide aux personnes défavorisées.
Plus récemment, Federer s’est engagé aux côtés de la marque helvétique de chaussures On Running. Pour l'heure, ce n’est pas franchement un succès, mais on ne lui fera surtout pas le procès de soutenir des firmes suisses.
Chapitre 13
RAFAEL NADAL, ADVERSAIRE ET... COMPAGNON DE ROUTE
AP - Nic Bothma
La carrière de l'un est presque indissociable de celle de l'autre. En tout cas d'abord pour Roger Federer. Même s'il a 5 ans de plus que Rafael Nadal, le Bâlois a vu l'Espagnol se greffer sur son parcours, comme adversaire puis finalement comme compagnon de route, le temps leur ayant appris à s'apprivoiser. Mais avoir son cadet sur sa route n'a pas été une partie de plaisir pour "RF", qui a en premier lieu été irrité par cet adversaire en pantacourt, aux gros biceps et au culot incroyable. Il leur a fallu du temps pour se comprendre, se tolérer, s'accepter. S'il ne sont pas devenus amis, ils se respectent profondément, comme ils l'ont régulièrement démontré ces dernières années. L'un s'est appuyé sur l'autre pour promouvoir ses "Match for Africa", l'autre s'est appuyé sur l'un au moment d'inaugurer son Académie à Majorque.
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Les deux hommes se sont affrontés à 40 reprises en 15 ans. La première fois, c'était à Miami en 2004, avec une victoire de Nadal. La dernière à Wimbledon, en 2019, avec un succès de Federer. Entre ces deux moments-là, ils se sont chargés d'écrire quelques morceaux d'histoire du jeu. Les deux points culminants demeurent le thriller en finale de Wimbledon 2008 et le duel d'anthologie en finale de l'Open d'Australie 2017, lorsque tous deux revenaient de blessure.
Pour certains, leur face-à-face sur le gazon britannique reste l'un des plus grands matches de l'histoire. Ce dimanche-là, gris et pluvieux, "Rafa" avait fait tomber le "Maître" au début de la nuit, alors que le toit et les projecteurs n'existaient pas à Church Road et que s'il avait fallu disputer un jeu de plus, tout le monde aurait dû revenir le lendemain (6-4 6-4 6-7 6-7 9-7).
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Un documentaire, sorti 10 ans après, revient en long et en large sur cette empoignade. Les deux "héros" confirment que leur rivalité les a poussés, l'un comme l'autre, à être encore meilleurs, à repousser leurs propres limites. Federer s'est notamment "réinventé" en 2017 pour contrer le coup droit de Nadal, qui a brisé tant de ses rêves au fil de sa carrière. Surtout à Roland-Garros, en premier lieu lors de l'humiliation que fut la finale 2008 (6-1 6-3 6-0).
Mais leurs rencontres en Grand Chelem n'ont pas toutes été légendaires. En revanche, des matches disputés en dehors des "Majeurs" ont aussi marqué les esprits. On pourrait évoquer la finale de Rome 2006 (6-7 7-6 6-4 2-6 7-6 pour Nadal), celle de Hambourg 2007 (2-6 6-2 6-0 pour Federer), celle de Bâle 2015 (6-3 5-7 6-3 pour Federer) ou encore celle de Miami 2017, lorsque le Bâlois avait ratatiné son compagnon de route.
Chapitre 14
JAMAIS SANS "SEVE"
Keystone - Alexandra Wey
Coaché au Old Boys de Bâle par Adolf "Seppli" Kacovsky, Roger Federer a rencontré Peter Carter à ses 10 ans. L'entraîneur australien a toujours été proche de son poulain bâlois. C'est lui qui a deviné l'immense potentiel qui se nichait dans le bras de celui qui, à l'époque, jouait encore au foot en parallèle au tennis. Il l'a poussé vers l'avant. S'ils se sont perdus lorsque l'ado a migré vers Ecublens, ils se sont ensuite retrouvés à Bienne. Et Carter a poursuivi son travail et était même tout fier de présenter Roger à son pote Darren Cahill, qui s'occupait de son côté d'un certain... Lleyton Hewitt.
Mais au moment de passer pro, Federer choisit de lier sa destinée à celle de Peter Lundgren, coach suédois également employé chez Swiss Tennis. Cela fut un crève-coeur pour Carter, mais le Bâlois poursuivit son évolution avec le costaud Scandinave. Leur collaboration atteint son paroxysme avec le titre à Wimbledon 2003. Cinq mois plus tard, Roger décide de se séparer de son entraîneur. Un journaliste écrit alors que c'est la première grosse erreur de sa carrière. A tort.
Après une année sans coach attitré, mais avec davantage de succès encore(!), le no 1 mondial enrôle Tony Roche. L'Australien est censé l'accompagner sur les grands événements. Cette collaboration s'étend jusqu'au printemps 2007. Au moment où Severin Lüthi entre dans la vie de Roger Federer.
Cet ancien espoir du tennis suisse, né en 1976 et classé 662e mondial au début des années nonante, a beau recevoir d'immenses critiques dans une certaine presse, il s'impose comme un élément-clé dans la suite de carrière de son pote. Comme Pierre Paganini est davantage qu'un préparateur physique, "Seve", capitaine de Coupe Davis depuis 2005, est plus qu'un coach.
Ainsi, "RF" peut engager José Higueras pour lui donner des conseils sur terre battue, puis Darren Cahill de manière très éphémère, ou encore de 2010 à 2013 Paul Annacone, l'ex-coach de Pete Sampras, Severin Lüthi reste fidèle au poste. Il lui prodigue ses conseils, l'appuie, finit par le connaître mieux que personne. Il lui faudra remporter la Coupe Davis en novembre 2014 à Lille pour être véritablement reconnu. L'apport que le Bernois a eu entretemps dans la carrière de Stan Wawrinka lui donne aussi un immense crédit.
Même lorsque le génial Stefan Edberg - idole d'enfance de Roger - rejoint le clan Federer entre fin 2013 et fin 2015 ou qu'Ivan Ljubicic lui emboîte le pas à partir de la saison 2016, Lüthi ne disparaît jamais. Il est le confident de Roger, qui n'avance jamais sans "Seve". Jusqu'au bout.