Carnet 11: Sinner face au défi ultime représenté par Djokovic, Alcaraz contre la "pieuvre" Medvedev, des imitations parfaites et une voie royale pour Jabeur

SINNER, MISSION... POSSIBLE? Vous y croyez, vous, à une victoire de Jannik Sinner tout à l'heure dans la première demi-finale masculine contre Novak Djokovic? Inutile de préciser que les réponses positives se font rares. Et c'est logique! Parce que rien ne parle en faveur de l'Italien, malgré tout son talent et tout son potentiel. La vérité, et il l'a rappelé lui-même mercredi, est que le Serbe est l'immense favori de ce tournoi et que rien ni personne ne semble pouvoir le priver d'un nouveau titre majeur. Oui, on a pu voir cette semaine qu'il pouvait être bousculé, comme l'ont démontré Hubert Hurkacz puis Andrey Rublev, mais même quand il plie quelque peu, le roseau de Belgrade ne rompt pas. Cela fait des lustres que ça dure et cela ne semble pas près de s'arrêter. Sinner le sait lui-même, puisque l'an passé en quarts de finale, il avait mené deux manches à rien contre le patron avant de perdre quand même. "Mais ce sera un match différent, (se r)assure le Transalpin, car j'ai beaucoup progressé depuis lors, notamment sur le plan physique. Je suis plus fort. Et mentalement, j'ai une attitude différente. J'ai davantage d'outils dans mon jeu." De là à dire qu'il a de quoi faire tomber une tête...

DJOKO SEREIN... S'il se dit conscient de devoir affronter un Jannik Sinner très motivé, Novak Djokovic - qui mène 2-0 dans ses duels avec l'Italien - n'est pas du genre à paniquer. "Jannik joue à un très haut niveau, il aime être agressif, prendre le point à son compte, et je suis sûr qu'il sera très motivé. Mais comme je le suis moi aussi..." Le loup de Belgrade a les crocs!

ALCARAZ OU MEDVEDEV? Sur le papier, l'autre demie masculine opposant Carlos Alcaraz à Daniil Medvedev paraît plus indécise. Il y a autant d'arguments qui parlent pour l'un que d'arguments qui parlent pour l'autre. L'insouciance du premier parviendra-t-elle à endiguer la qualité de service du second? Pas mal d'interrogations se bousculent avant ce bras de fer, mais les deux joueurs ont dit saliver à l'idée de s'affronter. "Je sais que ce sera difficile contre Daniil, car comme l'a souvent dit Rublev, c'est une pieuvre, mais c'est une demi-finale de Wimbledon, et c'est logique que rien ne s'annonce évident, a relevé l'Espagnol. Son jeu s'adapte très bien sur gazon, mais je vais me préparer pour cela et je compte bien arriver frais et dispo." Voici deux ans, alors 75e mondial, Alcaraz avait pris une secouée 6-4 6-1 6-2 en 1h34 contre le Russe. Gageons qu'il n'y aura rien de similaire tout à l'heure!

MEDVEDEV ET L'AUTRE SOUVENIR... Si Daniil Medvedev a pour sa part reconnu se souvenir davantage de son deuxième affrontement avec Alcaraz, lorsqu'il avait été archidominé 6-3 6-2 en finale d'Indian Wells ce printemps, il n'entend pas se présenter sur le Centre Court avec ce match dans un coin de son esprit. "Non, car je crois que ce qui s'est passé là-bas ne va pas beaucoup compter vendredi, a lancé le Moscovite. Les surfaces n'ont rien à voir. Ici, la balle rebondit plus bas, la qualité du service sera plus importante. A Indian Wells, j'avais eu l'impression tout au long du match de ne pas pouvoir remporter le moindre point "gratuit" avec mon service, ce qui ne devrait pas être le cas dans notre demi-finale. Au-delà de ça, il est clair que ça va être très intéressant d'affronter Carlos, qui est un joueur extraordinaire. Ce qu'il réalise depuis maintenant plus d'une année est incroyable. Il ne s'arrête jamais, en plus! Je devrais donc faire le match parfait pour espérer rallier la finale." Âgé de 27 ans, Daniil Medvedev aura soudainement l'impression d'être vieux, en retrouvant l'Ibère de l'autre côté du filet. A son apparente sagesse et à son expérience de faire justement la différence.

LES BELLES IMITATIONS... L'imitateur britannique Josh Berry a encore frappé. De passage mercredi à Wimbledon, il a joué plusieurs rôles, se révélant notamment parfait pour "singer" Novak Djokovic, Roger Federer ou encore John McEnroe, comme on peut le constater ci-dessous. Par le passé, Berry s'était déjà révélé excellent, y compris dans la "reproduction" de Stan Wawrinka.

VONDROUSOVA, SI PARFAITE PENDANT 45 MINUTES… Vainqueur 6-3 6-3 d'Elina Svitolina, Marketa Vondrousova disputera donc une deuxième finale en Grand Chelem, quatre ans après sa défaite à Roland-Garros contre Ashleigh Barty, et c'est peu dire que la Tchèque mérite cette nouvelle chance. Hier, à l'exception d’un 3e jeu de service littéralement gaufré avec notamment deux double-fautes, puis d'un incroyable moment de flottement à 6-3 4-0 alors qu'elle devait à ce moment-là enterrer totalement les espoirs de son adversaire, la 42e mondiale a presque tout fait tout juste devant l'Ukrainienne, à bout de souffle et visiblement de nerfs, aussi. Alors certes, d'aucuns diront que c'était un jour "sans" pour Mme Gaël Monfils, mais ce serait une insulte à l'intelligence tactique de la gauchère, qui a su durant 50 minutes utiliser à merveille son coup droit et son sens de l'amortie pour prendre le large. C'est elle qui a su réduire en miettes les velléités de Svitolina. Un autre rendez-vous l'attend désormais. L’expérience de Paris 2019 pourra-t-elle au moins lui servir samedi après-midi? Honnêtement, on ne la voit pas battre Ons Jabeur...

LA QUESTION MENTALE… "Oui, j'étais incroyablement nerveuse", a admis Marketa Vondrousova lors de son interview d'après-demi-finale; on s'en serait douté! Parce que si elle a su empoigner sa demi-finale par le bon bout en étant tout de suite au-dessus de Svitolina, la Tchèque a ensuite complètement perdu pied pendant un quart d'heure, à partir de 6-3 4-0 40/0, alors que le billet pour la finale lui faisait des œillades. Troublée par la drague intempestive que lui faisait le ticket, la gauchère en a perdu non pas son latin mais son tennis et son mental. Ce quart d'heure passé l'esprit ailleurs, fait de services qui ne passaient plus et de coups qui ne lui ressemblaient pas, aurait pu lui coûter très, très cher. Heureusement pour elle que Svitolina n'avait pas l'allure d'une combattante! Ca devrait être une autre limonade, samedi, devant Jabeur...

ET SABALENKA A VOLÉ EN ÉCLATS... Si Marketa Vondrousova a connu 15 minutes de flottement, que dire d'Aryna Sabalenka, qui a totalement sombré alors qu'elle avait un bon pied en finale? La Biélorusse menait 7-6 4-2 devant une Ons Jabeur qui n'en pouvait plus d'être rouée de lourdes frappes, mais à partir du moment où elle s'est vue No 1 mondiale (une victoire contre la Tunisienne lui garantissait le trône), la lauréate de l'Open d'Australie n'a plus touché le gazon. Sa tronche a volé en éclats, son tennis aussi, faute d'avoir un plan B, faute d'avoir de la variété dans son service, faute de pouvoir se montrer lucide (défaite 7-6 4-6 3-6). Quiconque a déjà pratiqué ce sport sait les difficultés que cela engendre (oui, on a tous "chokés"), mais cela reste déroutant à un tel niveau. Au vrai, si l'on peut louer les mérites de Jabeur, qui a su s'accrocher malgré les premiers vents contraires, il y a vraiment de quoi s'interroger sur ce qu'a proposé celle qui ne sera finalement pas sur le trône lundi prochain. D'autant plus qu'elle avait fait pareil voici 5 semaines en... demi-finales de Roland-Garros.

JABEUR, VENT DANS LE DOS... Après les vents contraires connus durant un set et demi devant Aryna Sabalenka, Ons Jabeur se retrouve... le vent dans le dos, désormais. Finaliste l'an dernier, elle pourra s'appuyer sur cette expérience samedi contre Marketa Vondrousova. Forte qui plus est de ses trois victoires de rang sur des membres du Top-10 (Petra Kvitova, Elena Rybakina puis Sabalenka), la Tunisienne a tout pour fondre sur le trophée, et non devant. Difficile de ne pas l'imaginer sacrée dans un peu plus de 24 heures.

Arnaud Cerutti - @arnaud_cerutti