Carnet 5: un fan de Wawrinka fait chavirer Paris, Sinner cuit à vif, Jarry sourit, le doigt de Fritz, les bulles de Swiatek et la catastrophe suisse

MATCH "DINGO"! La rencontre Jannik Sinner-Daniel Altmaier n'était peut-être pas la plus excitante sur le papier, mais ceux qui avaient choisi de se poser au bord du Suzanne-Lenglen en ont eu pour leur argent. Quel match, mes ami(e)s! En tout, 5h26 d'un immense combat, avec ses renversements, ses coups venus d'ailleurs, ses inévitables "chokes" aussi, et surtout dans l'ensemble tout ce qui fait la beauté du tennis. Avec un Italien qui fait "n'imp" dans les moments décisifs du 5e set – après avoir vu son adversaire avoir une chance de fou sur une balle de match dans le 4e – et un Allemand qui se met à jouer sur une autre planète par moments, grâce à un revers à une main "Wawrinkesque". Bref, un régal! Et de belles émotions après coup…

FAN DE STAN… Daniel Altmaier, 24 ans, a la particularité d'être un fan absolu de Stan Wawrinka. "C'est mon idole, disait-il il y a trois ans après s'être souvent pointé le doigt sur la tempe lorsqu'il avait accédé aux 8es de finale de Roland. J'admire sa manière de jouer au tennis." L’Allemand est donc bien inspiré dans le choix de ses modèles. Aura-t-il la même caisse physique que son idole pour tenir le reste de la quinzaine?

CONTRE DIMITROV… Grigor Dimitrov, qui a quitté la virgule américaine la semaine passée pour le crocodile français à partir de ce Roland-Garros, conserve son costume de potentiel poil-à-gratter du tableau masculin et sera donc le prochain adversaire d'Altmaier. Le Bulgare a mis trois petites manches seulement pour se débarrasser d'Emil Ruusuvuori. Bien sûr, le Finlandais n'est pas un crack de la terre battue, mais pour un Dimitrov qui se cherchait avant son passage par le Geneva Open (finaliste), ce résultat est plus que bon à prendre. Sa confrontation avec un autre délicieux revers à une main pourrait être très séduisante.

RUUD EST LANCÉ… Battu par un très bon Nicolas Jarry la semaine dernière à Genève, Casper Ruud a livré un match costaud contre l'étonnant gaucher italien Giulio Zeppieri. Même s'il a égaré une manche (6-3 6-2 4-6 7-5), le Norvégien a donné quelques garanties sur sa capacité à signer un deuxième bon Roland-Garros de suite. Son sponsor y croit puisqu'il lui a dessiné un short dans le même style que celui que portait Stan Wawrinka lors de son parcours gagnant de 2015. Certes, pour Ruud, atteindre la finale comme en 2022 ne sera pas chose aisée, mais on devrait le voir en deuxième semaine.

JARRY SOURIT... Jarry, parlons-en! Opposé à Tommy Paul, le Chilien n'a pas été pris au piège. Au contraire, après une 1re manche perdue, il a accéléré et évolué dans les mêmes sphères qu'aux Eaux-Vives (3-6 6-1 6-4 7-5). C'est propre et solide. Prochain tour: Marcos Giron.

YOUNG, WILD AND FREE… Quantité de joueurs n'ont pas su gérer l'après-exploit en Grand Chelem. Thiago Seyboth Wild ne sera pas de ceux-ci! Après avoir surpris Daniil Medvedev dans un match de toute beauté mardi, le Brésilien a enchaîné avec solidité devant Guido Pella (6-3 3-6 6-4 6-3). Yoshihito Nishioka se dressant sur sa route, "TSW" a des raisons de s'imaginer en deuxième semaine.

LA CHEVILLE QUI REDÉMARRE... Hier soir, Alexander Zverev a retrouvé le court Philippe-Chatrier, celui-là même sur lequel il avait laissé une cheville l'an dernier en demi-finale contre Rafael Nadal. Cette fois-ci, l'Allemand n'a rien laissé, ni sur le terrain ni à son adversaire, Alex Molcan, laminé 6-4 6-2 6-1. Peut-on dès lors dire que c'est la cheville qui redémarre?

LES BULLES DE SWIATEK… Tenante du titre, Iga Swiatek n'a même pas eu besoin de forcer pour entamer sa quinzaine parisienne en toute quiétude. Spécialiste des 6-0, des "bulles" ou des "bagels" en anglais (69 depuis le début de sa carrière, dont 17 en Grand Chelem!), la Polonaise n'a pas encore ouvert sa boulangerie, mais elle en a déjà collé deux en deux matches. 6-4 6-0 mardi contre Busca, 6-4 6-0 hier contre Liu. Sa prochaine adversaire, Xinyu Wang, n'aura qu'à inscrire un jeu par set pour se dire que sa mission sera remplie.

SACCAGE PARRY… Roland-Garros aurait tant aimé pouvoir s'enflammer autour de Diane Parry, comme l'an dernier lorsque la Française de 20 ans avait rallié le 3e tour à la Porte d’Auteuil. Sauf que non, comme les autres Bleu(e)s, la native de Nice a plongé dès les 32es de finale, écrasée 6-1 6-2 par la tornade Mirra Andreeva dont nous vous parlions mercredi. "Heureusement que personne n'a vu que j'étais très nerveuse, j'ai su bien le cacher", a commenté la Russe, qui n'a pas fini de surprendre.

L'IMAGE DU JOUR… Celle de Taylor Fritz qui, après avoir maté Arthur Rinderknech, dernier Français en lice, a célébré sa victoire avec les doigts sur la bouche, histoire que le public enfin se taise. La foule n'a pas aimé, mais on peut comprendre l'Américain, conspué pendant son match, à la limite du trop-plein. Parce que oui, les spectateurs peuvent être top lorsqu'ils poussent les leurs, mais pas lorsque les joueurs adverses se trouvent hués. Ca en devient lamentable.

BAD DAY POUR MADISON… Finaliste de l'US Open 2017, puis demi-finaliste à Roland-Garros et à Flushing l'année suivante, Madison Keys n'a pas perdu la clé en Grand Chelem depuis lors, mais carrément le trousseau. Hormis une éclaircie à Melbourne l'an dernier, l'Américaine rame partout où elle passe et Kayla Day, sortie des qualifs, en a profité hier. Bref, such a bad day at the office.

LA PHRASE… "J'ai eu pas mal de blessures, puis une mononucléose qui m'a bien foutue en bras. Je me suis fait les quadriceps, fracturé un pied, fichu en l'air une hanche, puis quand j'avais le sentiment que j'allais mieux, le Covid a provoqué l'arrêt des tournois. Le tout alors que je n'avais pas de classement protégé…" Tombeuse de Keys, Kayla Day a semble-t-il bien croqué dans le pain noir. Sa qualification pour les 16es de finale ressemble à un cadeau du ciel.

PETITS SUISSES… Qu'il a été triste, le collectif suisse à Paris! Avec l'élimination d'une Simona Waltert beaucoup trop irrégulière, pas le moindre de nos représentants n'a donc franchi le 2e tour, ceci pour la troisième fois seulement en 30 ans. On tire la langue et il y a de quoi. Si Stan Wawrinka a distillé quelques étincelles, ce n'est pas le cas du reste de la délégation (Bencic, Hüsler et Teichmann en particulier). Bien sûr, le tennis est un sport individuel, mais l'émulation ne viendra pas si tout le monde s'arrête en même temps.

ET PENDANT CE TEMPS-LA… On apprend qu'Emma Raducanu, actuellement blessée, est à la recherche d'un nouveau coach, qui sera son… 6e en 2 ans, depuis sa victoire surprise à l'US Open. Comme craint à l'époque, la Britannique restera certainement à jamais un "one-shot". Dur. A suivre toutefois...

Arnaud Cerutti - @arnaud_cerutti