Carnet 11: la solidité de Ruud, le S.O.S. de Rune, le retour de Zverev, le souvenir de Kuerten et l'apéro de Swiatek
RUUD A ÉTOUFFÉ RUNE... Surclassé, déclassé, pulvérisé, atomisé, etc. Bref, choisissez le terme qui vous convient, mais tous collent assez bien à ce qu'a vécu Holger Rune au cours de la première moitié de son ultime soirée parisienne. Fantomatique contre Casper Ruud pendant une bonne heure, le Danois a eu le temps d'en prendre plein la poire. Méconnaissable! Le mérite en revient bien sûr également à son adversaire norvégien, qui a dégainé un vrai gros match, hormis dans la 3e manche. Pour tout dire, Ruud n'avait pas fait de cette affiche une montagne ou une revanche. Il n'avait justement pas joué le match dans sa tête avant de pénétrer sur le court. Au contraire, le finaliste de l'an dernier s'était contenté de parfaitement préparer ce rendez-vous, se montrant imperméable à tout ce qu'il y avait autour, propre avec son tennis, sans esbroufe ni fioriture. Tout l'inverse de Rune, dont la gestion des émotions n'est pas tout à fait le point fort. Casper a livré une leçon d'approche et de réalisme, faisant mal avec son service, et son coup droit quand il le fallait, pendant que son adversaire se noyait sous les fautes directes et même les double-fautes. Solide de sa part! Ça doit être cela, ce qu'on appelle l'expérience. A un tel niveau, avoir une heure de retard et se mettre dans tous ses états n'est pas sans conséquence. Holger Rune peut s'en mordre les doigts, car avec ce qu'il a présenté ensuite, il y avait clairement mieux à faire. Alors que Ruud, lui, disputera une demie très alléchante contre Alexander Zverev, qu'il dit "heureux de revoir au plus haut niveau". Sympa.
ON REVERRA RUNE... Il s'agissait du deuxième quart de finale en Grand Chelem pour le Danois - le deuxième contre Casper Ruud, mais aussi le deuxième à Roland-Garros - et il est complètement passé à côté durant deux manches. A un moment, même ses tentatives de se relancer à 1-6 1-3 40/30 ont été peu convaincantes, bien que quelques fulgurances soient intervenues sur un ou deux points par la suite, mais rien de transcendant. Non, il n'y avait pas beaucoup d'essence, pas beaucoup de jus ni dans les bras ni dans les pattes de Holger Rune, sinon l’énergie du désespoir. C'est celle-ci, et l'orgueil, qui lui ont permis de revenir de fort belle manière dans le 3e set après que Ruud a manqué l'occasion de tuer le match avec une balle de break dans le premier jeu. Auparavant, Holger du Nord avait donc été impuissant. La faute sans doute à son 8e de finale ébouriffant et épuisant contre Francisco Cerundolo. La faute, aussi, à la gestion compliquée des émotions dont nous parlions précédemment. Tout l'influx dont aurait eu besoin le blondinet mercredi soir était resté dans le combat épique livré face à l'Argentin. Son tennis, hier, a été pendant un trop long moment un champ de ru(i)ne. Dommage pour lui. Mais qu'il se rassure: on le reverra très vite, car il ne faut pas oublier qu'il a à peine 20 ans et du potentiel plein les bras. Il est des claques – ou des retards à l'allumage - salutaires… Rendez-vous déjà à Wimbledon?
BAD BIRTHDAY... Patrick Mouratoglou n'aura sans doute pas le coeur à souffler ses 53 bougies ce jeudi. Le coach français, qui s'occupe de Coco Gauff et Holger Rune, a en effet doublement pris la porte hier, l'Américaine et le Danois ayant été éjectés du tournoi. Il y a des gâteaux plus savoureux que d'autres.
LE PLAISIR DE ZVEREV... Commençons par une évidence: nous n'avons rien contre Thomas Etcheverry, qui a signé un tournoi exceptionnel, mais ça nous fait bien plaisir de retrouver Alexander Zverev en demi-finales de Roland-Garros, après le coup du sort de l'an dernier, cette cheville qui explose et ses espoirs qui avaient volé en éclats sur cet appui pied droit en bout de course contre Rafael Nadal. Misère de malheur; en une fraction de seconde, le grand blond avait tout perdu. Douze mois plus tard, et après avoir salué avec classe le parcours de l'Argentin, il va batailler pour atteindre sa deuxième finale en Grand Chelem après celle (perdue) de l'US Open 2020. "Je ne peux pas être plus heureux, après avoir vécu l'année la plus difficile de ma vie", souffle-t-il. C'est avec l'espoir… chevillé au cœur et au corps que Zverev va défier Ruud, qui même s'il est revenu à son meilleur niveau, n'a ni la stature ni le charisme de "Rafa". Alors oui, il y aura un coup à jouer. Histoire que ce ne soient plus ses cris de douleur qui hantent le Chatrier mais bien ceux du bonheur?
LA PHRASE: "Alcaraz a effectivement puisé dans le répertoire de Federer, Nadal et Djokovic. Mais avec lui, tout est fait simplement. Techniquement comme tactiquement. On disait souvent que Federer, c'était la facilité. Pour moi, Alcaraz, c'est la logique. A Federer, ce n'était pas la peine de lui expliquer les choses. Il connaissait mieux le tennis que personne. Alcaraz, j'ai l'impression que c'est pareil. Je pense que beaucoup de gens qui le voient jouer se disent, après l'un de ses coups gagnants: 'Bah oui, c'était normal qu'il fasse ça.', comme si de rien n'était..." C'est signé Georges Deniau, 90 ans désormais, ancien entraîneur des équipes de Suisse et de France de Coupe Davis, et visiblement grand fan de Carlos Alcaraz, dans L'Equipe.
L'ÉMOTION DE HADDAD MAIA... C'est le visage le moins attendu du dernier carré, mais voir Beatriz Haadad Maia en demi-finale demeure bien réjouissant. Parce que la Brésilienne a un "cœur gros comme ça" (d'ailleurs, quelle est la taille d'un "coeur gros comme ça", vous le savez, vous?) et elle le démontre quasiment tour après tour dans cette quinzaine. Cela n'a pas manqué hier au fil de son quart de finale contre Ons Jabeur (3-6 7-6 6-1), devant laquelle elle s'est montrée accrocheuse et n'a rien voulu lâcher. En témoigne cette fin de 2e set, où la Tunisienne a bénéficié de deux balles de break à 5-5 qui ressemblaient à des balles de match, mais "Dame Beatriz" (c'est OK?) les a annihilées de fort belle manière. Avant d'empocher le tie-break et de faire cavalier seul dans la 3e manche pour poursuivre son rêve. Qu'écris-je, son conte de fées!
L'IMPLOSION DE JABEUR... Avouons-le, on a beaucoup aimé ce "petit" match entre Beatriz Haddad Maia et Ons Jabeur. Mais la manière avec laquelle la Tunisienne s’est liquéfiée après avoir manqué ses deux balles de break à 5-5 reste énigmatique. Alors qu'elle était plus expérimentée que son adversaire, qu'elle gagnait ses jeux de service aisément et qu'elle était censée être plus fraîche physiquement qu'une joueuse ayant disputé un bras de fer de 3h52 l'avant-veille, Jabeur a totalement implosé mentalement et athlétiquement. Bref, elle a perdu pied d'une manière aussi brusque qu'inattendue. Et dire que quelques heures plus tôt, elle évoquait une potentielle 3e finale de Grand Chelem dans sa carrière… "Mais maintenant j'espère aller chercher le titre à Wimbledon, j'en rêve", a déclaré au sortir de son élimination celle qui a été finaliste à Church Road en juillet dernier.
LE SOUVENIR BRÉSILIEN... Vingt-six ans après le premier triomphe parisien de Gustavo Kuerten au sortir d'un parcours magnifique (victoires notamment sur Muster, Medvedev, Kafelnikov et Bruguera), le Brésil se remet à rêver avec Haddad Maia. Mais les choses seront tout de même bien compliquées pour la joueuse de Sao Paulo, qui va tout à l'heure se retrouver face à la tornade Iga Swiatek. Il n'en demeure pas moins que certains veulent être optimistes pour elle, en rappelant qu'en 1997, "Guga" avait franchi ses 16e, 8e et quart de finale en cinq sets, comme Haddad Maia vient de le faire en trois manches.
LA PROMENADE DE SWIATEK... Le tarif a été un poil plus léger qu'en 2022 (6-4 6-2), mais l'issue est la même: dans la revanche de la finale dames de l'an dernier (6-1 6-3) Iga Swiatek a de nouveau plané au-dessus de Cori Gauff, et ce sans surprise. La Polonaise est la maîtresse de la planète terre (battue). Son Roland-Garros est une promenade. On dirait qu'elle est à l'apéro, tant tout lui semble facile, y compris contre une joueuse de la qualité de l'Américaine, qui décidément ne trouve pas la clé devant la no1 WTA. Cette dernière n'a passé que 5h32 sur le court en 5 matches (certes en bénéficiant d’un abandon) et s'élancera plus favorite que jamais tout à l’heure devant Haddad Maia, qui a traîné sur le court 7h23 (12h55) de plus que la tenante du titre! Il faudra semble-t-il davantage qu'un exploit à la Brésilienne… "Je vais tout laisser sur le court, je n'ai rien à perdre", a-t-elle souligné. Alors que Swiatek a admis que "plus le tournoi avance, moins j'ai de pression". A suivre...
Arnaud Cerutti - @arnaud_cerutti
La RTS diffuse plusieurs rencontres par jour. Tous les autres matches sont à suivre sur l'application Eurosport.
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